dimanche 28 avril 2013

Lamentable politique ou politique de lamentables !


Les événements survenus il y a quelques nuits à l'Assemblée Nationale sont pitoyables et nous interrogent sur le fait de savoir si nos députés se rendent compte de ce qu'ils représentent.

Voir les représentants du peuple d'une démocratie qui se dit la « patrie des droits de l'homme » s'admonester dans l'hémicycle a quelque chose de minable que les citoyens ne peuvent tolérer.

Voir vociférer comme le dernier des soudards, la bave à la commissure des lèvres, le visage déformé par la haine, le responsable d'un groupe parlementaire, ancien ministre de surcroit, a de quoi nous alarmer, plus encore, nous angoisser.

L'Assemblée nationale ne serait donc plus ce lieu respectable où l'on débat de l'avenir de notre pays et de ses habitants dans l'écoute et le respect mutuel, c'est devenu, comme Wagram, une salle de boxe où l'on fait le coup de poing pour faire entendre son point de vue.
Quel exemple pour notre jeunesse à qui l'on répète, à l'envi, que la violence, arme des faibles, est indigne.

Les députés oublieraient-ils qu'ils sont nos représentants élus au suffrage direct et que ce privilège ne leur donne pas, au contraire, le droit de se conduire comme des rustres, honte de notre République.

Doit-on s'attendre à un coup de force, si, d'aventure, les projets de lois n'allaient pas dans le sens attendu car l'attitude belliqueuse de ces castagneurs « antiparlementaristes », qui contestent, jusque dans la rue la légitimité de l'Assemblée dont ils sont membres, est inquiétante.
Elle remet en cause le fonctionnement démocratique de la République.
On a même vu un député « écharpé » des Côtes d'Armor1 s'en prendre dans une échauffourée au calot d'un CRS et on entend ces responsables de la droite dite "républicaine" clamer : « que la rue a forcément raison et doit l’emporter sur la représentation nationale, que le Parlement n’est nullement représentatif du pays réel, que les élections au scrutin majoritaire ne lui confèrent aucune légitimité. »
Ces propos dangereux pour la démocratie et ces agissements sont indignes de parlementaires responsables, ce ne sont là que des pratiques de voyous.

Pour faire bonne mesure, il faut, aussi, ajouter, ce ministre socialiste qui, avec un aplomb confondant ment pendant plusieurs semaines à la France entière et plus particulièrement à ses pairs du Parlement.

Nous devons immédiatement rappeler avec vigueur à nos élus que c'est seulement grâce à notre volonté qu'ils occupent ces fauteuils et que nous leur avons confier cette tâche, seulement, pour qu'ils travaillent sereinement et avec compétence dans le respect des valeurs de la République.

Nous, électeurs, nous devrions réfléchir à la possibilité de sanctionner, voir révoquer ceux qui déshonorent la fonction par leur attitude et qui mettent en cause la légitimité populaire.

1 http://www.huffingtonpost.fr/2013/04/20/video-mariage-gay-depute-ump-marc-le-fur-gendarme_n_3123461.html?utm_hp_ref=france

Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux

mercredi 3 avril 2013

Cahuzac ou le révélateur de l'impasse politique social-libérale

"La crise de la représentation politique est entrée dans sa phase terminale. C’est l’état d’alerte pour les démocraties". Ainsi peut-on lire, sous la plume de Christian Salmon (1), cette dernière phrase de son article intitulé : "Démocratie état d'alerte" et paru dans Médiapart, le 31 mars 2013.

Il n'y a pas lieu de se réjouir de voir anéantis les forts-en-gueule, les bravaches et les surdoués du discours mensonger. Jérôme Cahuzac nous a fait choir, avec lui, dans le gouffre d'une politique sans nom, sans principe et sans objectif, et nous n'en sortirons pas indemnes, si nous en sortons.

Car de quoi s'agit-il ? 

