samedi 4 février 2017

Fin des primaires ? Note 10


Présidentielles 2017. Début du secondaire.


Le point au 4 février 2017

par Jean-Pierre Dacheux

Nous voulons, au cours des mois qui continuent de s'écouler, analyser l'évolution de la situation politique au cours de la campagne électorale qui s'est ouverte depuis la fin 2016. Chaque texte complémentaire, daté, numéroté et modifiable, s'ajoute aux précédents présentés sous le même titre (« Avec ou sans primaires » puis « Fin des primaires »). Il peut être contredit, sans doute, parfois, par les événements. Fin mai 2017, nous regrouperons en un seul et même document, ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer cette activité politique chronologique, en un seul et même document.


Incertitudes et déconvenues : une campagne électorale bouleversée.

1 - Les primaires auront été sans effet.

Celles de « la droite et du centre » (quel centre : on n'en a guère entendu parler, en l'absence de François Bayrou ?) avaient débouché sur la désignation d'un candidat de la droite dure mais nullement contesté jusqu'à ce qu'il chute sur ce qu'on a appelé le « Pénélope Gate ». Le « Monsieur propre », donneur de leçons d'intégrité, a embauché son épouse sans qu'elle effectue une activité d'assistante parlementaire effective ! Une page va donc se tourner : le candidat pratiquement sûr d'être élu va se trouver contraint de se retirer dans la confusion.

Celles de « la gauche et des écologistes » (les écologistes pro-PS n'ont guère pesé sur le résultat !) ont conduit à la désignation d'un « frondeur », Benoît Hamon, qui n'appartenait pas à la majorité du PS, et qui se trouve confronté à trois défis parfois contradictoires : celui de se faire accepter par le PS, celui de faire alliance avec Jean-Luc Mélenchon et celui de déjouer le piège Macron mis en place pour déconsidérer ce qui reste de ce qu'on nomme encore, à tort, « la gauche ».

Les difficultés rencontrées par les partis organisateurs de primaires vont durer et s'accentuer. Les éliminations de Juppé, Sarkozy et Valls ne dégagent pas le paysage politique embrumé. Se trouver un autre « champion », pour les « Républicains » ne se fera pas sans douleurs. Juppé, pour le moment, ne veut pas jouer la ... bouée de secours. Les sondages vont-ils départager Hamon et Mélenchon pour permettre une union avec retrait concerté ? Ce n'est point sûr car il est trop dur de s'arrêter en plein élan et les égos sont présents au point de ne pas respecter les logiques les plus évidentes.

2 – C'est donc aux citoyens de trancher

S'agissant de la droite (car je rappelle que, si l'on ne sait plus ce qu'est la gauche, on sait fort bien ce que sont les droites : nationaliste, crypto fasciste, autoritaire, ultra libérale, conservatrice, etc...), je tiens pour anachronique la prétention des « 1% » à vouloir diriger et dominer les « 99% », et je ne me soucie donc pas de son prochain avenir électoral.

S'agissant de la mouvance socio-écologique qui est apparue, elle est, certes, forte de sa nouveauté, de sa diversité et de sa fidélité au meilleur de son passé, mais sans une impulsion venue de ceux qui la soutiennent, elle ne peut qu'échouer. On ne peut se réclamer du peuple sans lui. Comment intervenir sans retomber dans les pratiques politiciennes dans et hors des partis ? Rien n'est possible sans débats, sans un travail intellectuel sérieux, sans participations via les réseaux sociaux à la recherche et non à l'appropriation de la vérité.

Plus passe le temps et plus l'intuition géniale de Simone Weil demande à être re-explorée : se libérer de la contrainte idéologique exercée par les partis politiques1. Il ne s'agit pas de penser tout seul, mais de penser par soi-même. La liberté de conscience suppose un engagement personnel2. Point de révolution politique effective sans la pensée libre. Il n'a jamais été aussi urgent de prendre en considération cette nécessité de sortir des schémas de pensée qui nous ont formatés. S'il n'y a plus de gauche, ce n'est pas parce qu'elle ne porte plus d'espérances, c'est parce qu'elle a été vidée de son contenu englouti, digéré, reconstitué et « re-présenté » par des courants de pensée au service conscient ou pas de notre ennemi le capital3.

C'est au-delà du court terme que nous devons nous placer. Les accélérations de l'histoire ne proviennent pas de nos empressements à changer, elles se produisent quand le fruit social est mûr. Autrement dit : tant mieux si la séquence historique des élections, en France, fournissait l'occasion d'ouvrir un espace politique tout neuf, mais gardons-nous de ne rechercher que des changements d'apparence. Ce qui pèsera ne se trouve pas au fond des urnes mais au fond de nous-mêmes.

1.  Simone Weil, Note sur la suppression des partis politiques, Nouvelle édition, chez Sillage, novembre 2016.  
« Les partis politiques ont pour modèle l’Église catholique. Ce sont de « petites églises profanes ». Ils se comportent vis à vis des dissidents comme l’Église se comportait vis à vis des hérétiques. Le parti réclame la soumission absolu au dogme et menace d’anathème ceux qui font entendre une voix discordante. Si donc l’esprit de parti s’inspire de l’Église catholique, c’est lui qui aujourd’hui « arrive à tout contaminer ». L’esprit partisan oblige à prendre position, oblige à penser « pour » ou « contre » , que ce soit dans le domaine de la science (pour ou contre Einstein), des arts (pour ou contre le cubisme / le surréalisme) et de la littérature (pour ou contre Maurras / Gide).  Cette maladie de la pensée, cette « lèpre » doit être combattue. La première étape de ce combat implique la suppression des partis politiques. »
2-    Geoffroy de Lagasnerie, Penser dans un monde mauvais, PUF, janvier 2017.
Voir notamment le chapitre 1 et la réflexion sur l'engagement, p. 11.
3-    Jean-Claude Michéa, Notre ennemi le capital, éditions Climats chez Flamarion, 2017

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