Vers
le deuxième tour des présidentielles
Le
point au 30 avril 2017. Note 52.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuerons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 6 mai et sans doute au-delà car
la lecture complète des présidentielles ne s'effectuera qu'après
les législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et
même document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour
effectuer cette activité politique chronologique.
1
- Nicolas Hulot s'exprime à son tour :"Je
voterai contre Marine Le Pen. Je voterai sans hésitation pour
Emmanuel Macron", dit-il,
dans une tribune qui est aussi un appel au candidat d'En Marche.
« M.
Macron, ce vote de raison et de responsabilité au 2e tour vous
oblige plus qu'il nous oblige. Il ne s'agit en aucun cas d'un chèque
en blanc et encore moins d'une adhésion sans réserve à votre
projet, qui n'a pas pris la mesure de l'exigence de solidarité dans
laquelle se trouvent le pays, l'Europe et le monde », écrit
Nicolas Hulot.
« Aujourd'hui,
Emmanuel Macron, vous ne pouvez pas prétendre devenir un président
responsable et ignorer tous les laissés-pour-compte de la
mondialisation. Pas plus que vous ne pouvez ignorer les 26% du corps
électoral qui ont choisi, au premier tour, la vision plus intégrale
de l'écologie et des solidarités défendue par Jean-Luc Mélenchon
et Benoît Hamon. Vous voulez être le 7 mai celui qui aura le devoir
de les représenter, ayez le courage de leur donner des gages
aujourd'hui ! ajoute-t-il.
Trop
tard ! Il ne suffit pas d'avoir raison aujourd'hui. Hulot a
voulu rester au-dessus de la mêlée. On peut comprendre, mais ce ne
fut pas efficace. Qu'a-t-il fait pour soutenir, de tout son poids,
« la vision plus intégrale de l'écologie et des
solidarités défendue par Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon » ?
Quels « gages » Macron peut-il leur donner ?
Sa conception de l'économie n'est pas compatible avec une
politique socio-écologique forte et cohérente.
Tout
se passe comme si Nicolas Hulot, à son tour, perdait de son prestige
en cédant à la peur de la « peste brune ». Qu'Alain
Juppé appelle à voter Macron, soit. Il est dans sa logique libérale
mais non « hard ». Hulot doit rester dans le positif et
dire ce qu'il veut plus que ce qu'il ne veut pas. L'écologie réelle
a besoin de lui, Pas Macron qui l'emportera sans avoir besoin de
faire appel aux écologistes.
2
- Dupont-Aignan est tombé dans son propre piège. On
ne peut être nationaliste, « autarciste », dans ce
contexte de bipolarisation droite / extrême droite et rester sur la
touche. Son ralliement à Marine Le Pen est hélas logique. La
candidate FN y gagnera peu (et peut-être y perdra encore).
Dupont-Aignan y perdra tout, jusqu'à sa liberté politique !
3
– Monique
Pinçon-Charlot, sur
France Inter, rejette l'alternative Macron/Le Pen.
La
sociologue précise : « Trump,
Fillon, Le Pen et Macron sont les représentants du système
capitalisme dans sa phase néo-libérale. Cette oligarchie, pour
perdurer, a besoin de construire de fausses alternances. Les
milliardaires sont au pouvoir. Pour eux, la seule chose qui compte
c'est que l'oligarchie continue de concentrer toutes les richesses et
les pouvoirs. C'est une guerre de classes des plus riches contre les
peuples.
Je
ne voterai ni pour Macron ni pour Le Pen ».
4
- François Hollande, évidemment, appelle à voter Macron.
Le
président sortant qui émettait régulièrement des réserves sur
son ancien protégé, a appelé samedi les Français à « prendre
un bulletin Macron » au second tour de la présidentielle, le
7 mai, pour barrer la route à Marine Le Pen. Est-ce une bonne
nouvelle pour le candidat d'En marche ? Ce n'est pas sûr.
