vendredi 30 août 2013

Syrie, ira, ira pas ?


Paris, qui a besoin qu'on parle d'autres choses que des retraites ou du différend Valls-Taubira trépigne d'impatience, Washington réfléchit encore, Londres, Berlin et Ottawa, échaudés par l'expérience irakienne n'iront pas.
Allez en Syrie, au fait, mais pourquoi faire ?
Simplement, parce que Bachar en utilisant, peut-être on n'en est pas encore tout à fait sûr, des armes chimiques contre son peuple, ne respecte plus les règles du « jeu de la guerre », alors, François, le père fouettard et Barak, qui lui avait dit de ne pas dépasser la ligne rouge, voudraient le punir.
Que plus de 100 000 Syriens soient déjà morts dans cette guerre civile, que plus de 4 000 000 d'entre les habitants (le quart de la population) aient fui les zones de combats, qu'une grande partie du pays soit en ruine ne dérangeaient pas vraiment, jusqu'alors, les dirigeants occidentaux.
Cela leur permettait de parler et de gesticuler et de ne jamais se mettre d'accord faute d'un consensus au Conseil de sécurité de l'ONU. On entendait bien quelques messages pleurnichards sur ces pauvres civils victimes des exactions des militaires ou des rebelles, mais on commence malheureusement à être habitué à ces litanies permanentes avec tous les attentats perpétrés dans les pays où l'on a voulu imprimer notre grandeur démocratique.
Maintenant, on voudrait bien châtier le « tricheur » mais on a peut-être parlé un peu trop vite car le morceau est gros ! Le moyen-orient est une poudrière. Il suffirait de peu pour générer une explosion aux conséquences incalculables. (Voir carte).
Allez, Messieurs, le courage est quelquefois de savoir renoncer.

Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux 


mercredi 28 août 2013

Retraites : salarié, on se moque de toi !


Le gouvernement, les syndicats et les patrons se sont réunis, les lundi 26 et mardi 27 août, pour mettre en place un énième plan destiné à garantir la pérennité des retraites par répartition et à trouver un équilibre financier.

Cet exercice nous amène à quelques réflexions. D'abord, décernons des félicitations au gouvernement et à son premier ministre. En effet, moins d'une heure après la fin des rencontres, un plan était présenté à la presse ! Quelle rapidité dans la synthèse ! À moins que la messe ne fût dite bien avant et que les rendez-vous fussent seulement destinés à l'endormissement des foules.

Ce « nouveau » plan prévoit que l'âge de départ à la retraite à 62 ans reste inchangé. Seule la durée de cotisations, pour bénéficier d'une retraite à taux plein, s'allonge de 42 à 43 ans en... 2035 ! Ce point particulier du plan constitue un abus de confiance caractérisé sachant que :
  • l'âge moyen où l'on trouve un emploi stable est de l'ordre de 27 ans1,
  • un salarié sur trois2 est, et reste, longtemps au chômage à partir de 50 ans,
  • que les périodes de chômage, quelle que soit leur durée, ne sont pas totalement prises en compte dans le calcul de la retraite.
L'addition de tous ces paramètres entraîne une durée moyenne de cotisations de l'ordre de 30 ans3, aussi, pratiquement, sauf exception, ou sauf à travailler jusqu'à 75 ans, aucun salarié ne bénéficierait plus de la retraite à taux plein. On cherche quelles sont les valeurs socialistes dans cette démarche, en effet, nos dirigeants voudraient, sans en avoir l'air, enterrer la retraite par répartition qu'ils ne s'y prendraient pas autrement.

Enfin, sauf à pratiquer l'art divinatoire, qui peut aujourd'hui connaître l'évolution du « travail » dans les 25 prochaines années ? Nous recommandons à nos dirigeants la lecture du livre de Jeremy Rifkin sur La fin du travail4 (préfacé par Michel Rocard) qui affirme, exemples à l'appui, que le travail productif tel que nous le connaissons aujourd'hui tend purement et simplement à disparaître. Un livre de Jean Fourastié5 mettait déjà en évidence la tendance longue, mais constante, de la baisse de la durée du travail. Quant à Jacques Ellul6, voici 30 ans, il jugeait inéluctable la diminution drastique du temps de travail.

D'ici donc, ces 25 prochaines années, au rythme où le temps de travail utile se déconnecte de la production, ou bien les rémunérations cesseront d'être proportionnelles au nombre d'heures effectuées (et le plein emploi salarié ne sera plus qu'un souvenir) ou bien les ménages verront leur niveau de vie s'effondrer. À quoi s'ajoute, et c'est pire encore, que finir sa vie dans la dignité avec des revenus suffisants sera tout simplement devenu impossible pour la grande majorité des citoyens !

Nos dirigeants sont enfermés dans leurs archaïsmes et leurs idées reçues. Leur manque de courage politique, leurs préoccupations électoralistes les cantonnent dans la répétition de recettes rebattues alors que la société avance sans eux, mais surtout sans nous, complices que nous sommes de leur inertie.

Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux


1     http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/france/taux-de-chomage-des-jeunes-de-moins-de-25-ans.html
2     http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/04/26/seniors-plans-sociaux-radiations-les-chiffres-du-chomage-a-la-loupe_3167445_3224.html
3     travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/article200910.pdf - 
Voir page 5 du document : «  La hausse de l’âge de fin d’études et les difficultés d’insertion des jeunes sur le marché du travail se traduisent par une baisse sensible au fil des générations des durées d’emploi à 30 ans. Celles-ci diminuent en moyenne de 2,6 années entre les générations nées entre 1934 et 1943 et celles nées entre 1964 et 1973 ».
4    Rifkin Jeremy, La fin du travail, éditions La Découverte, (1996).
5    Fourastié Jean, Les Quarante Milles Heures, Gonthier-Laffont (1965), reparu aux éditions de l'Aube (2007).
6    Ellul Jacques, Pour qui, pour quoi travaillons-nous ? Textes choisis, éditions La Table ronde, (2013)

mardi 20 août 2013

Nous puisons dans nos réserves et nous les épuisons

Serions-nous devenus "écolosceptiques", sourds et aveugles, ou simplement résignés face aux menaces qui pèsent sur notre destinée planétaire ? Un rappel brutal nous invite à  comprendre que nous ne pourrons longtemps encore vivre comme si la terre était inépuisable !

Aujourd’hui, 20 août, est, en effet, un jour triste et solennel : c’est l’ « Earth Overshoot Day », littéralement « le Jour du Dépassement Planétaire ». Cette date symbolique signifie  qu'entre le 1er janvier et le 20 août 2013, l'humanité a consommé toutes les ressources naturelles que la terre pouvait produire en un an. Nous sommes, à présent, en déficit écologique. En seulement 8 mois, les habitants de la planète ont, ensemble, épuisé les ressources que celle-ci est capable de produire en un an.
 
Tous les ans, l'ONG Global Footprint Network calcule le « jour du dépassement » : le jour où la consommation en ressources naturelles de l'humanité dépasse ce que la planète est capable de produire en un an. Cette date symbolise ainsi un budget disponible épuisé pour l’année.

Le premier dépassement est intervenu en 1970. Depuis, la date se fait chaque fois plus précoce, marquant une accélération importante du processus de dégradation de notre planète. Les humains ont mesuré ce plafond pour la première fois le 19 décembre 1987. L'Overshoot Day était tombé, en 2000, un 8 octobre et en 2009, un 7 septembre. 
 
Pendant très longtemps la nature a été capable de se régénérer et de compenser la consommation de l’homme : sa biocapacité restait intacte. Mais depuis environ 30 ans, un seuil critique a été franchi. La consommation de l’homme dépasse désormais ce que la nature est en capacité de fournir en une année en terme de recyclage du CO2 libéré et de production de nouvelles matières premières. L'humanité vit au-dessus de ses moyens.

A partir d'aujourd'hui, et jusqu'à la fin de l'année, l’homme va répondre à ses besoins en épuisant des stocks des ressources naturelles et en accumulant des gaz à effet de serre dans l'atmosphère.


Il faudrait 1,5 Terre pour répondre aux besoins d'une population humaine toujours croissante. Et si nous continuons ainsi, nous aurons besoin, bien avant la moitié de ce siècle, de 2 planètes ! Aujourd’hui, plus de 80 % de la population mondiale vit dans des pays qui utilisent plus de ressources que ce que permettent les écosystèmes de leur territoire national. On les appelle les pays « débiteurs écologiques ». Ces pays détruisent soit leurs propres ressources naturelles soit celles des autres. 


La plus grosse empreinte écologique est à mettre sur le compte du Qatar. Si tout le monde vivait comme les Qataris, 6,6 planètes seraient nécessaires. Viennent ensuite le Koweït et les Émirats Arabes Unis. Évidemment pas tous les habitants de ces États du Golfe qui sont des étrangers au pays super exploités... Le Danemark occupe la quatrième place, talonné par les États-Unis, dont la consommation équivaut à quatre planètes par an. L'Afghanistan, le Timor-Oriental et la Palestine ferment la marche avec 0,3 planète et moins.

Autre mode de calcul appliqué aux surfaces de chaque pays : parmi les pays "débiteurs écologiques", le Japon, par exemple, a besoin de plus de "7,1 Japon" pour subvenir aux besoins de ses habitants et le Qatar, encore, 5,7 fois sa superficie. La France consomme, elle, l'équivalent de 1,6 France par année.

Nous ne pouvons plus continuer à creuser cette dette écologique. De nombreuses solutions sont disponibles et permettent de s’attaquer au problème : énergies renouvelables, aménagement urbain, éco-constructions, réforme fiscale écologique, régimes alimentaires moins riches en viande, prise en compte du cycle de vie des produits, etc . Nous avons encore le choix. Pour combien de temps encore ?





 Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran

mardi 13 août 2013

Réflexions sur l'énergie nucléaire.


Alors que l'on commémore les dramatiques bombardements nucléaires des 6 et 9 août 1945 sur Hiroshima et Nagasaki, -  plus de 300 000  victimes immédiatement ou dans les mois et les années qui ont suivi -, une information concernant le Japon tombe :  «  Fuites radioactives à Fukushima : problème "urgent" avec l'eau contaminée, selon le Premier ministre du Japon ».

 

La menace d'une catastrophe pire encore que celle de Tchernobyl plane sur l'humanité. Trois réacteurs détruits déversent dans l'air, dans l'océan et dans la terre, leur poison mortel. Les ingénieurs ne savent pas comment faire face à tous ces problèmes. Tous les spécialistes qui ont conçu et fabriqué la machine nucléaire en clamant que la sécurité « était, est et sera totale », n'ont pas de solution à proposer lorsqu'une telle catastrophe majeure a lieu.

