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mardi 22 mars 2011

Enfin le monde arabe vint...

Ce qui se passe au Moyen Orient, dans le Machrek et le Maghreb nous dépasse. Nous ne disposons pas de toutes les clés nécessaires pour comprendre cette révolution qui, née en Tunisie, étendue à l'Égypte, n'en finit pas de diffuser au Nord de l'Afrique et sur l'autre rive de la mer Rouge.


Nous avons constaté, avec stupéfaction, que naissait une volonté populaire infrangible, s'exprimant par la bouche et la présence d'hommes et de femmes qui, plus que le bien être, recherchent le droit à l'expression libre et l'épanouissement d'une démocratie spécifique ne se limitant pas au renversement des dictateurs.

Ainsi, la démocratie n'est-elle une revendication des seules sociétés occidentales. Ainsi a été déchirée la caricature de musulmans soumis à un intégrisme religieux dont les dictatures Ben Ali et Moubarak auraient pu nous protéger ! Ainsi la fierté de peuples se découvrant capables de faire l'histoire a-t-elle explosé dans la joie et l'unité.



Des observateurs politiques et des historiens considèrent déjà que 2011, comme 1989, voire 1789, restera une date à laquelle on se référera, dans l'avenir. Le monde arabe qui fut le vecteur de la civilisation, il y a de nombreux siècles, sort-il de sa nuit ou est-ce un nouveau monde arabe qui non pas renaît, mais s'éveille ?

Tout donne à penser que ce mouvement puissant va s'étendre sur la plupart des États arabes : du Maroc à l'Algérie, du Yémen à la Syrie en passant par Bahrein...

Bien entendu, les profiteurs du pétrole, (producteurs, entreprises exploitantes et grands États consommateurs), ne sauraient voir d'un bon œil ces bouleversements qui mettent en cause des stabilités jusque là économiquement satisfaisantes ! Les pouvoirs locaux autoritaires et violents, les grandes puissances et les compagnies pétrolières ont les moyens de réduire les ambitions de ces nouveaux démocrates qui osent exiger le partage du pouvoir et de la richesse.

Comme on le voit déjà, en Lybie, dont le colonel et guide suprême Mouammar Kadhafi dispose, avec la manne de l'or noir, de réserves monétaires inépuisables, il n'est pas si simple de faire chuter un dictateur chevronné, fut-il à l'origine d'attentats hier condamnés et à présents... absous ! Dans la péninsule arabique, le régime saoudien, qui a beau être le fournisseur des fonds servant à multiplier les mosquées intégristes, fait l'objet de la sollicitude des États, ceux-là même qui, par ailleurs, s'épuisent à lutter contre Al Kaïda.

Les peuples arabes, juste de l'autre côté de Mare Nostrum, constituent, à présent, un pôle démocratique dont nous sommes solidaires. Saurons-nous leur apporter un soutien loyal ? C'est difficile à croire ! Le retournement du Gouvernement français qui, en quelques semaines, est passé de la plus triviale connivence avec les dictateurs à une position agressive très ambigüe, ne rassurera que les naïfs. Les Lybiens qui veulent se débarrasser de leur potentat n'ont pas besoin, d'abord, de nos Rafales, même s'ils faut protéger les populations menacées, ils ont, bien davantage, besoin de liberté et par rapport à un dirigeant meurtrier et par rapport à la domination occidentale capitaliste.



Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran

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