mercredi 23 janvier 2019

Cesare Battisti


J'ai choisi de reproduire le texte ci-dessous pour quatre raisons :

Parce que je n'ai jamais accepté que la parole de la France, fut-elle celle de François Mitterrand, soit bafouée par Jacques Chirac en 2004 et que Cesare Battisti soit obligé de s'exiler et d'errer en Amérique du Sud.

Parce que mon camarade Jean-Pierre Dacheux et Cesare Battisti avaient partagé les mêmes bancs de l'Université Paris 8 et qu'ils étaient devenus amis.

Parce que le texte ci-dessous, auquel j'adhère totalement, a été publié sur le site de l'association « Ici et Ailleurs »1 rassemblement cosmopolite de philosophes dont Jean-Pierre Dacheux fut quelques années le Président.

Parce que le néo fascisme dont Cesare Battisti est la victime est ignoble et me donne envie de vomir.

Jean-Claude VITRAN

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« Il ne doit pas en sortir vivant ».

Une Internationale noire et ouvertement fasciste, du Brésil à l’Italie, se réjouit de l’arrestation de Cesare Battisti.

Mais les démocrates, les pro-européens, sont tout aussi heureux. Oui, on a enfin eu Battisti, il doit être en prison, même 40 ans après, même s’il n’est plus dangereux, même si, même si, même si…

En dépit de siècles de droit pénal, une histoire du droit bafoué, des procès grotesques, des accusations sans vérifications…on veut la prison, que la prison, même à vie. Vive la prison à vie ! Pourquoi ? Bon sang, parce que ce Battisti ne s’est jamais repenti !

On le voit bien. L’enjeu va au-delà de Battisti.

Battisti est un plébéien comme tant d’autres qui ont choisi la politique en prison dans des années de braise et de joie.

C’est ça l’intolérable.

Un anti-communisme fasciste ou démocrate pavoise, un anti-communisme, sans le communisme, avec le « spectre » du communisme. Il faut frapper le spectre, après avoir frappé les corps et les esprits de tous ceux qui se sont révoltés en 68 et après. Battisti, malgré lui probablement, est une des silhouettes encore vivantes, encore libres, de ce spectre, surtout de tous ceux qui n’ont pas baissé la tête. Dans un article immonde, d’un important quotidien italien, le journaliste, certainement laïc, démocrate et bien cultivé, parlait moins de la mise au pilori, de l’exposition fasciste du corps du prisonnier, que du « sourire malin » de Battisti. Malgré tout, Battisti, sous la barbichette, ricane encore. Ce prolétaire inculte nous défie toujours ! Au moins il arrêtera de boire des verres de caïpirinha au Brésil, en profitant des couchers de soleil sur la mer, dit le journaliste démocrate. Quel infâme, résume Salvini.

Avec Battisti, et la campagne anti-communiste en cours, on comprend que les années 68 sont toujours là.

Avec le retour de Battisti, reviennent en Italie quarante ans d’histoire ensevelie, refoulée.

Pour les anticommunistes, Battisti c’est le dernier scalp. La descente de l’avion de Battisti signe leur triomphe définitif.

Ils sont nombreux, mais ils ont peur.

A la fin, la mise en scène fasciste de l’arrestation de Battisti est un indice de quelques inquiétudes. Le « spectre » hante toujours les sommeils des bourgeois. Battisti doit croupir en prison, on doit jeter aux chiottes la clé de sa cellule. Soif de vengeance, mais aussi extrême tentative d’empêcher que les spectres sortent de leurs tombes.

Quand ils reviendront, ils seront des millions. Ils ne ricaneront plus. Ils souriront.

Un sourire vous enterrera tous.

Philippe Bruno


1.   https://ici-et-ailleurs.org/