 

Ils n'ont cessé d'affirmer que la contamination nucléaire est sans danger, que l'état du réacteur sous le sarcophage de Tchernobyl est stabilisé, qu'il n'y a pas de pollution à redouter dans l'océan Pacifique, que les réacteurs et la centrale de Fukushima sont sous contrôle, que les effets des particules dispersées dans l'environnement sont nuls, etc … alors qu'ils n'en savent rien. La technologie nucléaire est une technologie d'occultistes, et pour cause, personne ne peut aller y voir.

 

À Fukushima, l'eau constitue le principal problème. Celle qui refroidit, en permanence, les cœurs fondus des trois réacteurs devient hautement toxique et radioactive à leur contact. Elle est traitée et le césium, qui en est extrait, est conservé dans des milliers de bidons, sur le site. Ce qui reste de l’eau toxique est stocké dans des citernes et des réservoirs : 320 000 tonnes environ, pour une capacité maximale actuelle de 380 000 tonnes (qui sera atteinte vers la mi-novembre 2013 !)

Chaque jour, 1 000 tonnes d’eau naturelle souterraine sont en circulation, 400 tonnes d’eau se déversent dans les sous-sols de la centrale (dont personne ne connaît l’état depuis séisme de mars 2011!) et 300 tonnes d’eaux contaminées migrent vers l’océan. Cette pollution touche près de 40% des poissons pêchés autour de Fukushima qui sont impropres à la consommation. Quarante espèces des grands fonds sont touchées. De dérisoires filets sont tendus en mer pour tenter d’empêcher la circulation des poissons  contaminés...

Le 6 août, (stupéfiant anniversaire, effectuant le lien entre Hiroshima et Fukushima !), la situation d’urgence a donc été décrétée.

Cette situation aura des répercutions mondiales si elle ne se normalise pas rapidement. Elle nous amène à réfléchir à l'histoire de l'ère atomique depuis sa naissance, il y a 71 ans, et à proposer, en rassemblant un ensemble d'éléments non exhaustifs [1], de mener une réflexion raisonnée et rationnelle sur l'extrême dangerosité du domaine de l'industrie nucléaire civile et militaire.

Le début de l'ère atomique se situe, en 1942, aux USA, quand Enrico Fermi y crée la première pile atomique (nom donné au premier réacteur) constituée d'éléments d'uranium (la matière fissile) répartis dans un empilage de graphite (le modérateur). La seconde guerre mondiale amène les États-Unis à accélérer les études et à fabriquer la première bombe atomique, laquelle explose le 16 juillet 1945, sur la base aérienne d'Alamogordo dans l'État du Nouveau-Mexique. La suite est très rapide puisque deux bombes sont lâchées sur deux villes du Japon, moins de trois semaines plus tard.

Depuis 1945, huit autres pays se sont dotés d'armes nucléaires – la Grande-Bretagne, la France, la Russie, la Chine, l'Inde, le Pakistan, Israël et la Corée du Nord –. Trente-et-un ont construit des centrales nucléaires, soit un total de 439 réacteurs à travers le monde.
En France, en 1945, le général de Gaulle crée le Commissariat à l'Énergie Atomique (CEA) pour mettre au point la bombe atomique française. Le premier essai nucléaire eut lieu en 1961, dans le désert algérien. 210 essais suivront : jusqu'en 1966, dans le Sahara, puis en Polynésie française. Malgré un moratoire décidé par François Mitterrand, en 1991, Jacques Chirac, en 1995, autorise la reprise des essais nucléaires dans le Pacifique. Le dernier essai eut lieu en janvier 1996. En septembre de la même année, la France signait le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Depuis cette date, elle n'a plus jamais effectué d'essais nucléaires. 
Les premiers réacteurs nucléaires « civils » datent de la fin des années 1950. Mais, lors premier choc pétrolier, en 1970, un programme de grande ampleur, le « plan Messmer », est lancé pour généraliser l'énergie nucléaire et prévoir la mise en chantier de trois réacteurs par an. Ce programme a fait de la France le pays le plus nucléarisé au monde. Aujourd'hui, on y compte 58 réacteurs, répartis sur 19 sites, tous de deuxième génération à eau pressurisée. Des réacteurs, dits de troisième génération (de type EPR), sont en construction, à Flamanville, près de Cherbourg, ou en projet, à Penly, près de Dieppe. Dans le même temps, dix réacteurs sont en démantèlement (voir ci-dessous), notamment celui de Superphénix à Creys-Malville.

L'énergie nucléaire [2], c'est quoi ?

La réaction nucléaire est une opération modifiant le noyau des atomes. Les atomes constitutifs de la matière sont généralement stables, pourtant certains d'entre eux (ceux de l'uranium) se transforment spontanément en émettant des rayonnements qui créent de l'énergie. C'est la radioactivité.

Les deux principales réactions, celles qui permettent de produire de l'électricité et des bombes sont :
- La fission nucléaire :  qui consiste à projeter un neutron sur un atome lourd "fissible" (l'uranium 235 ou le plutonium 239), pour le faire éclater en 2 atomes plus légers. Cela produit aussi de la chaleur, des rayonnements radioactifs, et 3 neutrons capables à leur tour de provoquer une fission : c'est le mécanisme de la réaction en chaîne.
- La fusion thermonucléaire : consiste à rapprocher suffisamment 2 atomes d'hydrogène (deutérium et tritium) afin de les faire fusionner en un atome d'hélium. Cela produit aussi de la chaleur et un neutron. Pour aboutir à cette fusion, il faut vaincre la répulsion électrostatique qu'il y a entre les atomes, ce qui suppose que le mélange de deutérium et de tritium soit porté à une température de l'ordre de quelques dizaines de millions de degrés.

C'est à partir de ces réactions qu'apparaissent de nouveaux élément chimiques, appelés transuraniens, produits artificiellement, et qui présentent des dangers redoutables.

Ces transuraniens sont des éléments chimiques dont le numéro atomique est supérieur à celui de l'uranium Tous ces radioéléments sont produits artificiellement, au sein de réacteurs nucléaires pour les plus légers et par des accélérateurs de particules de certains laboratoires de recherche spécialisés pour les plus lourds. Le plutonium est un élément chimique des plus rares dans la nature et qui a été presque exclusivement produit par l'homme, de 1940 à nos jours.

 Radionucléide       
Période
Cobalt 60
 5,2 ans
Tritium
 12,2 ans
Strontium 90 
 28,1 ans
Césium 137
 30 ans
Américium 241
 432 ans
Radium 226
 1 600 ans
Carbone 14
 5 730 ans
Plutonium 239
 24 110 ans
Neptunium 237
 2 140 000 ans
Iode 129
 15 700 000 ans
Uranium 238
4 470 000 000 ans


Quelques transuraniens pas très sympathiques :

Le plutonium fabriqué au coeur des réacteurs nucléaires est l'une des matières les plus dangereuses jamais créées par l'homme. Une poussière de plutonium suffit pour provoquer un cancer du poumon. À partir d'une masse critique de 5 ou 6 kg, le plutonium explose spontanément. Il doit donc être stocké en petites quantités (2,5 kg maximum, soit le volume d'un oeuf). Pendant plus de 240 000 ans, il reste dangereux .

Le neptunium, élément chimique de synthèse, radioactif, est le premier des transuraniens. Il reste dangereux pendant plus de 2 140 000 ans.

L'iode 129 fait partie des produits de fission et reste dangereux durant 15 700 000 ans.

L'uranium 238 est faiblement radioactif, mais sa durée de vie est de 4 470 000 000 ans.

Les déchets radioactifs :

Ces déchets radioactifs qui posent, aujourd'hui, les problèmes les plus importants à l'humanité tout entière sont les transuraniens. Ils sont produits par les réactions de fission des réacteurs nucléaires. Au moment de leur retrait des réacteurs ils ont des températures très élevées et des durées de vies extrêmement longues, ce sont les « déchets à Haute Activité et à Vie Longue » (HAVL), les déchets ultimes de l'énergie nucléaire et les plus dangereux, du fait de la grande concentration de radioactivité qu'ils contiennent. La France en produit 1 150 tonnes par an et, au 31 décembre 2007, selon l'Inventaire national des matières et déchets radioactifs de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), ils représentaient 0,2 % du volume des déchets radioactifs, soit 2 293 m3, mais rassemblaient 94,98 % de la radioactivité totale des déchets radioactifs produits. La concentration de radioactivité dans ces déchets est telle qu'ils constituent une source importante de chaleur, dont il faut tenir compte pour leur conditionnement. Il s'agit d'uranium et de plutonium, et de produits de fission (krypton, baryum, etc). Pour les refroidir, ils doivent être stockés pendant de très nombreuses années, jusqu’à ce qu’ils arrivent à une température qui soit assez basse pour le stockage final (environ 100C°). En France, on effectue un retraitement de ce type de déchets ce qui permet, entre autres, de réduire le volume occupé par ces derniers.

Démantèlement des centrales :

Aussi incroyable que cela puisse paraître, à la conception des centrales nucléaires, on ne s'est pas soucié de prévoir leur démantèlement. À ce jour, on « tâtonne » et on ne sait pas encore très bien comment on va s'y prendre... Une des principales difficultés est que la plupart des matériaux qui constituent la centrale, y compris le bâtiment du réacteur lui-même, sont devenus radioactifs.

L'exploitant EDF prévoit, pour le démantèlement des 58 réacteurs, un coût de 15 milliards d'euros. Les premières expériences montrent que ce coût est très largement sous-estimé : pour la centrale de Brennilis, toujours en cours de démantèlement, ce coût est déjà passé de 20 millions à 480 millions d'euros.

Retraitement des déchets :

Dans le monde, il existe quatre usines de retraitement :
    - La Hague en France (la plus importante au monde).
    - Sellafield (autrefois appelée Windscale), au Royaume-Uni.
    - Le complexe nucléaire Maïak, en Russie.
    - Tokai, au Japon.

En France, l'usine de La Hague évaluait, en 2010, à 1 320 000 m³ son volume de déchets radioactifs lequel devrait s'élever à 2 700 000 m3 d'ici 2030. Ces déchets proviennent de France et de divers pays. Les opposants au nucléaire considèrent que l'usine de la Hague est l'une des installations nucléaires les plus polluantes au monde, le site rejetant en mer des effluents radioactifs issus des procédés de traitement des combustibles usés. Ces rejets sont encadrés par des autorisations spécifiques. La gestion de ces déchets est dite par dilution (par opposition à une gestion par confinement). Greenpeace a, par exemple, mesuré dans les rejets radioactifs en Manche (230 000 m3 par an) et dans l'atmosphère, des concentrations de krypton 85 de l'ordre de 90 000 Bq/m3, alors que le rayonnement naturel est de 1 à 2 Bq/m3 dans l'air. En mars 2013, un taux anormal de tritium a été mesuré dans l'eau de mer par l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (ACRO). Environ 50 tonnes de plutonium y sont stockées. L'un des problèmes majeurs dénoncés par les techniciens est qu'il y a davantage de déchets nucléaires après retraitement que sans retraitement !

L'entreposage :

C'est une solution "temporaire", mais de longue durée, nécessaire pour laisser aux déchets les plus chauds le temps de refroidir en attente d’enfouissement définitif. Ils seraient stockés en surface ou “sub-surface” pour 300 ans. S'il s'agit d'une solution « temporaire », elle s'étendra sur des périodes séculaires, au prix d'une surveillance et d'une maintenance constantes très onéreuses. Pour le moment, dans notre pays, aucun site d'enfouissement n'est opérationnel (voir, ci-dessous, le cas de la CIGEO) et tous les produits radioactifs sont conservés en entreposage à l'air libre ou en tranchée.

L'enfouissement :

Voilà un cadeau empoisonné que l'on laisse aux futures générations. Les déchets enterrés resteront actifs pendant des temps quasiment infinis, et personne ne peut s'engager sur la durée du temps pendant lequel les fûts de déchets resteront étanches. On compte, bien sûr, sur la roche pour faire office de garde-fou. Mais, rien ne peut garantir la stabilité du terrain sur des durées aussi longues. Gaïa, notre Terre, est vivante et le sol instable ! On ne peut pas non plus empêcher les ruissellements souterrains. C'est un pari fou qui met en péril les générations futures. De plus, le coût des opérations d'enfouissement des déchets existants est exorbitant : en 2003, les évaluations étaient de 58 milliards d'euros ! Pour l'instant, EDF refuse de provisionner ces coûts. Quel sera le réel prix de revient du kWh électrique nucléaire lorsqu'il comptabilisera l'intégralité de ces charges futures … ?

Dans l'est de la France, à Bures, à la limite de la Meuse et de la Haute-Marne, le Centre Industriel de Stockage Géologique (CIGEO), qui ne fait pas l'unanimité, devrait stocker des déchets à partir de 2025, et pour 100 ans, à 500 m de profondeur, dans une couche de roche argileuse imperméable, choisie pour ses propriétés de confinement, sur de très longues échelles de temps. Le coût de l'opération est estimé aujourd'hui à 35,9 milliards d'euros.

En Europe, à l’ouest de la Finlande, sur la presqu’île d’Olkiluoto, là où s'édifie, dans la difficulté, le second EPR, des ouvriers creusent un trou de 450 mètres de profondeur, parcouru par cinq kilomètres de voies souterraines. Lorsqu’il sera terminé, en 2020, l’industrie nucléaire finlandaise commencera, alors, à y enterrer des milliers de tonnes de déchets radioactifs. La fosse serait scellée 100 ans plus tard pour rester inviolée pendant 100 000 ans : un défi insensé et risqué ! D'autres projets sont à l'étude ou en cours de réalisation en Allemagne, au USA, au Japon, en Belgique, au Royaume-Uni et même en Suisse.

Les accidents nucléaires [3] « connus » depuis 1942 :

Accidents majeurs :

28 mars 1979 : à la suite d'un enchainement d'événements, le réacteur N° 2 de la centrale de Three Mile Island (Pennsylvanie - USA) fond partiellement, entraînant un dégagement de radioactivité dans l'atmosphère. L'accident est classé au niveau 5 de l'échelle internationale des événements nucléaires (INES).

26 avril 1986 : un accident, de niveau 7 selon l'échelle INES, survient à la centrale Lénine de Tchernobyl, en Ukraine.  Des erreurs humaines et des défauts de conception, entraînent la fusion du coeur du réacteur n°4 qui explose, libérant dans l'atmosphère de grandes quantités d'éléments radioactifs. 250 000 personnes sont évacuées autour de la centrale. La ville de Prypiat est toujours interdite aux enfants mineurs et aux femmes enceintes ou en âge de procréer. 27 ans plus tard, le réacteur numéro 4 renferme toujours 130 tonnes de matières hautement radioactives qui seront dangereuses pendant au moins 4 millions d'années . Un nouveau sarcophage, destiné à recouvrir le réacteur, devrait être achevé en 2015. Il pèsera 30 000 tonnes, nécessitera 600 000 boulons et des kilomètres de charpente. Le tout pour un budget d'un milliard d'euros.

11 mars 2011 : à la suite d'un important séisme, suivi d'un raz de marée, la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, au Japon, est victime d'un accident nucléaire majeur classé au niveau 7 (le plus élevé) de l'échelle internationale des événements nucléaires, au même degré de gravité que la catastrophe de Tchernobyl, compte tenu du volume important des rejets. Mise hors service depuis l'accident, la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi doit être démantelée, ce qui s'effectuera pendant une durée évaluée, actuellement, à quarante ans.

Autres accidents :

1957 : à Windscale, au Royaume-uni, lors de l'entretien d'un des réacteurs graphite gaz à uranium naturel, un incendie nucléaire se produit et dure plusieurs jours pendant lesquels des produits de fission, essentiellement, sont rejetés à l'extérieur du bâtiment. Les vents entraînent le nuage radioactif au-dessus de l'Angleterre, puis touche le continent sans que la population soit avertie. L'accident fut classé au niveau 5 sur l'échelle internationale. Après cet accident, (pour oublier ?) Windscale est débaptisé et devient Sellafield.

19 avril 2005 : toujours à Windscale-Sellafield, 83 000 litres de matière radioactive sont  découverts dans une construction en béton armé, suite à une fuite dans une canalisation. La quantité de plutonium libérée - 200 kg - aurait pu suffire pour déclencher un accident de criticité (réaction en chaîne) même si l'enquête estime que la concentration était insuffisante pour cela. La même enquête avait montré que la fuite n'avait été formellement détectée qu'au bout de 8 mois !

En dehors de ces accidents les plus graves, il est officiellement recensé :

     - 32 incidents dans des centrales depuis 1969.
     - 11 incidents au cours de transports ou de traitement des déchets depuis 1964.
     - 21 incidents dans le domaine de la recherche médicale et militaire (secret défense) depuis 1942.
     - 4 accidents, lors des essais nucléaires, dont 1 au Sahara (alors département français)
    - 33 accidents [4] avec des vecteurs militaires aériens ou sous-marins depuis 1950. À ce jour, il reste au fond des océans, 9 bombes thermonucléaires qui n'ont pu être récupérées lors d'accidents aériens et 4 sous-marins nucléaires russes.
    - 8 pollutions de l 'atmosphère ou de l'eau, suite à des mauvaises manipulations, ou à des retombées accidentelles de satellites.

Soit 114 accidents ou incidents en 70 ans.

La liste, non exhaustive, établie pas L'INES [5] répertorie les données suivantes :
    - 7 dysfonctionnements de niveau 3, qualifiés d'incident grave.
    - 5 dysfonctionnements de niveau 4, qualifiés d'accident.
    - 4 dysfonctionnements de niveau 5, qualifiés d'accident.
    - 1 dysfonctionnement  de niveau 6, qualifiés d'accident grave.
    - 2 dysfonctionnements de niveau 7, qualifiés d'accident majeur.

Coûts humains :

                          Nombre estimé des victimes dues à l'exposition à la radioactivé

Estimations selon :                           CIPR (1)                       CERI (2)

Total des morts par cancers              1,2 million                    61 millions
Total des cancers non mortels           2,3 millions                123 millions
Mortalité infantile                           Non pris en compte        1,6 millions

Source : Recommandations 2003 du CERI. Etudes des effets sanitaires des expositions à de faibles doses de rayonnements ionisants, à des fins de radioprotection.
(1)           CIPR : Commission Internationale de Protection Radiologique
(2)           CERI : Comité Européen sur le Risque de l'Irradiation

L'AIEA (Agence Internationale de l'Energie Atomique) soutient qu'il n'y a pas d'augmentation des cancers imputée à la radioactivité dans la région de Tchernobyl ! Elle reconnaît seulement quelques milliers de cancers de la thyroïde qu'elle qualifie de “bénins”. Les normes officielles se basent sur le principe que “toute dose de rayonnement comporte un risque cancérigène et génétique" (CIPR 90) [6]. Toutefois, il faut noter que Les limites fixées ne correspondent pas à une absence de danger mais à un nombre de victimes jugé “acceptable” en regard des intérêts économiques !

Pour être complet [7], il faut aussi donner la parole aux défenseurs de la sécurité nucléaire qui affirment que cette technologie tue nettement moins de personnes que d’autres sources d’énergie, si l’on en croit un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). « Cela ne fait aucun doute », affirme Joseph Romm, expert dans le domaine de l’énergie au Center for American Progress, à Washington, « rien ne cause plus de décès que les combustibles fossiles. » Dans une analyse effectuée en 2002, l’AIE avait rassemblé les études existantes afin de comparer, entre plusieurs grandes sources d’énergie, les décès survenus par unité d’électricité produite. L’Agence avait examiné le cycle de vie de chaque combustible depuis son extraction jusqu’à la phase située en aval de son utilisation, et avait inclus les décès par accident ainsi que les expositions à long terme aux émissions ou aux radiations. C’est le nucléaire qui avait obtenu la meilleure note, tandis que le charbon était la source d’énergie qui faisait le plus de victimes.

Conclusions :


Après avoir fait un large tour d'horizon de la technologie nucléaire durant les derniers 70 ans, il est temps de conclure notre propos.

On pourrait, comme le présentent l'AIE et les papes du nucléaire, qui essayent de nous faire croire à la sureté de la technologie nucléaire et à la modicité de ses coûts, accepter l'énergie nucléaire.

Pourtant, dans ce débat, on imagine facilement de quel côté penche la balance entre les intérêts industriels ou financiers et la santé publique. Aujourd'hui, les risques sont assumés par les contribuables et les profits vont dans les poches du lobby nucléaire.

