mercredi 25 février 2015

ANTISEMITISMES


Il s'agit de répondre à la façon dont l'insécurité culturelle surexcite l'altérophobie.
Nicolas Lebourg

Il n'y a pas un antisémitisme, mais plusieurs. Il n'y a pas un racisme, mais plusieurs. L'antisémitisme contemporain est un racisme patent et violent ! Parler constamment de « racisme et d'antisémitisme » constitue une répétition inutile et surtout ambiguë. Distinguer absolument les antisémitismes des autres racismes reviendrait à les nier !

Le racisme est une hétérophobie affirme Albert Memmi1. C'est aussi une altérophobie selon Nicolas Lebourg2, parfois une xénophobie d'après Anatole France, dès 1901, puis Julien Benda3 en 1927.

L'hétérophobie est le refus d’autrui par peur de toute différence. L'altérophobie est aussi la peur de l'autre, le repli communautariste, l'enfermement culturel. La xénophobie est la peur et le rejet de l'étranger. Les trois vocables, voisins mais différents, induisent la défiance et l'agressivité à l'encontre de qui ne nous ressemble pas. Ce sont les nourrices du racisme.

Quelles que soient les populations ou les cibles visées, les racismes se sont manifestés, au cours de l'histoire, par des rejets haineux, aux justifications pseudo biologiques (aujourd'hui presque partout écartées), plus souvent pseudo culturelles (et très fréquemment nationalistes).

La haine des Juifs conduit aux pires crimes. La haine des Arabes également. Au reste, Juifs et Arabes, sont, les uns comme les autres, des Sémites. On a beau répéter que « l'antisémitisme concerne uniquement des attitudes anti-juives », il n'en est rien. Les mots ont un sens et quiconque s'en prend aux Sémites, tous les Sémites, est antisémite.

De même faut-il oser penser - et écrire - que tout acte qui discrimine et discrédite les Juifs nourrit l'antisémitisme. Dans le « Point de vue » d'Henri-Froment Meurice, publié le 20 février 2015 dans le quotidien Ouest-France, on peut lire que, « par sa propre politique, vis-à-vis des Palestiniens, à Jérusalem-est et dans les Territoires occupés, Benjamin Netanyaou porte sa part de responsabilité dans les violences récentes. »

Autrement dit, il ne suffit pas d' « avoir honte » des manifestations d'antisémitisme anti-juif, en France, (agressions de personnes et de synagogues, insultes, viols de sépultures...) On ne saurait davantage oublier l'antisémitisme arabe (lui aussi constitué de tagages des mosquées, d'injures, de profanation de sépultures musulmanes). Protéger des édifices religieux et poursuivre les fanatiques qui s'en prennent à ceux qui ne pensent pas comme eux est indispensable mais lutter contre les antisémitismes, c'est s'en prendre à tous les racismes : anti-Juifs, anti-Arabes, anti-Roms, anti-chrétiens, anti Libres-penseurs .... Être solidaire de nos compatriotes juifs, en France, qui sont chez eux, ce n'est pas soutenir l'État d'Israël quoi qu'il fasse et même s'il contrevient à toutes les lois internationales rappelées par l'ONU. La politique israélienne fait croître l'hostilité à l'égard des Juifs et leur cause tort dans le monde entier.

En ces temps de confusion et de récupération politiques, il est urgent de savoir ce qu'on dit : judéophobie, islamophobie, romaphobie, christianophobie sont des racismes. Mais l'hostilité à ceux qui vivent sans religion ou en marge, (athées, agnostiques, croyants non pratiquants qui ont leur place en la cité, où que ce soit, sur Terre) est tout autant un racisme. Gardons-nous de l'oublier.

Jean-Pierre Dacheux et Jean-Claude Vitran

1   Albert Memmi, Le Racisme, éd. Gallimard, collection Folio, Paris, 1994.
3   Substantif féminin dérivé du néologisme « xénophobe » dont l’invention est imputée à Anatole France en 1901. En 1927, Julien Benda publie La trahison des clercs dénonçant, entre autres, la xénophobie aussi que le nationalisme.

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