Rappelons-nous la sortie de l'ex-ministre du budget, sur Antenne 2, face à Jean-Luc Mélenchon : « La lutte des classes, ça résume notre réelle divergence. Vous y croyez toujours, je n’y ai jamais cru"... "Jamais ?" avait relancé Mélenchon. "Jamais" avait rétorqué Cahuzac... Tout était dit : Porte-parole du gouvernement, ce jour-là, il reconnaissait que son socialisme n'avait rien à voir avec celui que l'histoire avait mis en valeur : la solidarité indéfectible avec les petits, les sans grades, les sacrifiés du système capitaliste. Il reniait Jaurès, Blum et même Jospin. Il faisait passer le PS à droite.

Considérons l'état de ce compte en Suisse ayant échappé à tout contrôle fiscal ! Jérôme Cahuzac n'a accumulé et mis à l'abri "que" 600 000 euros. Là n'est pas son pire délit. Il est des PDG ou de simples joueurs de foot-ball qui s'offrent, aujourd'hui, des rémunérations bien plus importantes encore. Non, ce qui hallucine c'est que, pour la première fois dans l'histoire de France, le ministre en charge du budget de la nation avoue qu'il a fraudé le fisc. Toute confiance s'en trouve abolie. Tout se passe comme si mon banquier était le cambrioleur qui vient de se faire prendre dans ma maison.


Pensons à tout ce qui s'abat aujourd'hui sur les citoyens modestes. Celui qui influençait la politique financière du gouvernement est le même qui lâche, à la face des chômeurs, des petits retraités, des sans abris, des sans revenus et des sans espoirs, sur son blog (!), quelque chose comme : "oui, c'est bien moi qui ai menti à tout le monde, je m'enrichissais dans l'ombre et j'en demande pardon au chef de l'État ainsi qu'à tous ceux qui m'ont mandaté". Trop facile! Jérôme Cahuzac a plus que menti : il a trahi après s'être montré méprisant, cynique, fort de sa supériorité, voulant trainer ses contradicteurs devant les tribunaux. C'est un désastre absolu qui n'a qu'un équivalent : celui qui emporta DSK dont Cahuzac fut proche. Mais que voient et que disent, au sein du PS, ceux qui, depuis des années ont constaté des dérives multiples et n'ont pas osé les condamner ? 

Reste à tirer des enseignements de cette série de manifestations de malhonnêteté au sein de la classe politique. Certains sont déjà condamnés, d'autres mis en examen, et quelques-uns "blanchis" faute de preuves. La justice, qui n'est pas elle-même toujours exempte d'impartialité, compte, en son sein, des magistrats courageux et, de même, dans la presse, quand des journalistes d'investigation font leur métier non sans risques, la vérité sort du puits, choquante dans sa nudité et pourtant révélatrice de l'état réel de notre société.

Il est temps que cesse le scandale du cumul des mandats qui incite à thésauriser argent et pouvoirs.
Que l'on sache pourquoi plus il est de richesses produites moins il est de fonds disponibles.
Que l'on sache pourquoi l'austérité est promise aux modestes et le luxe aux nantis.
Que l'on sache pourquoi il n'est plus ni droite ni gauche si tous les élus font la même politique.
Que l'on sache comment accèdent au pouvoir d'État des prédateurs sans scrupule.
Que l'on sache pourquoi est blessée à mort la démocratie quand aucune élection ne change rien?
Que l'on sache pourquoi on en revient à faire le lit des démagogues totalitaires ?

De même qu'il faut s'indigner pour mieux se révolter contre l'injustice, il faut, à présent, se scandaliser pour contraindre les décideurs à décider non ce que commandent "les marchés" mais ce qu'exigent les peuples : vivre en paix dans le partage et l'équilibre sans s'en remettre à ceux qui n'ont d'autre intérêt que le leur.

(1)  Chercheur au CNRS, auteur, notamment, de Storytelling : La machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits (2007, La Découverte).

Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran