Les
législatives, inséparables des présidentielles
Le
point au 8 juin 2017. Note 74 à J-3 et J-10.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 18 juin. La lecture complète du
résultat des présidentielles ne s'effectuera qu'après les
législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
Oui
, la clarification est... « en marche », mais nombre de
citoyens vont, pourtant, être dupés.
Cette
clarification touche plusieurs domaines et donc, en fait, il est
plusieurs clarifications !
1
- On est loin du « et à gauche et à droite ».
On
est entré franchement dans le : « et à droite et à
droite ».
Cette
clarification a commencé parce que les politiques annoncées et la
façon de les faire passer sont signées du Président « jupitérien »
lui-même. Jupiter (Zeus en grec) prit la forme d'un cygne beau et
doux pour séduire Léda. Emmanuel Macron séduit aussi et nous
sommes bien, avec lui, en pleine mythologie : on veut nous faire
accroire que la politique va cesser d'être l'affaire des
politiciens. Quelle illusion !
Les
élections législatives risquent d'avaliser cette grande manœuvre
et le jeune Président, véritable apprenti sorcier va dresser le
pays contre lui, demain ou plus tard. En s'enfermant, et en nous
enfermant avec lui, dans la Vème
République, il deviendra obsolète autant que le sont les
institutions françaises, faites pour la droite, quels que soient les
partis soutenant le Président.
Première
clarification donc : la politique néo-libérale du président
est bien une politique de droite
et tous ceux qui l'approuvent, ou la mettent en œuvre quel que soit
leur passé, (de Bayrou à Hulot et d'autres avec eux), ont muté et
sont, de facto, à présent, au service des « maîtres de la
finance », comme disait l'ex-président.
2
– Il n'y a plus, de gauche véritable pouvant, par le poids de ses
partis traditionnels, faire basculer la France hors du piège
néolibéral.
•
Le
vieux Parti Radical de Gauche (le
PRG) s'est « déradicalisé » depuis des lustres. Il a
quitté l'ex-gauche depuis fort longtemps. Son unique objectif est de
maintenir en vie quelques élus du sud-Ouest. Pour cela il lui
fallait coller au PS. À présent, réaliste, il s'est déjà mis
« en marche » vers Emmanuel Macron. À preuve, Sylvia
Pinel sur Facebook : « Je
souhaite remercier Emmanuel Macron et la République En Marche qui
ont décidé de soutenir ma candidature dans la 2ème circonscription
(du
Tarn et Garonne) en ne
présentant pas de candidat face à moi. Il m'appartient désormais
de rassembler toutes celles et tous ceux qui souhaitent donner une
large majorité au nouveau Président de la République ». Exit
le PRG ; il est politiquement mort.
•
Le
Parti socialiste
(le PS) a explosé en vol et s'est fractionné en trois, au moins :
les
ralliés
à Macron passés à droite sans vergogne (tel ManuelValls), les
attentistes
qui gardent la boutique pour le cas où l'on pourrait s'en resservir
(tel Jean-Christophe Cambadélis), les
rebelles
enfin, (tel Benoît Hamon) dont certains, ex-« Frondeurs »,
s'évertuent à garder en vie un parti qui resterait socialiste. À
quoi s'ajoutent les
entêtées
(telles Martine Aubry et Anne Hidalgo) qui veulent reconstruire une
force politique depuis leurs bastions, à Lille ou à Paris. Trop
tard, le PS s'est auto-détruit. S'il se refonde jamais, ce sera dans
bien longtemps, sur les bases socio-écologiques proposées par
Benoît Hamon. Exit, à court terme, le PS. François Hollande l'a
déconsidéré.
•
Le Parti communiste (le PCF), en survie depuis la fin de l'URSS,
ne tient que par l'énergie, l'implantation et la compétence de ceux
qui, par fidélité et intérêt, résistent encore. Il n'a pas tiré
tous les enseignements de l'échec idéologique du communisme
mondial, notamment en ce qui concerne la priorité écologique, le
bouleversement du travail humain et la décentralisation démocratique
... Ce parti, d'élection en élection, fond, n'a plus les
moyens de se refonder, et pourra, tout au plus, se re-fondre,
un jour, au sein d'un ensemble politique anticapitaliste plus vaste à
renommer. On en est très loin. Exit donc aussi le PCF.
Seconde
clarification dès lors : face au néo-libéralisme conquérant,
la gauche traditionnelle disparaît ou se miniaturise.
• 3
- Une gauche tout autre, populaire et massive, se cherche.
Elle
ne s'est pas encore trouvée.
Jean-Luc
Mélenchon a tenté de la faire émerger. Il n'a pas été loin d'y
parvenir. Dans le cadre électoral existant, la tâche était trop
difficile. La France insoumise existe certes, à présent,
mais quelle sera son implantation législative ? Son seul mérite et
son principal intérêt, c'est qu'elle seule peut incarner, à la
fois, ce qui survit de la gauche de gauche et un programme
l'attestant, non ambigu, connu et rendu public depuis des mois. Quand
ce sursaut populaire va-t-il changer les rapports de forces, en
France ? Bientôt ? Plus tard ? Jamais ? On ne
peut le savoir aujourd'hui, de même qu'on ignore si une majorité
présidentielle absolue peut surgir d'ici quelques jours et pour cinq
ans sauf accident politique.
Troisième
clarification, donc. À la veille des législatives, il n'est plus
qu'une seule alternative politique : ou bien la France des
privilégiés réunis et mis en marche derrière le Président de la
droite reconstituée, ou bien la France populaire en quête
d'elle-même qui ambitionne de reprendre et dépasser les acquis de
la gauche en perdition et ne séparant plus jamais l'écologie et le
social.
4
– On s'est trompé d'écologie !
Celle
qui va s'imposer sortira de l'évolution planétaire, pas directement
des urnes.
Un
vote résulte et d'événements majeurs et des débats qu'ils
provoquent. La démocratie n'est pas à l'origine de la
transformation des sociétés mais, si elle ne l'accompagne pas, rien
n'est acquis et la violence peut se redéployer. Les écologistes qui
ont créé un parti, voisin des partis traditionnels de la gauche,
mais seulement associé n'ont pu ni constituer une force politique
dans le cadre institutionnel existant ni peser de façon
significative sur les politiques publiques. Les voici, eux aussi en
déroute. Ils se sont trompés d'écologie. Elle ne pouvait prendre
cette forme de représentation partidaire. Ni sur le nucléaire, ni
sur « la vie sobre », ni sur la démarchandisation
de l'eau, ni sur l'agriculture biologique, ni sur le climat, ni sur
l'Europe régionalisée et remède aux nationalismes etc … ils
n'ont pu faire mieux que de faire entendre leur voix, aussitôt
couverte par les tenants de l'économie de marché « croissantiste ».
Le drame aura été qu'ils ont été (moins en Allemagne) placés
dans l'obligation de rechercher des compromis qui masquaient ou
déformaient leur message et les rendaient de moins en moins
crédibles. L'alliance EELV-PS de Yannick Jadot et Benoît Hamon,
ratée et catastrophique, a achevé de ruiner une tentative de donner
corps à l'écologie au moyen d'accords entre appareils politiques.
L'écologie n'est pas morte ; cette écologie l'est. Exit dans
ces conditions, Europe-écologie-les-Verts (EELV). Le PS l'a blessée
à mort. Le glissement se Daniel Cohn-Bendit et de Nicolas Hulot vers
le néo-libéralisme macronien l'a achevée.
Et
pourtant, la conscience des urgences planétaires principalement
écologistes est plus vivante que jamais. Le lien entre l'économie
et l'écologie est établi. Les initiatives citoyennes se
multiplient. L'incompatibilité entre l'écologie et le capitalisme
est admise par un nombre croissant d'êtres humains. L'épuisement
des ressources énergétiques fossiles, dont l'uranium, est démontré.
Le recueil, la distribution, le moindre coût des énergies
renouvelables deviennent nécessaires et les savants, comme nombre
d'entreprises, en sont convaincus. Bref ce que les politiciens aux
ordres des puissances d'argent n'acceptent pas va se produire, sinon
c'en est fait des possibilités de vivre sur Terre. Cette écologie
réaliste, dont dépend la vie de tous et l'avenir de nos sociétés,
n'est plus contestable, car puissants et misérables sont ensemble
concernés par une mutation de civilisation que rien ne peut plus
empêcher, sauf un suicide collectif économique ou militaire
perpétré par ceux qui n'ont plus rien à perdre (« le 1% des
favorisés qui ne vivent que pour leurs profits).
Quatrième
clarification, enfin : même si l'écolo-socialisme a pour lui
l'avenir, à moins d'une surprise supplémentaire, dont nous nous
réjouirions, il n'est pas encore prêt, en France, à accéder au
présent.
Ce
constat sans concession ne saurait nous désespérer. Certes, il nous
projette au-delà d'élections dont nous n'avons pas encore abordé
le premier tour. Mais la politique n'est ni dans une paire de dés,
ni dans un jeu de cartes, ni dans les lignes de la main. Il serait
vain de compter sur le hasard et la chance. Même si surgit
l'inattendu, il aura une source sociale dont il faudra comprendre
l'émergence. Tout a été bouleversé mais rien ne sera totalement
joué le 18 juin au soir.
Que
d'enseignements, pourtant à retirer déjà de ce que nous avons vécu
... ! La régression des partis traditionnels, la rapide mise à
l'écart de la menace frontiste, la multiplication des reniements, la
précipitation des politiciens allant à la soupe, la renaissance
immédiate de l'autoritarisme présidentiel, l'entente sans état
d'âme des divers tenants du néo-libéralisme, la satisfaction non
masquée du patronat, la marginalisation annoncée des syndicats
placés devant le fait accompli des ordonnances, l'impossibilité de
nettoyer les écuries d'Augias fréquentées par trop d'habiles
professionnels de la politique (de Fillon à Ferrand et en passant
par d'autres...), la réaction citoyenne (que ce soit par abstention
ou votes blancs) de tous les refusants d'un mode de scrutin
malhonnête. Nous devrons, bientôt, dresser la liste, plus complète
encore, des reculs et des agressions commis par le gouvernement à
peine installé. Pour notre part, nous tenons à prendre nos
distances avec une équipe dont les premiers actes nous scandalisent.
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