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jeudi 15 mars 2012

L'écologie incompatible avec la Vème République ?


L’idée écologique ne date pas d’aujourd’hui, ni même du siècle dernier. "Dès le XVIIe siècle sont notées les premières conséquences de l’exploitation incontrôlée des ressources des territoires annexés par les puissances européennes. La déforestation, l’érosion des sols, l’exploitation des mines, l’extermination des animaux mettent alors en alerte la communauté de scientifiques chargée par les pouvoirs coloniaux d’inventorier les richesses de la faune et de la flore... Sous discipline de la biologie, la science écologique se trouve officiellement un nom, en 1866, grâce au naturaliste darwinien Ernst Haeckel. Forgé à partir des mots grecs "oikos" (maison ou habitat) et "logos" (étude), le substantif écologie entend désigner la science des rapports des organismes entre eux et avec le monde extérieur.




L'écologie politique est-elle maudite ? 
N'est-elle plus "à la mode"  ? 
Éva Joly aura-t-elle été une candidate non représentative ? 
Le vote écologiste manque-t-il de passion ? 
Bref, fallait-il qu'une fois de plus les écologistes se fourvoient dans une élection présidentielle qui n'est pas faite pour eux ?

On peut répondre à ces questions en fournissant des précisions à ne jamais perdre de vue !

L'écologie politique n'est pas maudite. Et d'abord qu'est ce que l'écologie politique ? L'écologie peut-elle être politique ? Oui, l'écologie est politique et elle n'est même que cela parce qu'elle conduit à vivre en société dans des conditions historiquement nouvelles. Aucun parti ne porte cette exigence-là, complétement. Les gestions de l'eau, des énergies, des transports, de la production agricole bio, des déchets résultant de nos activités, de notre santé menacée par de multiples pollutions, de la coopération internationale préférée à la compétition internationale..., remplissent tout le champ politique. Et c'est sans compter avec les conséquences mondiales du réchauffement climatique, des risques de catastrophes nucléaires, et des famines dues non pas à un manque de nourriture mais du renoncement au partage des ressources.

On ne peut pas dire que l'écologie n'est pas à la mode. Car elle n'a pas à l'être ! Les modes passent. Les problèmes fondamentaux rencontrés par l'espèce humaine, qui atteint sept milliards de vivants, restent. La gestion planétaire de tout ce qui permet à chaque homme d'être un homme est une question écologique et économique, sous ses deux aspects indissociablement liés. Il ne s'agit pas, pour les candidats, de plaire, pendant un temps. Il s'agit de persuader que nos sorts sont inséparables, tout le temps.

Éva Joly, autant que tout autre, est  une candidate représentative. Lui reproche-t-on de manquer de jeunesse, de charisme, de francité ? Est-ce à ces critères qu'on reconnait la qualité de propositions, la valeur d'une personne, la justesse d'une analyse ? Sacrifier à la personnalisation d'une élection c'est en détruire la caractère démocratique.

Le vote écologiste ne manquerait pas de passion si... Si l'on votait pour dire nos désirs d'une vie plus simple, désangoissée, solidarisée, libérée des épées de Damoclès, (la nucléaire, la climatique et celle de la paupérisation) ! La passion n'est pas l'excitation. Une élection ne devrait pas être un spectacle, un match, une guerre en réduction,  dressant les citoyens les uns contre les autres ! C'est la passion pour les idées, pour la recherche d'un avenir collectif plus heureux, qui mérite notre engagement. Et, quand elle est pensée comme un renouveau de la citoyenneté, la responsabilisation économique de chacun, la lucidité, la connaissance des causes de ces crises à répétition qui ne sont que des prurits du système capitaliste, l'écologie politique est passionnante !

L'élection présidentielle n'est pas faite pour les écologistes. Nullement parce qu'ils n'ont pas à se soucier de qui dirigera la France, simplement parce que la Vème République est incompatible avec la politique, si l'on pense la politique comme un choix de société. La politique verticale, hiérarchisée, autoritaire, centralisée, voulue par Charles de Gaulle, à un moment donné de notre histoire, est obsolète. La présidentialisation des institutions, accentuée de décennie en décennie, a atteint ses limites. La France n'est plus qu'un fantôme de démocratie : elle en a l'apparence mais pas la substance. L'écologie politique ne peut pas se déployer dans ce système.

Il faut y insister : l'élection présidentielle n'est pas faite pour les écologistes, car si c'était le cas, ils entreraient dans ce qu'ils ont toujours dénoncé : l'appropriation de la vie politique par des partis.  Ceux des écologistes qui ont, eux-mêmes, constitué un parti n'ont d'ailleurs pas réussi, quoi qu'ils aient dit, à "faire de la politique autrement" et cet échec concourt à leur effacement. Car ce n'est pas l'écologie politique qui disparait mais la présentation de l'écologie politique par des voies et moyens qui lui sont incompatibles.

Et pour en finir, et en inversant la charge de la preuve, si l'élection présidentielle n'est pas faite pour les écologistes, c'est aussi parce que l'élection présidentielle est radicalement antidémocratique en ne conservant de la démocratie que la forme et pas le fond. Une élection vaut quand un débat général conduit à une conclusion claire. En 2012, c'est impossible ! La bipolarisation, à l'américaine, détourne du débat citoyen. Partout où l'on tourne les yeux, sur la planète, on constate que les élections libres mettent en place des  personnages tyranniques ou douteux. La France ne fait pas exception. Un Chef d'État aurait-il de bonnes intentions de départ, qu'il serait vite avalé par les oligarchies qui le mènent, le conditionnent, lui cachent l'horizon, pour finalement le rendre complice d'une gouvernance tout entière au service des nantis. Ce que l'écologie politique, fondée sur le partage (sinon elle n'est rien!) ne saurait tolérer.

En quelque sorte, la fierté de l'écologie politique pourrait bien être qu'elle n'a pas sa place dans l'élection présidentielle parce qu'elle la conteste radicalement. Pourquoi ne pas le dire ?

Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran




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