Savez-vous qu'EDF n'est même pas assurée pour prendre en charge les dommages dont elle aurait la responsabilité en cas d'accident majeur, laissant à l'État, c'est-à-dire aux contribuables, cette charge [8] ?

Savez-vous que les coûts de démantèlement des centrales ne sont pas normalement provisionnés ?

Savez-vous, aussi, que le traitement des déchets à long terme n'est pas non plus provisionné ?
Si, comme cela devrait être dans une comptabilité honnête, EDF était contrainte de reprendre tous ces frais et provisions …, adieu l'électricité nucléaire à bon marché (soit-disant) !
 
Savez-vous aussi que c'est vous qui payez que vous en soyez d'accord ou pas :
     - la recherche au travers du financement du commissariat à l'Énergie atomique (CEA),
     - la prise en compte des régimes spéciaux des agents du nucléaire,
     - le développement des programmes ITER [9] et Astrid [10], etc...

Cela signifie simplement que le nucléaire appartient aux Français en totalité sans que pourtant ils ne puissent le maîtriser. On essaye de nous convaincre que le nucléaire est une industrie d'avenir, c'est seulement un mensonge de plus ! Le niveau de production nucléaire est revenu au niveau de 1999 et sa part mondiale est de 8 %, soit celle de 1983.

Quand en considère les problèmes liés à la santé des personnes, les problèmes économiques deviennent vraiment secondaires, car le nucléaire est surtout une « bombe » à retardement !

Affirmer, après les accidents majeurs que nous avons connus que les centrales nucléaires sont sûres c'est refuser de voir que statistiquement, c'est le point de vue inverse qui s'impose : il n'y a qu'une évidence, c'est celle d'un prochain accident majeur. De plus, depuis des décennies, des déchets particulièrement dangereux, à durée de vie quasi éternelle, et dont personne ne sait que faire, s'entassent, s'enfouissent, pour qu'on les oublie. Ceux qui se rendent complices de ces actions irréfléchies devraient être traduits en justice pour mise en danger des générations futures, éventuellement pour génocide, car un drame majeur est possible.

En France, nous ne reviendrons pas sur le cas de la centrale de Fessenheim, et le fait que le Conseil d'État ait rejeté la demande de fermeture réclamée par plus de 100 collectivités locales, allemandes, suisses et françaises. En raison de son ancienneté, des risques sismiques, de sa situation sous le niveau du canal du Rhin et bien d'autres problèmes techniques, cette centrale devrait être fermée depuis des lustres et démantelée, il est lamentable que, sous prétexte de la pérennité des emplois et de l'économie locale, les syndicats et les lobbies commerçants mettent en péril la population de toute une région. Là aussi, il y va de la responsabilité et du courage des hommes.

Enfin, et nous terminerons par là, il est aussi lamentable que le lobby nucléaire ait fait reculer le développement des énergies renouvelable, empêchant à une filière nationale de voir le jour. Bientôt, notre pays se trouvera dans l'impossibilité de tenir son engagement : 23% d'énergie renouvelable en 2020. Cela l'exposera à des sanctions financières européennes mais cela le mettra, aussi, en position de faiblesse dans ce secteur en développement.

La position du gouvernement français, dans cette affaire, est particulièrement incompréhensible. Serait-il l'otage du lobby nucléaire ou le défenseur acharné du néo-libéralisme de type blairiste ?

L'énergie nucléaire est, en soi, antidémocratique, centralisatrice, à la différence des énergies renouvelables lesquelles rendent les citoyens indépendants, car nul ne peut être propriétaire de la lumière du soleil ou de la force du vent. En effet, comme le vent, le soleil ne coute rien. Nul ne peut les privatiser ou les nationaliser. Avec la fin de l'exploitation des énergies fossiles sonnera, inéluctablement, la fin le l'argent facile pour les vendeurs d'énergie ! D'où leur résistance.

Les énergies renouvelables ne font courir aucun des risques que fait peser l'énergie nucléaire, alors, ne faut-il pas remettre en cause, dès maintenant, avant qu'il ne soit trop tard, nos priorités énergétiques, et par conséquent, n'en doutons pas, notre modèle économique, et prendre un virage historique avant toute nouvelle catastrophe ?

Avant d'agir, devrons-nous, attendre, en France, le prochain « Fukushima-sur-Seine » ou « Tchernobyl-sur-Loire » ? Allons-nous laisser s'accroître un danger mortel, qui peut surgir de façon sournoise ou fulgurante, et s'étendre à l'ensemble du monde planétaire ?

Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux



[1] Les éléments que nous avons collectés sont ceux qui sont connus en dehors du domaine classifié « secret-défense », de ce fait un certain nombre d'événements plus ou moins graves n'est pas connu du grand public.
[2] http://assurance-vieillesse/lire-le-nucleaire-c-est-quoi-11237.htm
[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_d%27accidents_nucl%C3%A9aires
[4] Cette liste est très incomplète, les accidents ayant lieu dans l'ancien bloc de l'Est, en Chine et d'autres nations possédant l'arme nucléaire n'étant pas annoncés par les autorités de ces États.
[5] http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/La_surete_Nucleaire/echelle-ines/Pages/sommaire.aspx
[6] http://www.amtsn.asso.fr/spip.php?rubrique56
[7] http://www.econologie.com/forums/morts-des-energies-fossiles-nucleaire-et-hydroelectrique-vt10669.html
[8] Ce détail devrait nous rappeler la situation des banques lors de la crise de 2009 où nous avons tous mis la main à la poche.
[9] http://www.iter.org/fr/accueil
[10] http://www.cea.fr/energie/astrid-une-option-pour-la-quatrieme-generation

lundi 5 août 2013

Politique sécuritaire : une alerte qui tombe vraiment à pic ?


