Vers
le deuxième tour des présidentielles
Le
point au 28 avril 2017. Note 50.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuerons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 6 mai et sans doute au-delà car
la lecture des présidentielles ne s'effectuera qu'après les
législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
Cible
de toutes les attaques depuis son élimination au premier tour de
l'élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, qui a rassemblé
autour de sa candidature 19,6% d'électeurs, soit 7 millions de
Français, a enregistré une vidéo qui sera diffusée aujourd'hui
sur sa page You Tube. Les « Insoumis » sont actuellement
consultés pour déterminer la ligne à choisir entre le vote
Emmanuel Macron, le vote blanc et l'abstention.
Manuel Bompard, ancien directeur de campagne de Mélenchon, lui, s'offusque : « On essaie de nous donner des leçons de morale sur le combat contre le Front national, alors que quand on analyse les résultats du premier tour, celui qui a fait baisser le FN dans cette élection, c'est Jean-Luc Mélenchon ».
On
veut nous enfoncer dans la tête que ne pas voter Macron serait voter
Le Pen. On veut ainsi culpabiliser quiconque cherche à exprimer son
double refus du fascisme et du capitalisme. Rien ne nous est épargné
pour nous faire peur : Le Pen pourrait être élue, ce qu'aucun
analyste sérieux ne confirme.
Et
si nous regardions autrement ce qui arrive ?
1 - Le « Tous contre le Pen » est d'une ambiguïté
dangereuse. C'est
même la seule chance du FN. Le rassemblement contre nature de tous
les libéraux pourrait déclencher un réflexe de colère de la part
des électeurs qui ne veulent pas qu'on leur lave le cerveau.
2 - Le « Tous derrière Macron » n'est que la course de
tous ceux qui courent à la soupe. La
soupe, ce sont les postes et le sièges que le soutien au vainqueur
pourrait faire obtenir. Du moins si la logique présidentialiste
continue à fonctionner...
3 - Résister
n'est pas se coucher.
Il serait inutile d'avoir dénoncé les institutions de la cinquième
République, son mode de scrutin et les courtes vues de ceux qui ne
voient pas le monde dans sa réalité pour, à présent, baisser
pavillon! Tout n'est pas écrit et « la lutte continue ».
4
- La politique ne se résume pas aux élections.
« Désintéressons-nous, une fois pour
toutes, des élections ! » écrit le philosophe Badiou. Je
ne peux le suivre mais, sur un point de fond, il a raison quand il
ajoute : « Hystériser les résultats d'une élection ne mène à rien qu'à une dépression vaine ». Son analyse est incompréhensible par ceux ceux qui ont un
besoin fonctionnel d'espoir, notamment parmi les plus modestes. Par
contre, tout miser sur des élections est, oui, renoncer à l'action
politique. Il faut donc le lire sur Médiapart : https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/270417/desinteressons-nous-une-fois-pour-toutes-des-elections
5 - Oui, qui soutient le capitalisme ou s'y résigne est,
objectivement de droite. Soutenir
Macron c'est passer à droite et il suffit de consulter la liste de
ses soutiens, des ralliés et de ceux qui se désistent en sa faveur
pour s'en convaincre. L'élection a fait le ménage. Ce qui reste de
la gauche est extérieur à ce monde-là. Rejeter Le Pen ne suffit
pas et ne fournit pas un passeport de gauche. (Le PCF en apporte,
hélas, la preuve en continuant à gérer ses petits, de plus en plus
petits, intérêts électoraux - triste fin - !).
6 - Les journalistes font, le plus souvent, le travail que leur
imposent ceux qui les emploient.
S'en étonner est bien naïf. On sait qui possède la presse dabs sa
majorité. «
Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus que de
faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie »
écrivait, Albert Londres (1884-1932). Où sont ses successeurs ?
Chaque jour, à chaque heure, au cours de cette campagne, on aura lu,
vu, ou entendu, les habiles - au mieux -, perfides - au pire -,
propos de ceux qui ne peuvent que suivre la ligne libérale dominante
laquelle a permis et permet toujours « l'envol des inégalités »
qui tue méthodiquement la démocratie, élections ou pas.
7
- « Être radical parce que la situation est radicale ».
L'affirmer n'a rien
d'extrémiste ! Prendre la réalité à la racine ne signifie
pas sombrer dans l'idéalisme. C'est tout le contraire. Qui est
inconscient n'échappe pas à l'erreur. Or, seule la social-écologie
(versus Hamon ou versus Mélenchon) peut répondre aux défis énormes
que rencontrent les hommes, de leur fait et non par malchance. « Le
changement climatique et l'érosion de la diversité déterminent
l'avenir. L'intégrisme prospère sur le vide de sens de l'époque.
L'oligarchie poursuit sa montée autoritaire » résume
Hervé Kempf, dans son dernier livre, paru en janvier 2017 au Seuil :
Tout est prêt pour que
tout empire. Pour éviter
et non attendre la catastrophe, il faut se démarquer du capitalisme
entré dans sa phase finale et non l'accompagner. Aucun compromis
n'est à faire avec ce qui détruit notre propre espèce. « Ni
Le Pen ( à l'évidence
!) ni Macron
(si l'on est lucide) », n'est donc pas seulement un slogan de
jeunes lycéens manifestant leur angoisse et leur dépit, c'est la
conséquence immédiate d'une aspiration à un mieux vivre qui doit
concerner non pas 1% mais 100% des humains. Et dire que c'est
impossible n'est plus supportable. Ou, alors, pourquoi et pour quoi
vivre ?
8 - Je ne sais ce que va dire Mélenchon et je ne lui demande pas de
me dire comment voter. Il n'a
rien d'autre à faire, à mon avis, que d'user de son immense talent
oratoire pour nous donner des raisons d'espérer. J'attends qu'il se
rebelle contre ceux qui ont sciemment caricaturé sa pensée et ont
voulu le faire passer pour un gourou. Je souhaite qu'il n'adopte pas
la posture du vaincu mais celle d'un acteur toujours capable de
bouleverser la donne politique sans s'en tenir aux échéances
électorales immédiates. J'espère enfin qu'il continue d'aller
au-delà de sa propre personne et redynamise les Insoumis.
9 - Mélenchon n'est ni Jospin ni Fillon : il n'a pas à se
retirer de la vie politique. Sa
chance est d'avoir atteint l'âge où il n'est plus question de faire
carrière. Par contre, je lui reprocherais de nous priver de son
apport s'il venait à prendre du champ, à s'éloigner de ceux qu'il
a su motiver. Il ne peut laisser ses soutiens seuls, perdus au milieu
du gué.
10
- Mélenchon peut nous aider à dépasser Mélenchon. Il
a fait « le job ». Il ne s'agit pas de le remplacer mais
bien de lui donner une suite. Tant qu'il en aura la force, il lui
faut travailler à améliorer encore le contenu d'une politique qui
est promise au succès parce qu'elle s'appuie sur l'analyse
implacable d'une réalité qui déborde la France et pourtant la
menace. Voter Macron serait confondre le remède et le mal. C'est le
capitalisme qui génère la réaction ultra nationaliste. Il y a ceux
qui s'inclinent devant les conséquences d'un système électoral
présidentialiste pervers et ceux qui se refusent à baisser les
bras ? J'en suis. Une défaite qui n'en est pas une peut être
surmontée.
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