Les
législatives, inséparables des présidentielles
Le
point au 12 mai 2017. Note 60. À J-37.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuerons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 18 juin. La lecture complète du
résultat des présidentielles ne s'effectuera qu'après les
législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
1
- La résistance précède et motive les changements.
Il
n'est pas de « changement dans la continuité »
contrairement à ce que scandait Georges Pompidou, en campagne pour
son élection. Quant au « changement maintenant » de
François Hollande, on sait ce qu'il en est advenu... Nous avons
quelque fierté à avoir donné à notre blog le nom de Résistance
et Changements. Il ne faut pas confondre le changement des
apparences et les changements qui permettent de mieux vivre. Qui veut
le plus intensément des changements sinon chacun de ceux qui
subissent des conditions d'existence difficiles voire douloureuses ?
Comme
nous l'avons précédemment rappelé, il y a grand danger quand
« tout change pour que rien ne change » ! Ce n'est
pas seulement de la littérature ou du cinéma : on peut tromper
le peuple en lui donnant à croire que des changements (en bien) vont
survenir, alors que la volonté politique de conserver et maintenir
(quitte à lâcher un peu du lest qui alourdit le quotidien des
modestes) ne change pas, elle !
Ce ne sont pas seulement les exploités qui ont à résister mais aussi tous les citoyens attachés à une pratique démocratique réelle : sinon rien d'important ne peut changer. C'est notre conviction
et elle n'est pas à confondre avec la passion politique qui aveugle.
L'hostilité à l'encontre des personnes n'est pas efficace. Nous ne
sommes pas confrontés à la personne d'Emmanuel Macron mais à sa
politique qui ne saurait apporter les changements sociaux et
écologiques, dont la France a le plus urgent des besoins.
2
– La recomposition est un changement de ... position !
Quand
la droite n'est plus à droite et la gauche n'est plus à gauche,
c'est que les repères idéologiques et les paradigmes qui nous
étaient utiles sont devenus obsolètes. Le paradigme est, dit le
Grand Robert, « un ensemble
de notions, de réalités, ayant un sémantisme commun »,
autrement dit, ce qui change c'est le sens même de la politique. Ce
que nous appelions gauche s'est scindé : les néo-conservateurs
qu'on trouve dans l'ex-parti socialiste rejoignent les « macroniens »
qui ont compris que la droite parlementaire et traditionnelle n'était
plus opérationnelle. Restent ceux qui auront également à faire un
« aggiornamento » que je voudrais populaire et
écologique. Ce que nous appelions droite cesse d'être
principalement tourné vers le passé et le traditionalisme. Pour
conserver, il faut changer. L'essorage des vieux partis est, en même
temps, un renouvellement, un rajeunissement de l'encadrement
politique du pays mais sans modifier, bien sûr, le pouvoir de
domination. L'intérêt de la période historique que nous
traversons, c'est qu'elle va permettre de remettre chacun à sa
place : les nantis avec les profiteurs, les citoyens du monde
avec les créateurs.
3 – La problématique Valls
Qui
voudra de lui, à présent ? Il entre désormais dans un
isolement auquel même une réélection (non assurée) ne lui
permettrait pas d'échapper. Le voici à l'arrêt : ni « en
marche », ni membre ayant autorité dans un parti où il n'a
plus rien à faire puisqu'il en a signé le bulletin de décès avant
même qu'il soit effacé de la vie politique ! Le piège qu'il
avait lui-même tendu se referme sur lui : être socialiste et
libéral sera bientôt intenable.
Il
faut bien reconnaître qu'il rend service à ceux qui, « à
droite comme à gauche », voulaient une clarification. Il n' a
jamais caché sa pensée : le parti socialiste devait cesser
d'être socialiste. Manuel Valls sera allé au bout de sa logique. Il
fut dur et sincère ; le voici en échec, mais pas encore
défait. Il a détruit la candidature de celui qui l'avait vaincu :
Benoît Hamon. Il est entouré d'assez de soutiens et de proches pour
pouvoir continuer de tenter de regrouper tous « les
socio-libéraux Macroniens compatibles ». Il a osé ; il a
perdu ; c'est une bonne nouvelle politique mais lui, au moins,
aura agi à visage découvert. Puissent tous les petits Valls qui
ont, tout autant que lui, trahi leurs propres convictions de
jeunesse, disparaître à leur tour. Il n'y faudra qu'un peu de
temps.
4
– J-L Mélenchon peut-il atteindre son objectif et la
France « insoumise » le
restera-t-elle ?
Jean-Luc
Mélenchon n'est pas passé aussi prêt du but, car lui aussi aurait
vaincu Marine Le Pen, pour renoncer maintenant alors qu'il sait que
la partie n'est pas terminée. Il lui faut donc prendre de
nouveaux risques. Il reste dangereux aux yeux des nouveaux maîtres
de l'État et il subira, de la part de médias aux ordres, les pires
avanies. Il n'abandonne pas son objectif et ceux qui l'entourent pas
davantage : mettre fin à l'influence politique de ceux, quels
qu'ils soient, qui n'ont plus rien à dire au peuple.
Faire
exister, au Parlement, une force qui ne doive rien au PS ni au PCF
(ni même aux Verts d'EELV qui n'ont jamais pu s'extraire de
l'influence dominatrice du PS) : tel est le projet, ambitieux et
difficile, mais encore à la portée de ceux qui sont convaincus
qu'hors de la voie socio- écologique, il n'y a point d'avenir pour
ceux qui sont issus de « la gauche » ».
Tout
sera dit le 18 juin. La réussite personnelle de Jean-Luc Mélenchon
n'est plus en question puisqu'il ne sera pas président de la
République. On ne pourra plus lui faire le reproche d'agir pour
lui-même. Par contre, lui enlever sa capacité à exprimer une
politique nouvelle et claire serait, de la part de ceux qui ne vivent
que de critiques, d'une imprudence considérable. Si l'on veut que
tout ne soit pas broyé par la mécanique présidentielle (FN,
Républicains, PS, PCF et EELV...), il ne suffit pas de passer des
accords d'appareils pour limiter le dégâts, encore faut-il avoir un
projet à proposer et la capacité de l'exposer. Dès lors, on voit
mal comment, en dehors de la France
Insoumise, faire
exister une alternative crédible.
Est-ce
que ceux qui ont mis leurs espoirs dans cette dynamique ayant créé
la surprise vont en rester solidaires ? La réponse dépend de
« la chute de potentiel générale » qui pourrait encore
aller alourdir l'abstention. Pourtant, si ce découragement ou ce
désintérêt suivant souvent l'élection présidentielle était
moindre du côté de la France
Insoumise, alors,
une surprise supplémentaire peut survenir. L'insoumission déterminée
et paisible a besoin d'être régénérée, circonscription par
circonscription. Ce n'est ni acquis ni invraisemblable. À nos yeux,
là se situe le changement possible..
***
Soyons loyaux et lucides autant que sévères : ni le PS, ni le PCF, ni EELV, (qu'ils soient séparés ou réunis, par-ci par-là, pour la circonstance électorale des seules législatives), ne sont en capacité de faire face au flux de la République en Marche. Le système électoral majoritaire à deux tours aidant, ils risquent d'être étrillés. Et ce d'autant que nombre de déçus de la droite parlementaire sortante, vont venir, en partie, gonfler le stock des voix que va rassembler cette droite présidentielle, supplétive et rajeunie (laquelle entend bien, par séduction et grâce à la complicité des ralliés, aller piller les nids « et de droite et de gauche ».)
Même
les centristes qui ont cru pouvoir tirer parti du rapprochement de
François Bayrou et d'Emmanuel Macron en sont à découvrir qu'ils
peuvent être floués. Les 577 places de députés ne suffisent
visiblement pas à satisfaire tous les appétits et le partage se
fait dans la douleur.
Quant
au FN, affecté par la défaite de Marine Le Pen et déjà divisé,
ses dix millions de voix ne lui permettront pas d'obtenir mieux qu'un
groupe parlementaire de faible effectif, s'il l'obtient. Sans
proportionnelle, il verra, au second tour, se rassembler contre lui,
tous ceux qui le rejette, comme aux régionales ( ce dont, à notre
sens, il ne faut pas se réjouir trop vite car l'injustice de la
représentation reste une injustice qui se paie un jour, même quand
ce sont nos pires adversaires qui en sont les victimes).
Bref,
que cela nous convienne ou non, à ce jour, de résistance il n'y
aura que celle qu'organise La France insoumise
appuyée sur les 7 millions de voix qui se sont portées sur la
candidature de Jean-Luc Mélenchon. Nous espérions mieux, notamment
du côté des socialistes restés socialistes et des écologistes qui
ont enfin compris, j'espère, qu'ils ont perdu l'appui d'un PS
résiduel qui sait qu'il joue sa survie et qui a donc d'autres chats
à fouetter que de se préoccuper de la survie de quelques
parlementaires encombrants. Les idées convergent plus vite que les
organisations : les Hamon, Mélenchon et Hulot (qui d'autre que
ce dernier, dans la mouvance verte, dans et hors du parti EELV, peut
définir un objectif écologique attirant ?) ne peuvent
qu'emprunter la même voie s'ils ne se renient pas. Cela nous semble
inéluctable.
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