Washington décide de fermer une vingtaine de représentations diplomatiques suite à des messages émanant de responsables haut placés d'Al-Qaïda qui auraient été captés par la « surveillance » étasunienne. La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont imité les USA en fermant leurs ambassades au Yémen.

Des officiels américains se sont bousculés sur les médias US pour dénoncer les menaces d'attentats.
Le président de la Commission de la sécurité intérieure de la Chambre des représentants affirme : « Un attentat semble imminent /.../. C'est une des menaces les plus crédibles et les plus précises que j'ai vues depuis le 11 Septembre », suivi du général Martin Dempsey, le chef d'état-major américain : « Il y a un flot significatif évoquant des menaces et c'est à cela que nous réagissons /.../ La cible exacte n'est pas connue, mais l'intention est claire ». Dutch Ruppersberg, membre de la Commission sur le renseignement de la Chambre renchérit : « nous avons reçu des informations sur le fait que des membres haut placés d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique évoquent un attentat majeur ». Peter King, enfin, lui aussi membre de la Commission du renseignement de la Chambre des représentants, a souligné que les renseignements évoquaient « le fait que ça doit être un attentat énorme, et quelques dates ont été citées aussi /.../ Nous pensons que cela va le plus probablement se passer au Moyen-Orient ou autour d'une ambassade, mais il n'y a aucune garantie ». Quelques autres personnalités se sont aussi exprimés à ce sujet. 

Comme on pouvait s'y attendre, la NSA fait l'éloge de ses systèmes de surveillance qui lui auraient permis d'intercepter les messages en question. (voir : http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/08/05/fermeture-d-ambassades-le-programme-de-la-nsa-prouve-sa-valeur_3457701_3222.html)

Cela fait beaucoup de monde pour s'exprimer sur ce sujet, trop de monde nous semble-t-il !

Le plus pénible, en pareils cas, c'est que rien ne nous permet de savoir si les projets d'attentats sont avérés ou sont le résultat de la paranoïa des services de renseignements et des manipulations des gouvernements occidentaux.
Rappelons nous, comment le Général Colin Powell, déclarant, à la tribune de l'ONU, la main sur le coeur, que Sadam Hussein détenait des armes nucléaires, nous a trompé, alors que tous les services de renseignements occidentaux étaient sûrs du contraire. Il est de notre responsabilité qu'aucun de ces menteurs n'ait jamais été poursuivis, y compris Tony Blair.

Grâce au courage d'Edward Snowden, nous savons, aujourd'hui, qu'au lieu de revoir la politique de son prédécesseur Georges W. Bush, le président des Etats-Unis, Barak Obama, a renforcé les systèmes de surveillance de l'ensemble des communications mondiales.

D'abord le système PRISM qui permet d'accéder à nos données à partir des serveurs Web, ensuite XKeyscore, un programme secret de surveillance d'internet qui permet de suivre "à peu près tout ce qu'un utilisateur lambda" fait sur le réseau, et, aujourd'hui, on apprend, toujours à partir des mêmes sources, que le FBI est capable d’activer à distance les micros des smartphones Android et des PC pour enregistrer les conversations des utilisateurs. 

En France, malgré le mutisme du gouvernement, nous savons, comme l'a confirmé le journal Le Monde dans son édition du 4 juillet 2013, que la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et six autres services de renseignement espionnent, illégalement, la totalité de nos communications. L'ensemble de nos mails, de nos SMS, des relevés d'appels téléphoniques, des accès aux réseaux sociaux sont stockés pendant des années.

Si ce n'était pas dramatique, cela pourrait être drôle de penser que les « terroristes » n'ont même plus besoin de mettre leur menace à exécution pour déstabiliser l'ensemble du monde occidental. Colosse au pied d'argile, le modèle capitaliste ne sait vivre que dans une concurrence qui crée l'hostilité et l'agressivité. Il y a quelques décennies, on agitait le spectre du bloc communiste, et maintenant celui d'une mouvance pseudo religieuse qui menacerait notre système démocratique, lequel se cherche encore.

Nous nous garderons bien de confirmer ou d'infirmer la véracité des allégations des services de renseignements occidentaux, mais cette alerte nous semble tomber à pic et bien à propos pour justifier des systèmes de surveillance mis en place dans la plus grande opacité et pour voler au secours des gouvernants qui peuvent ainsi affirmer qu'il s'agit de décisions destinées avant tout à garantir la sécurité des citoyens.

Il nous semble important de rappeler les propos de Benjamin Franklin, l'un des « pères fondateurs des États-Unis », co-rédacteur, avec Thomas Jefferson, de la Déclaration d'indépendance des États-Unis de 1776 : «  Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux. »

Comme il a toujours raison !

Par nos peurs irraisonnées, aggravées par les discours sécuritaires des pouvoirs politique, financier et industriel nous participons à la construction d'une société de contrainte qui réduit nos libertés.

Tous surveillés, nous sommes tous complices !


Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux