lundi 31 octobre 2016

Non ! Le CETA n'est pas encore en vigueur.


Si on écoute les médias, on pourrait croire que « les carottes sont cuites » et qu'après le coup de semonce des Wallons belges, le traité de libre échange entre l'Europe et le Canada CETA signé à Bruxelles dimanche dernier est maintenant en vigueur.

C'est faux.

La plupart de nos concitoyens entende seulement le communiqué cité par la presse qui affirme que le CETA a été signé, puis les médias passent à autre chose, oubliant que nous ne sommes pas à la fin de l'histoire, loin s'en faut !

Est-ce par manipulation, par négligence, par paresse, par incompétence, par compromission que, souvent, les médias livrent des informations incomplètes et tronquées qui peuvent tromper les auditeurs et les lecteurs ne disposant pas des outils ou du temps nécessaires pour comprendre et évaluer l’information ?

Car, enfin, l'information complète est que si le traité CETA a effectivement été signé entre le Canada et la Commission Européenne, avant d'entrer en vigueur, il doit être ratifié par les 27 parlements des nations composant l'UE, que cette ratification sera longue et qu'elle n'est pas assurée car le traité contrevient à la Constitution de certains pays.

C'est le cas, par exemple, de Allemagne où la Cour Constitutionnelle oppose son veto à certaines dispositions du traité, c'est aussi le cas de la France où de nombreuses dispositions portent manifestement atteintes à la Constitution, par exemple le principe de précaution qui n'existe pas dans le traité en totale contradiction avec l’article 5 de la charte de l’environnement, mais aussi, le mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et les États ou la coopération en matière réglementaire, en effet, le traité prévoit la création d’un comité mixte réunissant des représentants du Canada et de l’Union européenne, mais pas des représentants des États membres.

D'autres pays ont aussi des oppositions. On le voit, les points de désaccord sont nombreux.

Suite à l'acceptation de la province wallonne, le premier ministre belge s'est empressé de dire que pas une virgule n'avait été déplacée, c'est faux … aussi, nous devons remercier nos amis wallons d'avoir résisté et attiré l'attention des Européens sur l'absence de fonctionnement démocratique de l'Union Européenne.

Nous aurions été en droit d'attendre une attitude semblable du parti socialiste français !

Réaliser l'union de l'Europe est une idée admirable, mais elle doit se construire sur des principes transparents et démocratiques où l'Homme a toute sa place, pas seulement les marchandises et la finance.

Si ces principes ne sont pas respectés, l'Union Européenne disparaîtra et l'Europe reviendra à ses vieux démons.

JCVitran – 31.10.16

samedi 29 octobre 2016

L'espérance de vie diminue en France !


Depuis les trente glorieuses, l'espérance de vie des Français ne cessait d'augmenter, cependant depuis 2015 cette hausse est interrompue.

L'espérance de vie à la naissance diminue à la fois pour les hommes et les femmes.

La constatation de l’augmentation continuelle de notre durée de vie devait déjà être relativisée, car une question se pose : … plus vieux mais dans quel état ?

Elle mérite d'être posée car ses conséquences sont importantes et multiples.

En effet, l'espérance de vie sans incapacité diminue depuis plusieurs années. En 2010, un homme français avait pour une durée de 78,2 ans, une espérance de vie sans incapacité de 61,9 ans et une femme, une espérance de vie sans incapacité de 63,5 ans, pour une espérance de vie de 85,3 ans.

Il faut aussi taire une fausse affirmation : la France ne se classe pas au premier rang en ce qui concerne l'espérance de vie ; elle se positionne, seulement, en quinzième position.

L'INSEE considère que la hausse de la mortalité est liée principalement à des conditions épidémiologiques et météorologiques peu favorables et pour le réseau Environnement et Santé, ces chiffres sont la conséquence de la situation de crise sanitaire dans laquelle la France s'enfonce depuis plusieurs années en raison de l'explosion des maladies chroniques, en effet, depuis 1990, les maladies cardio-vasculaires ont progressé 5 fois plus vite que la population, le cancer 4 fois plus, les affections psychiatriques 3 fois plus ...

Dans tous les cas, cette information est particulièrement symbolique car elle porte un sérieux discrédit à l'optimisme béat d'une société irresponsable qui veut nous faire croire que ses membres pourraient vivre mieux et plus longtemps.

JCVITRAN - 29.10.2016

dimanche 23 octobre 2016

Thomas Paine, pauvreté et civilisation.


