Individuellement, nous sommes généralement conformistes et conservateurs, pourtant, la collectivité humaine est toujours en mouvement et les droits de l'homme, qui en sont l'un des piliers, ne sont pas gravés dans le marbre, mais en perpétuelle mutation.
Ils
sont aussi vieux que l'homme. Ils sont une évolution du vivre
ensemble et ont cheminé à côté de l'homme tout au long de son
histoire. Ils n'ont pas pris naissance en France à la fin du 18ème
siècle, comme notre esprit cocardier veut le laisser croire, mais bien avant
notre ère, à Babylone, chez les philosophes grecs, et ensuite en
Afrique, au Mali, en Inde, en Angleterre et ailleurs.
Ils
sont une idée fixe des hommes de bonne volonté.
En
France, en 1789, après quatre cent ans de domination totalitaire de
la monarchie absolue, nos grands parents firent, quelques années
après les Etats Unis d'Amérique, tomber le pouvoir royal et, à
partir de la synthèse des idées des philosophes du siècle des
lumières, ils rédigèrent une Déclaration des Droits de l'Homme et
du Citoyen, creuset des droits de l'homme actuels.
Néanmoins,
cette révolution fut une passation de pouvoir entre la dictature
royale et la bourgeoisie qui domine toujours actuellement, et, pendant
près d'une centaine d'années, la République a beaucoup bégayé.
A part, quelques soubresauts, en 1830, en 1848, le peuple n'a
vraiment fait sa révolution qu'au moment de la commune en 1871,
insurrection réduite immédiatement de manière sanglante par la
bourgeoisie.
Il
fallut attendre, les folies meurtrières du 20ème siècle,
la fin du second conflit mondial et des millions de morts, avant qu'une poignée d'hommes décident, enfin, de coucher sur le
papier une déclaration universelle Droits de l'Homme.
Une
des preuves de ce mouvement, c'est que cette Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, socle moderne des droits
de l'homme, a été, au cours des années, complétée par des textes
précisant la nature de certains droits ou familles de droits -
droits de première génération, de deuxième, de troisième voire
de quatrième génération - mais aussi des droits spécifiques
attachés à des groupes humains, à une région, à un continent -
Convention Internationale
des Droits de l'Enfant de 1989, Convention
Européenne des Droits de l'Homme
- d'autres traités internationaux et de
nouveaux concepts en gestation.
Même
si l'universalité des droits est un axiome en ce qui concerne
l'article premier, clef de voûte des droits de l'Homme, des
différences importantes existent entre les peuples.
Sans
aller très loin, la notion de vie privée - un droit que nos
concitoyens considèrent fondamental - a-t-elle la même valeur dans
le nord et le sud de l'Europe, chez les Européens et les
Anglo-Saxons, et ne parlons pas de l'Afrique, des Indes ou de la
Chine.
En
ce qui concerne la justice et la présomption d'innocence les
différences d'approches, là aussi, sont importantes. Le concept du
droit à l'image, particulièrement malmené dans le monde de la
surveillance, des réseaux, de la télévision et de l'Internet
est-il le même partout ?
D'autres
différences d'appréciations, quelquefois importantes, pourraient
être soulignées.
De
plus, des droits pourtant nécessaires au bon fonctionnement d'une
démocratie sont omis :
-
La résistance à l'oppression définie par la déclaration de 1793
dans les articles suivants :
Article
33 : La résistance à l’oppression est la conséquence des autres
droits de l’homme.
Article
34 : Il y a oppression contre le corps social, lorsqu’un seul de
ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre
lorsque le corps social est opprimé.
Article
35 : Quand le gouvernement viole les droits du peuple,
l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du
peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des
devoirs.
-
Le droit à un revenu minimum universel ou à un revenu
permanent (selon la théorie de Milton Friedman)
Et
les bouleversements les plus importants sont à attendre avec les
nouvelles technologies, car une révolution est en marche dont nous
ne mesurons pas les conséquences, surtout dans notre société
libérale où la finance et l'industrie déterminent les règles du
jeu pour rester maîtres de la croissance et du profit.
La
« grande convergence » NBIC (Nanotechnologie,
Biotechnologie, Intelligence artificielle, Sciences Cognitives) va
bouleverser notre relation au monde, elle créera de nouvelles
contraintes qu'il faudra combattre par une évolution des droits sous
peine de totalitarisme.
Quelques
exemples :
La
possibilité, que l'on commence à entrevoir, de commander des
appareils (fauteuils, prothèses, mais aussi ... armements)
directement depuis le cerveau pour optimiser le fonctionnement,
l'efficacité des individus ou pour compenser leur déclin -
« l'homme symbiotique » - l'« humain augmenté »
techniquement !
On
pourra choisir le sexe de ses descendants !
On
pourra donner naissance à des enfants pour soigner ses autres
enfants déficients ou malades !
On
s'apprête à légaliser l'euthanasie !
Et
que dire du développement et de la multiplication des contraintes de
surveillance par la miniaturisation, voire l'invisibilité, des
systèmes ! Sans parler des nombreuses évolutions technologiques dont nous
n'avons encore aucune idée ….
Ces
concepts peuvent s'avérer séduisants, mais lorsqu'on commence à
modifier la nature humaine, il n’existe plus de projet universel,
par conséquent plus d’éthique universelle.
Il
est fort
probable que les découvertes NBIC vont transformer considérablement
l’homme, la société et l’environnement.
D'importantes
divergences sur l'évolution risquent de voir le jour et le vivre
ensemble deviendra impossible.
Ni
l’obligation, par décision autoritaire ou par pression économique,
de se transformer, ni la volonté d’interdire toute tentative de
transformation de l'humain ne peuvent être satisfaisantes.
Alors,
où se trouvera la vérité ?
Les
Droits de l'Homme risquent d'être singulièrement malmenés par
toutes ces évolutions.
L’espoir
réside dans de nouvelles formes de pensée, mais aussi par
l'exigence drastique d'imposer des devoirs, ... des devoirs éthiques aux
entreprises et aux financiers.
Jean-Claude VITRAN
Parler des droits est devenu banal et abusif. Banal car, de l'enfant qui clame, dans sa cour d'école "tu n'as pas le droit", à l'avocat qui, s'il le faut, invoque ou invente des droits pour défendre son client mal parti, le droit peut servir à avoir raison par tous les moyens. Abusif, par ce qu'à tout vouloir mettre dans les lois et règlements, on déshumanise la société où règne, alors, des droits qui ne sont plus ceux de l'homme !
Il est grand temps de réfléchir à une réforme de nos approches du droit lequel, au lieu d'ouvrir des possibilités, les bloque. Les dogmes étaient et restent des droits imposés et non des droits aimés. Il faut changer la philosophie du droit marquée par l'ethnocentrisme et la judiciarisation.
Jean-Claude Vitran attire notre attention sur l'impuissance du droit et la manipulation du droit, afin de laisser libre cours à ce que d'aucuns nomment le "transhumanisme", qui n'est qu'une hyperviolence scientiste que veulent nous "vendre" les marchands d'illusion : un modèle de superman qui ferait de nous des machines pensantes. C'est maintenant qu'il faut tirer la sonnette d'alarme. Demain, il sera trop tard. Je m'associe à cet appel au bon sens et à la vigilance.
Jean-Pierre DACHEUX
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