vendredi 27 janvier 2017

Avec ou sans primaires ? Note complémentaire (8)



Fin de la primaire. Début du secondaire.


Le point au 27 janvier 2017

par Jean-Pierre Dacheux

Nous voulons, au cours des mois qui viennent, analyser l'évolution de la situation politique au cours de la campagne électorale qui s'est ouverte. Chaque texte complémentaire, daté, numéroté et modifiable, s'ajoute aux précédents présentés sous le même titre ("Avec ou sans primaires"). Il est contredit, sans doute, parfois, par les événements qui s'écoulent. Fin mai 2017, nous regrouperons ces notes utiles pour effectuer cette activité politique chronologique, en un seul et même document.


1 – Fin de la primaire :
Le 29 janvier, ce serait une très grosse surprise si Vals l'emportait. La direction du PS va devoir enregistrer un résultat qu'elle ne souhaitait pas. Nous entrerons, dès le lendemain, dans une deuxième phase : il s'agit, pour les socio-libéraux, à commencer par Vals, de justifier leur ralliement prudent, lent, mais inéluctable... à Macron. Il s'agira, par ailleurs, pour les socio-écolos, de négocier avec Mélenchon et Jadot (D'aucuns vont même jusqu'à proposer de les unir au moyen d'une nouvelle... primaire !) Qu'est-ce qui peut troubler le jeu dans cette campagne présidentielle, nouvelle mais officielle, où tous les protagonistes vont devoir, cette fois, sortir du bois ?

2 - Rien n'est plus acquis :
• Le Front national ne se déploie plus, à présent, dans un paysage déserté ; il va devoir se découvrir davantage et sortir de son silence. Il a cessé d'être gagnant à tout coup.
• Les « Républicains » rencontrent, eux, deux surprises. D'une part, le programme de Fillon, qui a enthousiasmé ses électeurs, est trop à droite pour garantir le succès qui lui semblait promis (une élection présidentielle se gagne au centre ou en gagnant les voix dites « modérées) » . D'autre part, l'emploi fictif de Pénélope Fillon, révélé par le Canard enchainé, s'il s’avérait effectif, pourrait nuire à l'image de droiture de son époux, François Fillon et à son image politique tout court !
• Macron, dès qu'il va s'agir de préciser le contenu de son programme, (qui n'est ni à gauche, ni à droite, dit-il) va rencontrer l'hostilité des centristes et il lui faudra, en outre, accepter, en les récusant, (opération bien délicate!), les soutiens des caciques d'un PS en ruines, à commencer, peut-être, par celui du sortant décrié Hollande et... ce serait le baiser de la mort !
• La direction du PS, va chercher à sauver la mise du parti, quitte à renoncer à tout espoir de victoire en mai prochain. Il va lui falloir, pour cela, choisir quelle « gauche irréconciliable » lui est, in fine supportable ! C'est la quadrature du cercle ! L'habileté des discours et la souplesse des échines n'y suffiront pas. Un PS va mourir et ce sera, probablement, celui qu'à chaque élection les citoyens ont chassé de partout, ou presque, ces dernières années.
• Ce qui reste du centrisme est également en péril. Seul François Bayrou pourrait en préserver l'image mais va-t-il se lancer dans une partie aussi délicate et complexe alors que les positions, sur l'échiquier politique, semblent déjà prises ?
• La « gauche de gauche », elle-même, est dans l'embarras. Pour bien figurer, dès le premier tour du scrutin, voire pour atteindre la seconde place seule à même de permettre de concourir pour « la gagne », il lui faut, impérativement, rapprocher trois sensibilités encore éloignées : celle du plus actif, parti de loin, expérimenté, brillant, traçant son sillon : Jean-Luc Mélenchon, mais aussi celle d'un candidat compétent, ayant remporté sa primaire écologiste : Yannick Jadot, enfin, à présent, celle de celui qui a bouleversé la donne et qui est susceptible de redonner des couleurs de gauche au PS en cours d'implosion : Benoît Hamon.
• Quant à l'ultra-gauche, constituée par des partis groupusculaires autant que crépusculaires (LO, NPA, POI, entre autres...) si elle présente des candidats pour exister encore et témoigner, non seulement elle ne pèsera guère électoralement, mais elle ne passera aucun accord qui ferait disparaître le peu de visibilité qui lui reste.

3 - Peut-on encore parler de gauche ?
À mon sens : non. D'abord, parce que nombre de ceux qui s'en réclament et pas seulement Manuel Vals, ne sont plus de cette gauche historique qui s'était identifiée, depuis de nombreuses décennies, à l'anticapitalisme. Le mot « gauche » a été vidé de son sens. Quand la gauche était déterminée par la place dans l'hémicycle des députés, la gauche était constituée d'élus porteurs de divers noms : progressistes, communistes, socialistes, radicaux, tous reconnaissables à leur refus de la domination du capital sur le travail. Même si certains s'affirmaient révolutionnaires et d'autres seulement réformistes, le but ultime était de libérer les travailleurs de la domination des patrons. Cette source idéologique a été tarie. De nos jours, le « camp du travail » a été bouleversé par le recul inexorable de l'emploi. Même s'il devait se recréer des emplois, et il s'en créera, il y aura plus de disparitions d'emplois que de créations, comme on le constate partout, ne fut ce parce que les emplois se précarisent et la durée du temps de travail ne cesse de se contracter. Enfin l'idéologie économiciste qui lie étroitement emplois et croissance est contredite par les faits. La critique écologique du culte de la croissance s'est trouvée avérée. La « gauche » productiviste et croissantiste se meurt. Le catéchisme du plein emploi est incrédible. Le travail n'est plus dépendant de l'emploi. Il y a de plus en plus besoin de travail et de moins en moins d'emplois. Il faut changer de vocabulaire et sortir des a priori bousculés par l'évolution du monde.
Le ni gauche ni droite de Macron, tout comme la gauche de droite de Valls ne dissimulent pas que nos critères et paradigmes sont à repenser, à redéfinir, à réexprimer dans une langue nouvelle. Le champ politique n'est pas partagé entre droite et gauche. Il s'étend sur l'ensemble du pays et concerne la totalité de ceux qui y vivent. Être universel sans se laisser tenter par le totalitarisme, tel est l'enjeu. Il faut maintenir la diversité politique sans la confiner dans des partis le plus souvent obsolètes.
Plus les citoyens s'intéresseront à la pratique démocratique, plus le dépassement du clivage entre les possédants et les « possédés » sera possible.

La victoire probable de Benoît Hamon n'a d'intérêt que parce qu'une partie de son discours échappe à la bien-pensance et au politiquement correct. Cela n'oblige en rien à se rallier à lui. Cela crée pourtant « l'ardente obligation » de contribuer à tourner une page, celle où la politique était soumise aux fausses évidences d'une économie justifiant les inégalités.

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