samedi 25 mai 2013

Il n'y a pas de « Gens d'en bas » …. il y a des êtres humains !




Encore récemment, le député Noël Mamère déclarait : «  Pourquoi tant de concessions à ceux d’en haut ? Pourquoi si peu de considérations pour ceux d’en bas ? »


Aujourd'hui, notre propos n'est pas de faire l'analyse de la politique du gouvernement, mais de revenir sur l'expression « gens d'en bas » et de tenter de lui tordre définitivement le cou.

Nous avons horreur de cette expression condescendante, méprisante et arrogante, survivance de l'ancien régime et qui ne peut plus avoir cours dans une démocratie au 21ème siècle.

Il est bien difficile de définir avec exactitude le mot « gens » qui, justement, ne définit rien, qui ne respecte aucune règle grammaticale1 et se prononce souvent familièrement voir avec dédain. Le Petit Robert définit les petites gens comme des gens à revenus modestes.

Pour définir les catégories socio-professionnelles, l’Observatoire des inégalités2 reprend le découpage suivant (identique à celui utilisé par le Crédoc3).
  • les 30% les plus démunis composent les catégories « modestes »,
  • les 20% les plus riches composent les catégories « aisées »,
  • les classes « moyennes » se situent entre les 30% les plus démunies et le 20% les mieux rémunérées, elles sont 50% de la population.

Si l'on en croit, Jean-Pierre Raffarin, qui prétend être l'inventeur de cette formule, un tiers de la population Française serait les « gens d'en bas ». Des gens de rien qui ont l'impression de n'exister pour personne. C'est vrai, que ces 20 millions de Français peuvent se poser la question, tant les politiques ont une vision idéologique de leur condition, en amalgamant la précarité et la fraude, la fainéantise et le chômage, en comparant l'assistanat au cancer de la société4, en partant du postulat que si les pauvres sont dans cette situation c'est de leur faute et en niant que la paupérisation d'une partie toujours plus importante de la société française est d'ordre conjoncturelle mais surtout structurelle.

Tout d'abord, il n'y a pas de quoi être fier de ces propos, ils révèlent une prétention, une suffisance et une condescendance indigne d'un homme politique contemporain. Ils laissent à penser que l'ancien premier ministre a des regrets de la monarchie absolue ou qu'il a oublié que nos valeureux ancêtres ont, la nuit du 4 août 1789, aboli les privilèges et ont défini les droits des citoyens, le 24 juin 1793, dans l'article 2 de la Constitution de la 1ère république « Ces droits sont l'égalité, la liberté, la sûreté, la propriété ».

Ensuite, Jean-Pierre Raffarin, quoiqu'il prétende, n'a pas la propriété de cette expression populiste qu'il a, comme récidiviste, reprise avant l'élection présidentielle de 2012 : « DSK est quand même le représentant de la France d'en haut et c'est difficile de séduire la France d'en bas quand on est dans cette situation ».
 
C'est Honoré de Balzac qui a imaginé cette « France d'en bas » dans la Comédie Humaine : «  … Ainsi, l'Houmeau, malgré son active et croissante puissance, ne fut qu'une annexe d'Angoulême. En haut, la noblesse et le pouvoir, en bas le commerce et l'argent. »
 
Après J.P. Raffarin, ­Jacques Chirac, Dominique de Villepin, Jean-Marie Le Pen, mais aussi Arlette Laguiller, Olivier Besancenot et Noël Mamère ont repris à leur compte cette déplaisante expression. 
 
Il serait beaucoup plus respectable et méritant, pour tous ces femmes et hommes politiques, d'attacher leurs noms à des lois permettant le recul de la misère et de la pauvreté dans notre pays plutôt que de trier les Français comme on sépare le bon grain de l'ivraie.


Victor Hugo dans un discours resté célèbre et prononcé à l’Assemblée Nationale le 9 juillet 1849, disait :
«  … je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu'on peut détruire la  misère. Remarquez-le bien, Messieurs, je ne dis pas diminuer,  amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. La misère est une maladie du  corps social comme la lèpre était une maladie du corps humain ; la misère peut disparaître  comme la lèpre a disparu. Détruire la misère ! Oui, cela est possible !  Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en  pareille matière, tant que le possible n'est pas le fait, le devoir n'est pas rempli. »

Depuis 164 ans et cette allocution, beaucoup de progrès ont été réalisés, pourtant la misère et la pauvreté n'ont pas été détruites comme le voulait Victor Hugo, pire, les crises inversent la tendance et toujours plus de personnes sombrent dans la précarité. 
 
Il ne s'agit, pourtant, que d'une affaire de partage, de solidarité, de courage et de volonté politique.



3 Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de vie.

4 Laurent Wauquiez, ministre des Affaires européennes s'exprimant en sa qualité de chef de la Droite sociale.


Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux

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