Le texte, ci-dessous, qui, hormis l'évocation des Indiens d'Amérique, me semble toujours d'actualité, a été écrit en 1797 par Thomas Paine1.
La question reste effectivement sujette à grands débats !

JCVitran – 23.10.16
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« C'est une question sujette à de grands débats, que de savoir si cet état qu'on appelle avec orgueil, et peut-être par erreur, état civilisé, a plus contribué à avancer qu'à faire rétrograder le bonheur général des hommes.
D'une part, le spectateur est frappé de l'éclat des dehors les plus éblouissants ; de l'autre, il est navré du spectacle de la plus profonde misère ; l'un et l'autre sont l'ouvrage de la civilisation.
Les plus hauts degrés de l'abondance et du dénuement se trouvent réunis dans les pays qu'on appelle civilisés.
Pour bien comprendre ce que devait être l'état social, il faut auparavant se former une idée de l'état naturel et primitif des hommes, de cet état, dont on trouve encore l'image parmi les indiens de l'Amérique septentrionale.
On n'y rencontre nulle part le spectacle de cette pauvreté et de cette misère extrême, qui frappe nos regards dans toutes les villes et dans tous les carrefours de l'Europe.
La pauvreté est donc l'ouvrage de l'état social ; elle n'existe pas dans l'état de nature. »

1 https://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_Paine

samedi 15 octobre 2016

Nauru, la déchéance d'une nation ... ou ce qui nous attend demain !




Nauru1 est une petite île de 21 km2, l’équivalent de trois arrondissements parisiens, isolée au sein du Pacifique central et qui forme aujourd'hui la République de Nauru.

Son histoire contemporaine est intimement liés à son unique ressource, le minerai de phosphate, et aux perversités du système économique libéral.

Découverte tardivement, elle est successivement colonisée par l'Allemagne à partir de 1888, l'Australie en 1920, le Japon de 1942 à 1945 puis à nouveau l'Australie en 1947.

Comme pour la plupart des sociétés traditionnelles, le contact avec les Européens se traduit par l'introduction de nouveaux produits : armes à feu, alcool, tabac, mais aussi l'argent dont l'usage se répand.
Jusqu'aux années 1850, la coutume nauruane permettait une gestion des conflits par la négociation mais l'introduction des armes à feu déséquilibre les rapports de force entre les tribus nauruanes et les accrochages au sujet de discordes se muent rapidement en une guerre civile tribale. Par ailleurs, la population est régulièrement décimée par des maladies inconnues jusqu'alors contre lesquelles leurs défenses immunitaires sont déficientes.

À partir de 1906, le gisement de minerai de phosphate de l'île est exploité par différentes compagnies coloniales et dans l'entre-deux-guerres, cette industrie est en pleine expansion car les agriculteurs australiens et néo-zélandais achètent le phosphate nauruan.

Pendant le conflit entre le Japon et les Etats Unis, plus de 2000 soldats et travailleurs japonais et coréens ainsi que 600 habitants déplacés d'Ocean Island arrivent sur l'île. En septembre 1943, les Japonais déportent 1200 habitants, soit la majorité de la population nauruane, vers les îles Truk à 1600 kilomètres au Nord-Ouest, où sont basées les forces navales japonaises du Pacifique.
À la fin de la guerre, l'île est exsangue : sur les 1 200 habitants déportés dans les îles Truk, 759 ont survécu et sont rapatriés le 31 janvier 1946 sur Nauru. La population est ainsi passée de 1848 habitants en 1940 à 1369 habitants en 1946.

En 1948, l'exportation du minerai de phosphate rapporte 745 000 dollars australiens à la British Phosphate Commission mais seuls 2 % reviennent aux Nauruans et 1 % à l'administration de l'île.

Le 31 janvier 1968, au 22e anniversaire du rapatriement des prisonniers des îles Truk, Nauru devient indépendant sous la forme d'une République.

Le nouvel État entre alors dans une période économique particulièrement favorable. En juin 1970, alors que le cours mondial du phosphate connaît une forte hausse, Nauru nationalise la British Phosphate Commission permettant un contrôle total de l'exploitation du minerai de phosphate,.
Tous ces facteurs permettent à l’île de s'enrichir considérablement avec un produit intérieur brut par habitant de 50 000 dollars américains et un niveau de vie2 atteignant celui des pays occidentaux.
Nauru se dote alors de nombreux équipements et infrastructures : un centre de conférence international, un hôtel de luxe, une station de télécommunication satellite, une connexion de tous les habitants au téléphone, l'agrandissement de l'aéroport international, etc.

