Le
Buen Vivir, véritable philosophie de vie, est un concept alternatif au
développement qui se répand dans le monde entier et trouve un écho de
plus en plus large au sein des cercles de réflexion. Edgar Morin y voit
le chemin pour éviter le chaos.
« Je me suis toujours fait une certaine idée de la France » a dit et écrit Charles De Gaulle. Sa principale erreur aura été de s'identifier à cette idée de la France au point de promouvoir des institutions où le Chef de l'État n'était plus le représentant des Français mais leur incarnation.
« Je me suis toujours fait une certaine idée de la France » a dit et écrit Charles De Gaulle. Sa principale erreur aura été de s'identifier à cette idée de la France au point de promouvoir des institutions où le Chef de l'État n'était plus le représentant des Français mais leur incarnation.
Quand l'un des porte-parole du
gouvernement français monarco-républicain dit : « la
France », il impose aux Français de penser que la politique
qu'il exécute est celle qu'acceptent et soutiennent tous les
Français. C'est manifestement faux ! On peut se faire d'autre
idées de la France !
Cette conception de la France
« éternelle », l'État-nation auquel ses habitants sont
prêts à sacrifier leur vie – ce qui s'est passé mainte fois aux
XIXe et XXe siècle – est un mythe puissant, qui a servi à
construire une unité nationale, voire nationaliste, justifiant
l'injustifiable, depuis l'Empire napoléonien, nocif pour l'Europe,
funeste pour les Français, jusqu'à l'empire colonial et
néocolonial, ravageur pour l'Afrique, taillant dans les territoires
planétaires des espaces soumis à la puissance française...
Nous sommes loin de « ma
France », celle de Jean Ferrat, celle d'une autre approche de
l'histoire, celle des travailleurs, autrement dit celle des salariés,
des exploités, des petits-et-sans-grade, celle des « sans »,
ces oubliés qui, pas à pas, sont, pourtant, les acteurs, les
transformateurs, les bâtisseurs de la Cité humaine, à dimension
planétaire.
Car c'en est fini de la France
imposant ses lois et ses mœurs par la force. Elle n'est plus, avec
la Grande-Bretagne, l'exemple du modèle occidental. Elle n'est plus
même « la France des droits de l'homme ». Elle est une
petite partie de la population humaine qui ne peut être pensée,
désormais, qu'en milliards de personnes unies dans un destin commun
où prime l'urgence de maintenir une habitabilité après des siècles
d'exploitation sans retenue de la faune, de la flore, des minéraux
et des richesses halieutiques.
L'action de l'espèce humaine sur
Gaïa, la Terre, a ruiné et ruine encore tous les équilibres
écologiques indispensables à la vie en communauté. Le concept
biblique, « allez et dominez la Terre », relayé par la
pensée de René Descartes, le grand philosophe dualiste français,
qui sépara l'homme et la nature, a servi de fondement idéologique à
la prise de possession des richesses planétaires, sans égard pour
les destructions irréversibles engendrées. L'exploitation
capitaliste n'aura été et n'est encore que la continuation de ces
ravages, gaspillages et autres dilapidations des biens terrestres qui
avait commencé avec « les Grandes Découvertes » et dont
on ne veut pas reconnaître qu'ils sont inconcevables dans un monde
limité.
Les bouleversements climatiques
sont, à la fois, les conséquences et l'avertissement que nous
adresse la Terre-mère, « la pachamama », comme il est
dit, en Amérique du sud, dans la cosmogonie andine.
La France est, certes, capable de
ce buen vivir qui conduit à
la vie sobre. Mais cela conduit aussi à rompre avec des conceptions
de la France incompatibles avec une hospitalité partagée, sur la
Terre.
Et
ces France qui ne sont pas de notre temps, il n'est pas si difficile
de les repérer et de les exclure de notre de notre pensée
politique : la France prédatrice du plus et du mieux que les
autres qui exploite, sans prudence, en son sein et ailleurs, des
richesses qui ne sont pas sa propriété, la France de la
surconsommation, la France du spectacle devenu un objet de vente, la
France du sport professionnel de compétition, vite transformé en
sport-entreprises, la France de la bombe atomique, des centrales et
des déchets nucléaires, la France de l'élitisme, la France qui
poursuit le terrorisme en en ignorant les véritables causes, la
France productrice et faisant commerce d'armes monstrueuses, la
France du néocolonialisme africain qui veut porter le feu (ou l'a
déjà porté : en Lybie, au Mali, en Syrie, en Irak, en
République centrafricaine), la France complice sans vergogne de
Moubarak ou de Khadafi, la France qui ne veut se voir telle qu'elle
est : un État que ni sa démographie, ni son poids économique
n'autorisent à dominer directement ou indirectement aucune partie du
monde hors de l'hexagone.
La
France du Buen Vivir, ou du Vivre bien
est la France qui renonce à distinguer son sort de celui de tous les
autres pays du monde et qui, au contraire, fait de l'hospitalité, de
la solidarité et du partage l'expression même de sa devise
républicaine, donnant ainsi, et enfin, un sens concret et politique
à la fraternité.
Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
N'hésitez pas à poster un commentaire.