"Un
scandale d'Etat" : ce sont les mots employés par Bruno Le
Maire, Ministre de l'économie et des finances, pour qualifier
l'absurdité de la taxe de 3 % sur les dividendes des grandes
entreprises instaurée par le premier gouvernement de François
Hollande et récemment rejetée par le Conseil Constitutionnel.
Un
raté de taille qui contraint l'Etat « macronien » à trouver
d'urgence 10 milliards d'euros pour rembourser les entreprises
indûment prélevées.
Pour
établir les responsabilités de ce scandale, le ministre des
Finances avait missionné l'inspection générale des finances (IGF)
en lançant un audit sur cette affaire. Ce faisant, il prenait le
risque de mettre en cause la responsabilité du président qui en
2012, comme secrétaire général adjoint de l'Elysée, était en
charge des sujets fiscaux.
Christian
Eckert, ex-secrétaire d’Etat au Budget, affirmant, au passage,
dans les colonnes du journal Le Parisien :
« Emmanuel
Macron ne peut pas dire qu’il ne connaissait pas le dossier. Il le
surveillait comme le lait sur le feu. Quand je le voyais, nous
parlions d’ailleurs souvent de ce contentieux ».
Le
rapport1
a été rendu le 13 novembre. Alors, qui est responsable ?
Tout
le gouvernement de l'époque puisque il est écrit que les
responsabilités sont plurielles, belle façon de dédouaner tout le
monde. Emmanuel Macron, bien entendu, en sort blanchi, car : « A
l'été 2012, il n'était pas possible d'anticiper la nature des
risques juridiques apparus ultérieurement ».
En
fait, le rapport charge les ministres du gouvernement de Manuel
Valls : « L’année 2015 marque un tournant
décisif dans l’histoire de la taxe à 3 %. C’est en effet à
partir de cette année qu’apparaissent des signes d’une
perception élargie de la fragilité de la taxe »
écrit l’IGF.
C'est
Michel Sapin, alors ministre des Finances et des Comptes Publics en
charge du dossier, qui porte le chapeau car, dixit le rapport,
Emmanuel Macron, pourtant ministre de l’Economie et du numérique,
n’était pas directement concerné.
Le
plus extraordinaire dans cette affaire n'est pas qu'on trouve le
moyen d'exonérer les responsables, cela nous devions nous y
attendre, mais ce sont les précautions épistolaires de la
rédactrice2
du rapport dans sa rédaction du préambule méthodologique :
« Les
lecteurs doivent savoir que j’ai pu être influencée dans cette
enquête par mes fonctions antérieures en qualité de directrice de
la législation fiscale (de janvier 2004 à mars 2012) et que j’ai
personnellement été partie prenante à la genèse du sujet,
puisque j’avais sollicité au début de l’année 2012
l’autorisation d’ouvrir une consultation de place pour remplacer
la retenue à la source sur les dividendes versés aux organismes de
placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) non-résidents,
dont l’annulation par la Cour de justice de l’Union européenne
(CJUE) paraissait certaine ; cela n’a pas été possible avant le
changement de majorité. ... »
Quelle
extraordinaire manière de ne pas se mouiller et de nous prendre pour
des crétins !
Jean-Claude VITRAN
1 http://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2017/2017-M-076.pdf
2
Rédactrice : Marie-Christine LEPETIT - Inspectrice générale
des finances - Chef du Service de l’Inspection générale des
finances.