Les Nauruans qui s'occidentalisent, se vautrent dans la société de consommation : voitures, téléviseurs, électroménager sont importés, des supermarchés apparaissent. Ils ne payent pas d'impôts et dépensent sans compter.

Le résultat est que l’île s’est littéralement auto-dévorée à force de creuser pour extraire le phosphate, jusqu’à 80% de sa superficie y est passé. Il n’en reste aujourd’hui que des trous dans un sol inexploitable et désert. La forêt tropicale luxuriante a disparu et avec elle les nappes phréatiques, car Nauru est probablement l’un des seuls de la planète à n’avoir, à l’heure actuelle, aucune ressource en eau, si ce n’est la pluie et le dessalement de l’eau de mer.

Pourtant, le gouvernement Nauruan, prenant peu à peu conscience de l'épuisement des réserves de minerai de phosphate, cherche des alternatives. Il fait appel à des sociétés et des institutions occidentales qui conseillent des investissements et des placements financiers et immobiliers à Hawaï, Guam, Washington, Houston, aux îles Marshall, dans l'Oregon, en Inde et à Londres. Malheureusement la majorité de ces opérations sont entachées de corruption et de détournements de fonds.

À partir du début des années 1990, l'État nauruan est confronté à une grave crise financière, ne possédant plus ni ressources naturelles, ni industrie, ni agriculture, les revenus commencent à diminuer, il se tourne alors vers des activités illicites qui lui valent d'être inscrit sur la liste des paradis fiscaux : blanchiment d'argent, vente de passeport, marchandage de ses votes aux organisations internationales, et dépendance des aides au développement. L'île choisit, aussi, de devenir le sous-traitant de l’Australie dans l’accueil des réfugiés politiques.3

À partir de la fin de l'année 2003, Nauru est en faillite totale et ses habitants se rapprochent du seuil de pauvreté. Les banques saisissent des biens et certaines entreprises cessent de fournir leurs services au pays allant jusqu'à couper les liaisons téléphoniques et satellites avec l'île.

Durant ces décennies, le passage d'une société tribale à une société hyper-consommatrice a conduit les Nauruans à adopter des modes de vie dangereux pour la santé publique. Les mauvaises habitudes alimentaires liées à la consommation d'aliments et de boissons industriels d'importation, la consommation de tabac, la baisse des quantités disponibles de nourriture et l'inactivité causée par un taux élevé de chômage ont entraîné une hausse des cas de diabète (40 % de la population et 66 % des personnes de plus de 55 ans touchées soit un des plus forts taux au monde), d'obésité (30 % des moins de 25 ans et 50 % des personnes âgées touchées soit le plus fort taux au monde), de surpoids avec 90 % des adultes, d'hypertension artérielle, de maladies du système digestif, de cirrhoses, de cancers, de maladies dentaires, d'insuffisances rénales et des maladies cardiaques. À cela s'ajoute un fort taux d'alcoolisme et une mortalité importante liée aux accidents de la route.

L'espérance de vie a ainsi diminué à 59 ans pour les hommes et à 64 ans pour les femmes.

À ce déclin, s’ajoute la menace d’une montée des eaux due au dérèglement climatique car malgré un point culminant à 71 m de haut et un plateau central entre 20 et 45 m d’altitude, la très grande majorité de la population vit sur la plaine côtière large de 150 à 300 m qui culmine seulement à 10 m de haut.

Voilà comment comment en l'espace d'un siècle, la civilisation capitaliste a anéanti l'un des pays le plus riche du monde. Sur 21km2, c'est un concentré de capitalisme : pillage des ressources naturelles, surconsommation, corruption généralisée, clientélisme, pollution générale, mondialisation, investissements boursiers et fonciers, crise financière, argent sale, mafias, etc.

Nauru n’est pas un accident de l’histoire, mais le livre noir du capitalisme sauvage et de la mondialisation qui raconte comment un rêve de prospérité peut, en quelques années, virer au cauchemar.

Cela doit nous permettre de réfléchir aux conséquences du néo libéralisme mondial, à celles de nos modes de consommation et d'avoir une vision de ce que la folie de notre société pourrait nous réserver à l’avenir si rien n’est remis en cause …

JCVitran - 15.10.16
1 https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_Nauru
2 Nauru devient le second pays après l'Arabie saoudite dans le classement du produit intérieur brut par habitant.
3http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2013/08/03/l-ile-de-nauru-accepte-de-recevoir-les-demandeurs-d-asile-australiens_3457187_3216.html