À
l'approche du deuxième tour des présidentielles
Le
point au 3 mai 2017. Note 55. À J-4.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuerons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 6 mai et sans doute au-delà car
la lecture complète des présidentielles ne s'effectuera qu'après
les législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et
même document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour
effectuer cette activité politique chronologique.
Sans
attendre la soirée sur laquelle les médias « font du buzz »,
on peut déjà annoncer que, le spectacle mis à part, ce n'est pas
l'affrontement télévisuel de ce soir qui peut rebattre les cartes !
1
- Tout a déjà été dit ou presque.
On
sait qu'il faudrait un
événement miraculeux pour que Marine Le Pen, à la traine dans tous
les sondages, comble les quelques 20 points d'écart qui la séparent
d'Emmanuel Macron.
On
sait que Macron, le candidat
de « l'extrême banque », est imprévisible et que,
s'il veut exister en tant que Président, il ne pourra faire que ce
que ses soutiens, apparus avant ou après le second tour, espèrent
« et à droite et à gauche ».
Voir
l'article que Jean-Claude Vitran présente et reproduit, (ci-annexé).
On
sait que la vie politique
française ne va pas faire la pause le 7 mai au soir !
On
sait que les législatives
aussi devraient changer les rapports entre le Parlement et le
Président.
On
sait que ... l'on ne peut
savoir si la droite traditionnelle et la social-démocratie, mises à
terre, vont pouvoir se redresser d'ici les 11 et 18 juin.
On
sait que... l'on ne peut savoir
si la gauche nouvelle, représentée par la
France insoumise, va
occuper tout le vide laissé par la défaillance du PS.
On
sait que... l'on ne peut savoir
si le FN va profiter de son élan présidentiel ou si, au contraire,
il ne va pas pouvoir faire une entrée fracassante à l'Assemblée
Nationale.
Bref,
On sait encore si l'on s'informe sérieusement, que la
peur de Le Pen est instrumentalisée aussi par ceux qui voudraient
éliminer définitivement l'installation d'un alternative
anticapitaliste en France.
On
sait, enfin, qu'en perdant la
mémoire de notre patrimoine politique et philosophique, on peut
faire machine arrière et retourner vers les temps les plus sombres
de notre histoire.
La
grande Hannah Arendt nous avait pourtant prévenus :
« Politiquement,
la faiblesse de l’argument du moindre mal a toujours été que ceux
qui choisissent le moindre mal oublient très vite qu’ils ont
choisi le mal ».
Dans : Responsabilité
et jugement, éd. petite
bibliothèque Payot, 2003, p. 79).
2
- Les trois choix des Insoumis.
C'est
hier qu'a été a dévoilé, au cours de l'après-midi, le résultat
de la consultation des militants de La France insoumise sur la
conduite à tenir au second tour de la présidentielle. Il en ressort
que les militants ont choisi aux deux tiers le vote blanc ou
l'abstention.
36,12%
des personnes consultées ont voté pour un vote blanc ou nul,
34,83%, pour un vote Emmanuel Macron et 29,05%, en faveur d'une
abstention. 243 128 personnes sur 440 000 ont répondu à cette
consultation. Bien entendu, on est loin des 7 060 885 suffrages qui
se sont portés sur le nom de Mélenchon, mais seuls étaient
consultés les membres de La France insoumise inscrits
avant le 23 avril. Il s'agissait de la collecte des avis et pas de la
recherche d'une consigne de vote.
Ce
qui mérite d'être considéré dans la publication de ce résultat,
c'est que le choix de Macron (possible) est minoritaire, celui de Le
Pen (non proposé) forcément inexistant et que le choix de ne pas
choisir est très majoritaire.
Cela
n'affectera pas le résultat final de l'élection même si des voix
pourraient se porter sur Macron plus que sur Le Pen. Ce qui va se
mesurer, c'est la pesée que cette sensibilité politique va exercer
sur le total des non exprimés. Et là, un enseignement politique
pourrait être fourni sur l'ampleur du refus d'un choix plus
contraint que libre !
3
- Une question s'ouvre, alors : voter blanc ou s'abstenir ,
est-ce efficace ?
Cette
question est double. D'une part, comment donner sens à un refus de
choisir quand le mode de scrutin exclut de tenir compte de minorités
qui, rassemblées pourraient fournir une majorité ? (On l'avait
déjà constaté, en 2002 quand Lionel Jospin, fut relégué en
troisième position, alors que toutes les candidatures de gauche,
ensemble, auraient fourni, au second tour, un total de voix
majoritaire). D'autre part, quel est le meilleur moyen de rendre
lisible et utile ce refus (quand, dans la masse des abstentions, ne
peuvent être distinguées les abstentions politiques et les
abstentions « sociologiques », mais aussi quand les
bulletins blancs, même dénombrés, n'ont pas valeur de suffrages
exprimés).
Il
faudra bien considérer, un jour, quand, parmi les électeurs
inscrits, les non-votants sont majoritaires, que l'élection est
invalide. Des citoyens envisagent même d'ouvrir des bureaux
d'inscription des abstentionnistes pour ne pas confondre les citoyens
refusants avec les « pêcheurs à la ligne », autrement
dit les citoyens dépolitisés. Plus : inscrire systématiquement
tous les citoyens en âge de voter, sans obliger à s'inscrire en
mairie - car les moyens d'y parvenir existent - et même sans rendre
le vote obligatoire, on rendrait, alors, les votations plus
crédibles. Il conviendra, en outre, évidemment, de renoncer au vote
majoritaire à deux tours, comme dans le reste de cette Europe que
nous ne voulons pas abandonner.
À
quoi s'ajoute l'obligation de terminer l'opération de reconnaissance
du vote blanc, commencée en 2014. Plus de 60 propositions de loi
pour la reconnaissance du vote blanc ont été déposées devant
l’Assemblée nationale au cours des 140 dernières années. Aucune
n'a abouti si ce n'est celle, caricaturale tant elle est incomplète,
adoptée le 21 avril 2104 et qui se résume à ceci : «
Les bulletins blancs sont décomptés séparément et annexés au
procès-verbal. Ils n'entrent pas en compte pour la détermination
des suffrages exprimés, mais il en est fait spécialement mention
dans les résultats des scrutins. Une enveloppe ne contenant aucun
bulletin est assimilée à un bulletin blanc. »
La proposition de fournir des bulletins vierges aux bonnes dimensions
avait été repoussée par le Parlement. Les électeurs concernés
doivent donc ou bien fournir eux-mêmes le bulletin, ou bien
n'utiliser que l'enveloppe ( qui, devenue plate, ne permet guère de
maintenir le secret de son vote au moment de la déposer dans l'urne
!) On ne pourra en rester là !
In
fine, cette élection
2017, même si elle ne débouche pas sur des changements à la
hauteur de notre temps et de nos exigences démocratiques, va nous
entrainer vers des remises en questions multiples. Mais ce ne sera un
acquis que si nous nous en soucions activement.
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