Les
législatives, inséparables des présidentielles
Le
point au 25 mai 2017. Note 69 À J-24.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 18 juin. La lecture complète du
résultat des présidentielles ne s'effectuera qu'après les
législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
Que
reste-t-il de la gauche qui puisse peser encore? Du gigantesque
lessivage produit par l'élection présidentielle de 2017, oui, que
reste-t-il de ce qui fut « la gauche » ? Pas grand
chose, si l'on ne s'en tient qu'aux vieux mots et aux anciennes
références qui n'ont plus cours ou qui ont été abandonnés.
1
– Le PS n'incarne plus la gauche et ne peut plus diriger la France.
La
gauche ralliée au social-libéralisme n'est plus la gauche parce
que, comme le criait Mitterrand au Congrès d'Épinay, en nous
trompant tous (au point que nous avons cru que le PCF avait cessé
d'être le seul grand parti anticapitaliste en France) : « Celui
qui n'accepte pas la rupture - la méthode, ça passe ensuite - celui
qui ne consent pas à la rupture avec l'ordre établi - politique, ça
va de soi, c'est secondaire - avec la société capitaliste,
celui-là, je le dis, il ne peut pas être adhérent du Parti
socialiste ». Tout
était dit. C'était en 1971. Était-ce un mensonge de la part de
celui qui visait déjà l'Élysée ? Qui le sait ?
46
ans plus tard, on peut dire encore, sans la même éloquence mais
avec réalisme : « celui
qui ne consent pas à la rupture avec la société capitaliste ne
peut pas se dire socialiste »
Et
voilà pourquoi le PS se meurt : en son sein se juxtaposent,
sans se comprendre « deux gauches irréconciliables » :
celle, (la fausse gauche), qui abjuré la motion finale d'Épinay, et
celle qui cherche les voies nouvelles de contestation du capitalisme
(la minorité de gauche qui a tenté, en vain, avec Benoît Hamon, de
sauver l'héritage en ouvrant l'espace nouveau du socialisme
écologique). Cet échec du député de Trappes, voulu par les
dirigeants actuels du PS, a marqué la fin de ce parti Osons dire
que c'est mieux ainsi, plus clair et définitif.
Cassé
en trois, le PS ne peut rien proposer d'attrayant et d'original aux
Français. Ceux qui ont rejoint Emmanuel Macron sont déjà partis
ailleurs ; ceux qui tiennent la boutique pour qu'elle ne tombe
pas dans les mains des amis de Benoît Hamon vont se retrouver
laminés, le 18 juin, et bien seuls rue de Solférino ... ; ceux
qui demeurent des socialistes vraiment socialistes ne pourront tout
rebâtir sur les ruines de leur parti et il leur faudra passer des
alliances avec ceux qui pensent comme eux ou presque. Cela ne peut se
produire qu'après les législatives. Et voilà pourquoi Jean-Luc
Mélenchon avec la
France insoumise
ne peut passer aucun accord électoral général ou local avec ceux
qui tiennent encore le PS et qui proposent un programme abandonnant
les apports de Jaurès, de Blum et même de Mitterrand à Épinay,
tout comme celui de Benoît Hamon, pourtant net vainqueur de la
primaire du 29 janvier 2017, face à Manuel Valls (58,71% contre
41,29%).
Jean-Christophe Cambadélis reparle, le 22 mai dernier, comme le fit
Manuel Valls en 2007, 2011 et 2014, d'un changement de nom du Parti
qui cesserait de se qualifier de socialiste. Tout est dit.
2
- Le PCF n'a aucune autre perspective que de sauver ses dernières
implantations locales.
Les
ultimes forces de ce parti qui fut, après la seconde guerre
mondiale, le premier parti de France, que la chute de l'empire
soviétique a discrédité, mais qui gérait plutôt bien les villes
les plus populaires qu'il dirigeait, vont être jetées dans une
lutte pour la conservation des derniers bastions. Ce conservatisme,
car c'en est un, qui reste fondé sur une idéologie productiviste et
pro-nucléaire, à peine camouflée derrière un discours devenu plus
ouvert à l'écologie politique, est sans avenir. Là encore, il y a
incompatibilité entre une vision globale et une vision localiste. La
gauche n'est plus une alliance de partis, c'est, dit Jean-Luc
Mélenchon, « le peuple », c'est-à-dire la diversité
des « gens » qui ne se contentent pas d'avoir des points
d'appui, ici ou là, mais qui veulent, dès aujourd'hui si possible,
ou demain sans trop tarder, vivre avec de quoi espérer, en échappant
à la domination des oligarques tout puissants. Et voilà pourquoi la
France insoumise, ne peut
passer aucun accord électoral d'avenir avec ceux qui limitent leurs
ambitions à sauver les sièges de ceux des députés
qui-ont-bien-fait-leur-travail.
3
- Les Verts, quel que soit le nom qu'ils se donnent, (aujourd'hui
EELV), ont perdu leur pari.
Plusieurs
fois, on a cru qu'un boulevard s'ouvrait devant cette organisation
qui s'était d'abord présentée comme « mouvement ». Les
élections à la proportionnelle lui ont été un temps favorables :
au Parlement européen, dans les Conseils régionaux et dans les
mairies mais, trop dépendants du PS, les Verts n'ont pu influencer
suffisamment la vie politique française. Le mode de scrutin
majoritaire en France a bloqué leurs résultats au niveau national,
et non seulement leurs candidats, à l'élection présidentielle
n'ont qu'une seule fois dépassé les 5% (exactement 5,25%, par Noël
Mamère, en 2002), mais leurs députés ont rarement réussi, par
leurs propres moyens, à se faire élire au Parlement. C'e fut encore
le cas de Cécile Duflot en 2012.
