mardi 26 avril 2011

26 avril 1986 - 26 avril 2011 : la fin du mensonge


À Tchernobyl, d'innombrables vies ont été sacrifiées pour que nous vivions. Telle est la vérité qui, lentement, émerge. Il aura donc fallu un quart de siècle, et la nouvelle catastrophe nucléaire de Fukushima, pour que nous soit connue l'ampleur du drame de Tchernobyl ?

Avec les "liquidateurs" (ces jeunes gens envoyés, par centaines de milliers, sur le champ de bataille, face à "l'ennemi invisible"), trois personnages émergent : un homme politique écarté prématurément de l'histoire (Mikhaïl Gorbatchev), un savant emprisonné cinq ans, pour avoir révélé ce qu'il avait découvert (Youri Bandajevski) et un
ingénieur physico-chimiste, qui s'est suicidé le... 26 avril 1988 (Valeri Legassov) après n'avoir pu convaincre l'AIEA de ce qu'il avait constaté.

Une des médailles remises aux liquidateurs : le symbole représente une goutte de sang traversée par les rayonnements alpha, bêta et gamma.

38 morts devait diagnostiquer l'AIEA, qui, pour cela, aurait dû être dissoute et ses "responsables" traduits devant les tribunaux internationaux !

(Un rapport de l'AIEA, établi en 2005, recense près de 30 morts par syndrome d'irradiation aiguë directement attribuables à l'accident, et estime que le nombre de morts supplémentaires par cancer dans les populations les plus exposées aux rayonnements (estimé à 4 000 morts d'après les modèles de radioprotection) est trop faible par rapport à la mortalité naturelle (100 000 morts, soit 4 % d'accroissement) pour être détectable par les outils épidémiologiques disponibles.)



Valeri Legassov

Gorbatchev, qui envoya des centaines de milliers d'hommes pour "liquider" le désastre est-il un monstre ou le sauveur de l'humanité ? Selon lui, c'est Tchernobyl qui ruina l'URSS et mis fin à la perestroïka, mais, surtout, agir autrement, aurait été un crime contre l'espèce humaine tout entière.


Mikhaïl Gorbatchev

Le cynisme d'acier des défenseurs de l'industrie nucléaire, avec lequel on laissa les peuples du monde dans l'ignorance de la gravité de l'événement, a réussi à faire traverser 25 ans de mensonge. Un cynisme à rapprocher de la satisfaction des capitalistes qui voyaient s'effondrer, à la fois, l'opposition politique soviétique et, mieux encore, toute possibilité de voir régénérer, par la glasnost (la transparence) de Gorbatchev, un socialisme monstrueux, encore aux mains des gérontes d'un Parti à bout de souffle.

En Biélorussie, si proche de Tchernobyl, il fut interdit d'affirmer que les effets de la catastrophe, sur le vivant, étaient et seraient redoutables. Pour n'avoir pas obéi le professeur Bandajevsi fut incarcéré ! Ses travaux étaient sans équivoque : des monstres allaient naître.

Youri Bandajevsky, Genève, 2009.
Youri Bandajevsky
http://fr.wikipedia.org/wiki/Youri_Bandajevski

Ce qui, aujourd'hui est révoltant, incompréhensible, désespérant si l'on considère l'humanité, dans son devenir comme dans son passé, c'est que l'énergie nucléaire soit encore considérée, par des chercheurs et des responsables politiques, comme une industrie incontournable dont nous ne pourrions nous passer ! Gorbatchev n'hésite pas, lui, à présenter les armes nucléaires et les centrales nucléaires comme des menaces que les peuples ne peuvent plus se permettre de conserver. Mais que pèse encore celui qui osa dénoncer le nationalisme et l'irresponsabilité d'un régime corrompu, et qui, pour cela, tomba sous un coup d'État ?

L'éclatement de l'URSS n'aura pas permis de traiter les suites de Tchernobyl de façon unitaire : l'Ukraine, la Biélorussie et la Russie, états désormais indépendants, évitent de regarder en faceune situation qui n'est pas réglée ! On manque d'argent (!) pour reconstruire un sarcophage au-dessus des ruines encore radioactives...


Tchernobyl au carrefour de Belarus, de la Russie et de l'Ukraine

La question nucléaire serait restée cachée derrière les murs des centrales, dont nulle n'est à l'abri de l'accident fatal, sans Fukushima, dont, hélas, les conséquences seront plus graves que celles de Tchernobyl (à cause de l'importance des populations concernées et, surtout, parce que l'on ne sait encore, à ce jour, comment mettre fin à cette catastrophe durable dont les effets vont se faire sentir sur la région plusieurs dizaines ou... centaines d'années).

Sortir du nucléaire n'est plus une nécessité, c'est une urgence ! Pour débarrasser la planète de ce qui la menace partout, d'ici un demi-siècle, il faut commencer tout de suite, avec l'espoir que des travaux scientifiques fassent accélérer le cours des démantèlements, n'en déplaise à AREVA, EDF et autres entreprises gérées par des nucléocrates.

Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran


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