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mardi 20 mars 2012

Abomination

Le 23 mars 2012.
Le tueur a été tué. Il est mort sans avoir été jugé. Il était français. Il était jeune et plein de haines accumulées. Il n'était pas "un monstre" mais bel et bien un assassin effroyable ! Ce n'était pas non plus "un individu". Il portait un nom : Mohamed Merah. De multiples questions nous sont posées. Nous voulons prendre quelque recul avant d'exprimer ce que ces questions exigent que nous répondions à cette provocation bouleversante surgie au cœur de la République.
Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran.


L'horreur ne se compte pas à l'unité près.

La mort perpétrée par un tueur d'enfants nous épouvante et d'autant plus que l'assassin court encore.
Les faits, inqualifiables, nous sont proches et nous font douter de tout...

Comprenons, alors, la détresse des Afghans qui ont relevé 16 victimes civiles, dont des enfants, massacrées par un soldat américain aviné, ou rendu fou, ou les deux à la fois, il y a peu.

Rappelons-nous que les enfants qui tombent encore en Syrie, sous les coups de l'armée chargée d'assurer leur sécurité, sont eux aussi victimes de monstres.

Rappelons nous que, dans un pays aussi paisible que la Norvège, de sang froid, un tueur raciste a supprimé plusieurs dizaines de vies.

Rappelons-nous que le commerce privé des armes et l'apprentissage de la façon de s'en servir dans toutes les armées du monde, arment le bras des insensés envahis par la haine.

Nous en sommes encore aux supputations et ignorons les motivations de cet "exécuteur" et s'il agit seul. Toutefois, nous ne pouvons faire l'impasse sur la réalité : les quatre militaires exécutés étaient des hommes de couleur ou d'origine nord-africaine ; les trois enfants et l'enseignant abattus étaient des Juifs.

Nous voici, de nouveau, en présence de ce que les médias appellent "le racisme et l'antisémitisme". Mais l'antisémitisme est un racisme abominable ; il n'est pas autre chose que le racisme, lequel n'a plus rien à voir avec la race ! C'est la négation de l'autre considéré comme indigne de vivre !

Ce n'est pas une communauté qui est visée mais l'humanité elle-même, tout entière, chaque fois qu'elle prend un visage qui ne sied pas à des ignorants doublés de brutes sans pitié.

Ces pauvres gosses, juifs ou pas, nous donnent envie de pleurer et de crier : comment a pu germer, dans la tête malade du criminel homicide, une telle abomination ?

Le plus dur est de résister à la tentation de répondre à la haine par la haine. Il en est qui, en de telles circonstances, vont de nouveau en appeler à la peine de mort (comme le font les Américains avec leur soldat assassin, rapatrié aux États-Unis).

Non la mort n'efface pas la mort. Non, la mise hors d'état de nuire n'est pas l'élimination d'une personne dénaturée. L'idée selon laquelle chacun est responsable, seul, de ses actes, ne résiste pas un instant à l'examen. Oui, rappelons-nous que nos sociétés sont aussi des machines à fabriquer les meurtriers.

Mais le risque que l'horreur rencontrée nous fait subir va plus loin que la vengeance, laquelle s'apaisera. Le pire serait l'exploitation du crime à des fins idéologiques ou politiciennes. Jusqu'à cette heure, on y a échappé. Les discours sur la République violentée sont ambigus et l'abus de mots, en cette période très perturbée, peut se comprendre. Retenons seulement cette évidence : ce n'est pas seulement la France qui est touchée au cœur, c'est l'homme en nous que nous voudrions voir d'autant plus protégé qu'il est fragile.

Nous sommes avec les parents des enfants, les proches des soldats et de l'enseignant détruits comme des objets alors qu'ils étaient et restent des personnes humaines. C'est, osons le mot, d'amour qu'ils ont besoin.

Ou bien la vie ne vaut d'être vécue (et de tels événements nous le donnent à penser !) ou bien nous voulons que, par-dessus tous les massacres, civils et militaires, dont nous avons connaissance, et les autres..., il y ait, au contraire, une volonté positive de vivre ensemble en résistant à toutes les xénophobies et à toutes les aversions.

Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran


Ce sera cela ou la fin des temps...


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