Les
voici repartis en 2017, mais, cette fois, en autonomie forcée, (le
PS ne disposant plus des capacités de les associer à leurs succès
pour mieux les contrôler). Que peuvent-ils attendre de cette
situation nouvelle ? Plus de liberté, certes, mais toujours peu
d'élus, sans doute ! Il leur faudra, surtout, une nouvelle
orientation dès lors que leur sort sera immanquablement lié à
celui des organisations ouvertes à une écologie véritable, telles
que l'ont exposée et Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon. Ils ne
seront plus l'unique parti de l'écologie politique.
Europe
Ecologie-Les Verts présentera 459 candidats aux élections
législatives, (228 hommes et 231 femmes) et soutiendra 52 candidats
socialistes, 16 communistes et au moins un candidat de La France
insoumise, François Ruffin, dans la Somme. Le parti socialiste
soutiendrait, lui, 49 candidats écologistes en ne présentant pas de
candidats contre eux. Le PCF en soutiendra une quinzaine dans les
mêmes conditions. L'effort des Verts est conséquent mais bien peu
d'entre tous ces candidats, sauf surprise, devrait atteindre le
second tour !
La
désignation du candidat Yannick Jadot a conduit à un choix
catastrophique qui les a entrainés dans la chute de Benoît Hamon.
Pour la première fois depuis 1974, les écologistes n'ont pu faire
valoir leur analyses et leurs propositions au cours d'une élection
présidentielle !
L'absence
d'accord avec la France insoumise tient aux mêmes causes que celles
qui séparent le PCF des candidats FI. Deux stratégies incompatibles
s'affrontent : celle de la traditionnelle « Union de la
gauche », partout où c'est possible, - qui n'est qu'une
addition - et celle, globale et nationale, d'une continuité avec les
présidentielles, - qui se veut une multiplication - pour dépasser
et renouveler, sans attendre, car le coup est parti, une gauche qui
n'était plus elle-même et qui doit se refonder autour d'un
programme (« L'avenir en commun »), déjà approuvé par
plus de 7 millions d'électeurs. L'écologie n'est plus à côté de
ce programme ; elle est dedans.
4 – C'est dans ce cadre que se situent les raisons de voter pour la France Insoumise.
•
La France Insoumise
est seule face à
toutes les droites réunies.
Elle a besoin du soutien de ceux qui ne se résignent pas à la
victoire en trompe l'œil d'Emmanuel Macron qui bénéficie du
rassemblement de tous les libéraux. Elle reste seule est en capacité
de résister ou de l'emporter.
•
La seule alternative crédible,
c'est la politique socio-écologique. Elle ne peut
convaincre ou vaincre, progresser ou gagner, que dans une unité
nouvelle qui ne soit pas la somme ou le total de forces alliées et
disparates mais bien la démultiplication d'un effort collectif qui
est effectué par les citoyens eux-mêmes. Les législatives peuvent
en fournir l'occasion si le pays confirme et amplifie son vote du 23
avril dernier. C'est une dernière chance à ne pas laisser passer.
•
Le triomphe, inéluctable à terme, d'une écologie
anti-capitaliste se prépare tout de suite.
Le libéralisme, quelle qu'en soit la forme, engendre trop
d'inégalités et trop de dangers pour l'espèce humaine. Il ne
pourra longtemps encore maintenir sa domination face à des milliards
d'exploités, de plus en plus informés et cultivés. Il faut faire
entendre cette anticipation politique et scientifique au Parlement.
•
Il ne s'agit plus seulement de soutenir et d'approuver des
partis, il s'agit de faire
entrer les citoyens dans les processus de décision et de leur rendre
possible le contrôle de l'exécution des politiques qu'ils ont
choisies. Des députés élus en grand nombre non pour faire carrière
mais pour mettre en œuvre cette grande orientation démocratique,
tel est l'enjeu majeur des législatives.
•
S'engager dans la vie politique doit changer de
signification : c'est plus que déléguer, c'est s'impliquer.
Une représentation parlementaire plus jeune, plus féminine, plus
libre par rapport au lobbies, peut seule effectuer ce passage vers
une action publique préparée et partagée avec tous les concernés.
•
Les grandes préconisations
du programme « L'avenir en commun » sont des
engagements rendus publics et auxquels quiconque pourra se référer.
Elles constituent donc bien plus qu'une liste de vœux. C'est, comme
on dit, « une feuille de route » qui n'est pas
facultative mais impérative.
•
Il est prudent de
ne pas laisser les néo-libéraux gouverner à leur guise.
Ce constat impose de rassembler un opposition de la gauche véritable
capable aussi de gouverner. Comment est-ce possible si La
France insoumise
n'est pas ou majoritaire seule ou très majoritaire au sein des
oppositions ?
En
conclusion, osons dire, aujourd'hui, qu'il est des choix qui
s'imposent quand on est le dos au mur : devant le bloc qui est
déjà, ou qui sera demain plus encore, constitué d'auxiliaires sans
état d'âme du nouveau Président de la République, il faut aller
chercher les forces du refus là où elles sont, et en masse. Et
c'est pourquoi il importe de voter prioritairement pour les candidats
de La France
insoumise
mais aussi, quand cela se produit, pour des candidats très bien
placés pour l'emporter et qui sont, de toute certitude, des
écolos-socialistes ou des socialistes-écolos clairement
anti-capitalistes. Tous les autres repères deviennent négligeables.
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