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vendredi 21 avril 2017

Une page va se tourner.


Le troisième et dernier temps d'une campagne à surprises 

Le point au 20 avril 2017. Note 43 à J-3
par Jean-Pierre Dacheux

Nous continuerons d'analyser jusqu'au 6 mai l'évolution de la situation politique pendant la campagne électorale ouverte depuis la fin 2016. Chaque texte, daté, numéroté et modifiable, s'ajoute aux précédents et présentés, depuis le 20 mars, sous le titre : « Le troisième et dernier temps d'une campagne à surprises » Chacun de ces textes peut être contredit, sans doute, parfois, par les événements. Fin mai 2017, nous regrouperons, en un seul et même document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer cette activité politique chronologique.


1 - Quelle sera la dernière surprise ? Nul ne le sait, mais il y en aura une, dès le 23 avril au soir.
Dans trois jours, 9 des 11 candidats auront été éliminés. Telle est la loi électorale. En 2002, Chirac, Le Pen père et Lionel Jospin se tenaient déjà « dans un mouchoir », en moins de quatre points ! L'élimination de Jospin, due à la bipolarisation obligatoire du scrutin, avait, mécaniquement, promu Chirac pourtant en bien mauvaise posture au premier tour. Allons nous nous retrouver, peut-être avec quatre candidats, dans une situation comparable, voire pire ?

Ces quatre candidats au coude à coude, en tout cas selon les sondages, sont : Fillon, Le Pen, Macron et Mélenchon. Il en restera deux. Suivrait, loin derrière, Hamon, qui ne peut plus, selon toute vraisemblance, être présent au second tour. Nous avons donc six configurations possibles (chaque candidat pouvant se voir opposer l'un de ses trois concurrents) : Le Pen-Fillon /, Le Pen-Macron/, Le Pen-Mélenchon/ Fillon-Macron//, Mélenchon-Fillon/ et Mélenchon-Macron.

Ces duels ne sont pas égaux. Deux candidats ne sont pas, à mon avis, « présentables » : les candidats de la droite extrême (Le Pen et Fillon) ne peuvent diriger la France. Sans parler des « casseroles » que l'un et l'autre tirent derrière eux, il est douteux que l'un, comme l'autre, soient adoubés par les électeurs. La candidate de l'extrême droite ultra nationaliste et le candidat de la droite extrémisée dominé par l'argent, ne sont pas estimables. Le scénario catastrophe, type 2002, serait, pourtant, que Fillon - et c'est sa meilleure chance - soit opposé à Le Pen. Il serait alors élu. Dans tous les cas de figure, si Marine Le Pen accédait, par malheur, au second tour, elle serait d'ailleurs battue.

Le duel Fillon-Macron, entre la droite hard et la droite soft, tournerait, selon moi, à l'avantage de Macron tant Fillon s'est déconsidéré.

Les seuls duels droite /gauche sont ceux où Mélenchon serait impliqué.

Devant Fillon, Mélenchon se retrouverait face à un adversaire déconsidéré mais habile, expérimenté et donc redoutable. La droite, sous toutes ses formes, veut, coûte que coûte, que se produise une alternance, quitte à fermer les yeux sur les frasques de son candidat maintenu. Le projet de Mélenchon n'étant pas celui du PS, il peut désarçonner le faux leader du camp des droites à peine réconciliées et masquant (assez mal) ses divergences. Son talent de débatteur ferait la différence.

Les deux candidats pouvant aussi être aux prises, (Mélenchon et Macron) donnent à espérer une autre façon de gouverner. Ils sont très différents et ont des projets sur bien des points opposés, mais les deux hommes, l'un comme l'autre, au cours de la campagne, sont apparus plus respectables. S'ils devaient être confrontés, au deuxième tour, nous aurions alors un débat de fond entre la droite reconstituée ayant mordu sur l'ex-gauche et la gauche repensée, rebaptisée et redynamisée, ce qui ouvrirait un nouvel espace politique. Cela signerait aussi la fin des partis traditionnels (« Républicains » et PS hollandiste).

Je ne fais pas mystère que la seule éventualité qui m'agrée est celle de la recomposition du paysage politique en France. Je doute que Macron, qui le voudrait, mais sur de bases libérales, puisse y parvenir. Je crois que Mélenchon est mieux armé intellectuellement, culturellement, et pratiquement en disposant d'une assise populaire, pour s'y engager, mais il aura bien des obstacles à surmonter !

En tout état de cause, nous en avons pour des années de remises en question et de recherches. On ne passe pas d'une période historique à une autre par la voie d'une élection même si elle ouvre des possibles.


2 - C'est l'intoxe finale ?

Le numéro de l'hebdomadaire le 1, en vente ce jour, titre : Les médias faussent-ils l'élection ? Quels médias ? Le mot est ambigu ! Les grands organes de presse propriétés des puissances d'argent ne sont pas à confondre avec et les « réseaux sociaux », eux-mêmes aux mains de très grandes entreprises, mais dont il est fait des usages très contradictoires, positifs et négatifs. L'information qui circule n'est pas celle d'il y a 30 ans. Plus que jamais, il faut une culture critique pour s'en servir et c'est là que le bât blesse : l'opinion est submergée par des informations voulues, pensées et diffusées pour influencer les jugements. Serions-nous des consommateurs d'idées comme on est consommateur de foie gras, de chocolat ou d'huitres ! On nous vend donc des candidats ou bien on les discrédite. C'est le marché qui nous enfume. À nous d'y résister.

Depuis que Mélenchon progresse dans les sondages, il est la cible de tous les bien pensants. Des journalistes connus s'emploient à le déconsidérer, non plus en révélant des faits (comme pour Fillon), mais en déformant, tronquant ou interprétant des paroles ou des textes concernant des sujets sensibles. C'est le cas des réserves exprimées à propos de l'Europe. On nous refait le coup de 2005 : quiconque n'accepte pas la politique européenne des marchands et des marchandises, et sa priorité à la privatisation, est soit un ennemi de l'Europe soit un allié objectif des nationalistes du type Front national (à moins que ce ne soit un retour du communisme dévastateur de l'économie!). Mélenchon est anti libéral et c'est insupportable au « monde de la finance » (que dénonçait clairement, Hollande, au Bourget, en 2012, avant de rentrer dans le rang). Il faut donc anéantir ce trublion qui ose promouvoir une France insoumise, avant qu'il ne soit trop tard. Ne pas voir le monde entier muter, c'est se satisfaire ou se contenter de l'ignorance et là est le risque électoral majeur.

Ce que révèlent les sondages d'opinion n'est pas non plus communiqué avec toutes les réserves scientifiques indispensables, à commencer par l'indication véritable des marges d'erreur. C'est un moyen de conditionner les électeurs de plus en plus apparent. Si, bientôt, les résultats ne recouvrent pas les annonces des sondages, alors on exposera que les abstentionnistes, sortis du bois, ont tout bousculé, tout changé, tout relativisé. Ce pourrait même être de leur faute si les pronostics ont été chamboulés. Ce sera, évidemment, faux. C'est confondre la cause et la responsabilité ! À vouloir faire d'abord de l'audience ou à force de rechercher le scoop qui fait vendre, on finit par manquer de rigueur. Il nous faut, dans les articles de presse ou sur internet, « lire entre les lignes » pour débusquer ce qui ne peut être totalement ignoré mais que l'on nous voile, à savoir que tout n'est pas écrit et que toutes les certitudes affichées pourraient bien être reléguées au magasin des antiquités.



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