Le champion de l'impopularité, très bientôt ex-président, n'est
plus trop entendu. Si, comme beaucoup le pensent, Macron est une
« créature » de François Hollande, son poulain, celui
par qui le septennat est en partie validé, alors, oui, il y a une
logique dans la prise de position de celui qui, se craignant trop
désavoué ne s'est pas représenté. Mais cela encouragera-t-il pas
les électeurs anti-Hollande à voter Macron ? Je ne saurais le
dire...
5
- Trop de soutiens peu nuire.
Les
appels à voter Macron se multiplient. De Borloo à Badinter, ceux
qui voient derrière Marine Le Pen (et, sur ce point, ils n'ont pas
tort), une entreprise de réahabilitation de politiques violentes qui
ont déjà meurtri l'Europe, en Allemagne, en Italie, en Espagne, au
Portugal, en Grèce..., brandissent le bouclier anti-FN afin,
disent-ils, de nous protéger du retour du fascisme. La réalité est
plus complexe. Prendre les Français pour des sots est fort
périlleux. Qui a donné des arguments à la candidate nationaliste
et xénophobe sinon ceux qui ont mis en œuvre des politiques de
refus du vote des immigrés, de limitation maximale de l'accueil des
réfugiés, d'hostilité à l'hébergement des Rroms ou Tsiganes,
d'approfondissement des inégalités ? Il ne suffit pas d'en
appeler à la défense de la République, encore faut-il encourager
et réaliser une politique de partage. Critiquer le Front National,
oui mais en lui opposant une démocratie d'égalité, de fraternité
et de liberté, et pas seulement le temps d'une campagne électorale !
6
– Renvoyer dos à dos la peste brune et le libéralisme bleu
horizon.
Jean
de La Fontaine nous avaient prévenus : la peste résulte de nos
erreurs et nous risquons la guerre.
Un
mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre...
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre...
Et
cette peste est brune quand elle prend le visage de l'ultra
nationalisme brutal. Quant à nos erreurs, elles sont des crimes
quand nous accablons les faibles et pardonnons tout aux riches et aux
puissants ! Il n'y a pas de démocratie quand les inégalités
perdurent et s'aggravent.
Eh
bien, manger moutons, canaille, sotte espèces
Est-ce
un péché ? Non, non ! Vous leur fîtes Seigneur
En
les croquant beaucoup d'honneur./.../
On
n'osa trop approfondir
Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Quant
à la couleur bleue, elle est généralement associée aux partis de
droite ou conservateurs.
Le bleu est
historiquement associé à la monarchie, mais s'apparente, dans la
société moderne, à l'autorité ou à la police. La chambre élue
le 16 novembre 1919, très majoritairement composée d'élus
ultra-conservateurs fut surnommée « Chambre bleu
horizon » (la couleur des uniformes français et celle de la
droite). Allons-nous, presque un siècle après, retrouver un tel
Parlement aux ordres d'un président libéral et appuyé sur des
forces conservatrices variées et convergentes ?
Les
médiacrates passent leur temps à tenter d'enfermer chaque électeur
dans un syllogisme : Tu es un républicain, or Marine Le Pen
n'est pas républicaine ; tu ne peux donc voter que pour le seul
candidat qui reste et qui est républicain : Emmanuel Macron.
Beaucoup de Français se laisseront prendre à ce sophisme.
Voudrait-on laisser penser aux Français que quiconque ne vote pas
Macron par conviction ou, à la limite, par résignation, est traître
à son pays, même s'il exprime, par ailleurs, sa vive hostilité au
Front National incarné par Marine Le Pen ?
On
peut critiquer les autres choix possibles mais ils existent ! Ne
pas voter pour les idées crypto-fascistes ou pour des idées
franchement libérales, en clair capitalistes, ne peut être
considéré comme un acte antirépublicain. Bref ne pas voter, voter
blanc ou voter nul pour dire son refus d'un choix biaisé est
d'autant plus licite que le vote, en France, n'est pas obligatoire,
que les votes blancs, depuis 2014, doivent être décomptés et que
les votes nuls peuvent être émis par des électeurs protestataires
qui expriment ainsi leur rejet d'une alternative à leurs yeux
inacceptable. La pression multiforme exercée sur l'électorat pour
qu'il vote en masse Macron
est considérable, mais, pour autant, ce n'est pas ainsi que l'on
convainc.
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