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vendredi 9 juin 2017

Les clarifications viennent-elles trop tard ?


Les législatives, inséparables des présidentielles


Le point au 8 juin 2017. Note 74 à J-3 et J-10.
par Jean-Pierre Dacheux


Nous continuons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux notes antérieures, datées, numérotées et modifiables, s'ajouteront les suivantes jusqu'au 18 juin. La lecture complète du résultat des présidentielles ne s'effectuera qu'après les législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer cette activité politique chronologique.


Oui , la clarification est... « en marche », mais nombre de citoyens vont, pourtant, être dupés.
Cette clarification touche plusieurs domaines et donc, en fait, il est plusieurs clarifications !

1 - On est loin du « et à gauche et à droite ».
On est entré franchement dans le : « et à droite et à droite ».
Cette clarification a commencé parce que les politiques annoncées et la façon de les faire passer sont signées du Président « jupitérien » lui-même. Jupiter (Zeus en grec) prit la forme d'un cygne beau et doux pour séduire Léda. Emmanuel Macron séduit aussi et nous sommes bien, avec lui, en pleine mythologie : on veut nous faire accroire que la politique va cesser d'être l'affaire des politiciens. Quelle illusion !
Les élections législatives risquent d'avaliser cette grande manœuvre et le jeune Président, véritable apprenti sorcier va dresser le pays contre lui, demain ou plus tard. En s'enfermant, et en nous enfermant avec lui, dans la Vème République, il deviendra obsolète autant que le sont les institutions françaises, faites pour la droite, quels que soient les partis soutenant le Président.

Première clarification donc : la politique néo-libérale du président est bien une politique de droite et tous ceux qui l'approuvent, ou la mettent en œuvre quel que soit leur passé, (de Bayrou à Hulot et d'autres avec eux), ont muté et sont, de facto, à présent, au service des « maîtres de la finance », comme disait l'ex-président.

2 – Il n'y a plus, de gauche véritable pouvant, par le poids de ses partis traditionnels, faire basculer la France hors du piège néolibéral.

Le vieux Parti Radical de Gauche (le PRG) s'est « déradicalisé » depuis des lustres. Il a quitté l'ex-gauche depuis fort longtemps. Son unique objectif est de maintenir en vie quelques élus du sud-Ouest. Pour cela il lui fallait coller au PS. À présent, réaliste, il s'est déjà mis « en marche » vers Emmanuel Macron. À preuve, Sylvia Pinel sur Facebook : « Je souhaite remercier Emmanuel Macron et la République En Marche qui ont décidé de soutenir ma candidature dans la 2ème circonscription (du Tarn et Garonne) en ne présentant pas de candidat face à moi. Il m'appartient désormais de rassembler toutes celles et tous ceux qui souhaitent donner une large majorité au nouveau Président de la République ». Exit le PRG ; il est politiquement mort.

Le Parti socialiste (le PS) a explosé en vol et s'est fractionné en trois, au moins : les ralliés à Macron passés à droite sans vergogne (tel ManuelValls), les attentistes qui gardent la boutique pour le cas où l'on pourrait s'en resservir (tel Jean-Christophe Cambadélis), les rebelles enfin, (tel Benoît Hamon) dont certains, ex-« Frondeurs », s'évertuent à garder en vie un parti qui resterait socialiste. À quoi s'ajoutent les entêtées (telles Martine Aubry et Anne Hidalgo) qui veulent reconstruire une force politique depuis leurs bastions, à Lille ou à Paris. Trop tard, le PS s'est auto-détruit. S'il se refonde jamais, ce sera dans bien longtemps, sur les bases socio-écologiques proposées par Benoît Hamon. Exit, à court terme, le PS. François Hollande l'a déconsidéré.

Le Parti communiste (le PCF), en survie depuis la fin de l'URSS, ne tient que par l'énergie, l'implantation et la compétence de ceux qui, par fidélité et intérêt, résistent encore. Il n'a pas tiré tous les enseignements de l'échec idéologique du communisme mondial, notamment en ce qui concerne la priorité écologique, le bouleversement du travail humain et la décentralisation démocratique ... Ce parti, d'élection en élection, fond, n'a plus les moyens de se refonder, et pourra, tout au plus, se re-fondre, un jour, au sein d'un ensemble politique anticapitaliste plus vaste à renommer. On en est très loin. Exit donc aussi le PCF.

Seconde clarification dès lors : face au néo-libéralisme conquérant, la gauche traditionnelle disparaît ou se miniaturise.

3 - Une gauche tout autre, populaire et massive, se cherche.
Elle ne s'est pas encore trouvée.
Jean-Luc Mélenchon a tenté de la faire émerger. Il n'a pas été loin d'y parvenir. Dans le cadre électoral existant, la tâche était trop difficile. La France insoumise existe certes, à présent, mais quelle sera son implantation législative ? Son seul mérite et son principal intérêt, c'est qu'elle seule peut incarner, à la fois, ce qui survit de la gauche de gauche et un programme l'attestant, non ambigu, connu et rendu public depuis des mois. Quand ce sursaut populaire va-t-il changer les rapports de forces, en France ? Bientôt ? Plus tard ? Jamais ? On ne peut le savoir aujourd'hui, de même qu'on ignore si une majorité présidentielle absolue peut surgir d'ici quelques jours et pour cinq ans sauf accident politique.

Troisième clarification, donc. À la veille des législatives, il n'est plus qu'une seule alternative politique : ou bien la France des privilégiés réunis et mis en marche derrière le Président de la droite reconstituée, ou bien la France populaire en quête d'elle-même qui ambitionne de reprendre et dépasser les acquis de la gauche en perdition et ne séparant plus jamais l'écologie et le social.

4 – On s'est trompé d'écologie !
Celle qui va s'imposer sortira de l'évolution planétaire, pas directement des urnes.
Un vote résulte et d'événements majeurs et des débats qu'ils provoquent. La démocratie n'est pas à l'origine de la transformation des sociétés mais, si elle ne l'accompagne pas, rien n'est acquis et la violence peut se redéployer. Les écologistes qui ont créé un parti, voisin des partis traditionnels de la gauche, mais seulement associé n'ont pu ni constituer une force politique dans le cadre institutionnel existant ni peser de façon significative sur les politiques publiques. Les voici, eux aussi en déroute. Ils se sont trompés d'écologie. Elle ne pouvait prendre cette forme de représentation partidaire. Ni sur le nucléaire, ni sur « la vie sobre », ni sur la démarchandisation de l'eau, ni sur l'agriculture biologique, ni sur le climat, ni sur l'Europe régionalisée et remède aux nationalismes etc … ils n'ont pu faire mieux que de faire entendre leur voix, aussitôt couverte par les tenants de l'économie de marché « croissantiste ». Le drame aura été qu'ils ont été (moins en Allemagne) placés dans l'obligation de rechercher des compromis qui masquaient ou déformaient leur message et les rendaient de moins en moins crédibles. L'alliance EELV-PS de Yannick Jadot et Benoît Hamon, ratée et catastrophique, a achevé de ruiner une tentative de donner corps à l'écologie au moyen d'accords entre appareils politiques. L'écologie n'est pas morte ; cette écologie l'est. Exit dans ces conditions, Europe-écologie-les-Verts (EELV). Le PS l'a blessée à mort. Le glissement se Daniel Cohn-Bendit et de Nicolas Hulot vers le néo-libéralisme macronien l'a achevée.
Et pourtant, la conscience des urgences planétaires principalement écologistes est plus vivante que jamais. Le lien entre l'économie et l'écologie est établi. Les initiatives citoyennes se multiplient. L'incompatibilité entre l'écologie et le capitalisme est admise par un nombre croissant d'êtres humains. L'épuisement des ressources énergétiques fossiles, dont l'uranium, est démontré. Le recueil, la distribution, le moindre coût des énergies renouvelables deviennent nécessaires et les savants, comme nombre d'entreprises, en sont convaincus. Bref ce que les politiciens aux ordres des puissances d'argent n'acceptent pas va se produire, sinon c'en est fait des possibilités de vivre sur Terre. Cette écologie réaliste, dont dépend la vie de tous et l'avenir de nos sociétés, n'est plus contestable, car puissants et misérables sont ensemble concernés par une mutation de civilisation que rien ne peut plus empêcher, sauf un suicide collectif économique ou militaire perpétré par ceux qui n'ont plus rien à perdre (« le 1% des favorisés qui ne vivent que pour leurs profits).

Quatrième clarification, enfin : même si l'écolo-socialisme a pour lui l'avenir, à moins d'une surprise supplémentaire, dont nous nous réjouirions, il n'est pas encore prêt, en France, à accéder au présent.

Ce constat sans concession ne saurait nous désespérer. Certes, il nous projette au-delà d'élections dont nous n'avons pas encore abordé le premier tour. Mais la politique n'est ni dans une paire de dés, ni dans un jeu de cartes, ni dans les lignes de la main. Il serait vain de compter sur le hasard et la chance. Même si surgit l'inattendu, il aura une source sociale dont il faudra comprendre l'émergence. Tout a été bouleversé mais rien ne sera totalement joué le 18 juin au soir.

Que d'enseignements, pourtant à retirer déjà de ce que nous avons vécu ... ! La régression des partis traditionnels, la rapide mise à l'écart de la menace frontiste, la multiplication des reniements, la précipitation des politiciens allant à la soupe, la renaissance immédiate de l'autoritarisme présidentiel, l'entente sans état d'âme des divers tenants du néo-libéralisme, la satisfaction non masquée du patronat, la marginalisation annoncée des syndicats placés devant le fait accompli des ordonnances, l'impossibilité de nettoyer les écuries d'Augias fréquentées par trop d'habiles professionnels de la politique (de Fillon à Ferrand et en passant par d'autres...), la réaction citoyenne (que ce soit par abstention ou votes blancs) de tous les refusants d'un mode de scrutin malhonnête. Nous devrons, bientôt, dresser la liste, plus complète encore, des reculs et des agressions commis par le gouvernement à peine installé. Pour notre part, nous tenons à prendre nos distances avec une équipe dont les premiers actes nous scandalisent.


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