Les
législatives, inséparables des présidentielles
Le
point au 9 juin 2017. Note 75 à J-2 et J-9.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
continuons d'analyser l'évolution de la situation politique. Aux
notes antérieures, datées, numérotées et modifiables,
s'ajouteront les suivantes jusqu'au 18 juin. La lecture complète du
résultat des présidentielles ne s'effectuera qu'après les
législatives. Fin juin 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
Nous
ne voulions pas ça : un présidentialisme accentué,
autoritaire, disposant de tous les pouvoirs et c'est pourtant ce qui
risque de se produire!
1-
Une majorité absolue pour le « président jupitérien » ?
Ce
que voulait Theresa May, Première ministre du Royaume-Uni et chef du
Parti conservateur, (disposer d'une majorité absolue et renforcée),
les électeurs britanniques ne le lui ont pas accordé. Emmanuel
Macron va-t-il l'obtenir ?
La
question est fondamentale : la démocratie univoque n'est plus
la démocratie, or, à en croire les sondages, un raz de marée
pourrait pousser de nombreux députés de la République en marche
vers l'entrée de l'Assemblée nationale. Faute de proportionnelle,
un nouveau parti de godillots, comme l'on disait sous De Gaulle,
pourrait alors se mettre aux ordres de l'Élysée. Le moindre mal
serait qu'en France, comme au Royaume-Uni, la majorité absolue ne
soit pas atteinte par un seul parti entouré de quelques ralliés
devenus des mouches du coche. Notre ami et conseiller politique
« dégagiste », La Fontaine avait déjà décrit cette
situation :
« Ainsi
certaines gens, faisant les empressés,
S'introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés ».
La Fontaine, Le coche et la mouche, livre VII, fable 9.
S'introduisent dans les affaires :
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés ».
La Fontaine, Le coche et la mouche, livre VII, fable 9.
Car,
sans formation politique, sortis, le plus souvent, de « la
société civile » (comprendre des cadres du privé), les
nouveaux députés « macroniens » mettront du temps avant
de s'autonomiser, s'ils y parviennent, car, une fois formatés, ils
seront dépendants de leur chef, comme le veulent les institutions
françaises.
Les
députés qui, selon cette hypothèse, vont survivre et siéger au
Parlement seraient réduits à la portion congrue (comprendre :
« qui n'ont obtenu
qu'un strict minimum, dans un partage inégal » ? Le Front
National pourrait n'avoir pas même assez de parlementaires pour
constituer un groupe ! On peut s'en satisfaire, mais voilà qui
est fort dangereux, car on donne ainsi un fort argument démocratique
à un parti non démocratique. Les Républicains vont aussi voir
fondre leurs effectifs ramenés au regroupement de ses personnalités
les mieux implantées. Les socialistes qui dominaient encore, au
cours de la précédente législature, sont menacés de subir une
véritable Bérézina. Quant aux candidats de La France
insoumise, dont on ignore de
quel poids ils vont peser, ils devront accepter, de toute façon, de
voir leurs ambitions ramenées à la baisse. Par conséquent, les
trois oppositions principales (FN, Républicains
et France insoumise),
que rien ne peut rapprocher, seront juxtaposées et probablement
impuissantes, durant les cinq années à venir.
2
– La politique que le nouveau gouvernement a déjà engagée va
multiplier les oppositions.
Le
président va vite, probablement trop vite. Il pense qu'il a ruiné
toutes les oppositions et croit avoir les mains libres. Tout ne se
passe pas à l'Élysée et à l'Assemblée nationale. Les
résistances, dans le pays, seront multiples. Il faudra déchanter.
Les surprenantes contradictions qui apparaissent déjà et,
notamment, les affaires nouvelles dont la majorité se serait bien
passée (de celle touchant Richard Ferrand à celles qui affectent le
Modem), prouvent seulement que les manipulations d'argent concernent
presque tous les partis.
Le
dégoût qui s'empare des citoyens pourrait bien relancer les
abstentions et même le recours au vote blanc, (une
abstention record qui, selon un sondage Odoxa, publié ce jour,
vendredi, pourrait atteindre 48%, soit le pire score enregistré
depuis 1958 !). L'abstention est désormais une opposition, ne
l'oublions pas. Voici que surgit encore une de ces incertitudes qui
n'ont pas manqué au cours de cette longue période électorale qui
va s'achever dans une semaine. Toutefois, il est à craindre que ce
soit parmi les plus jeunes et dans les milieux populaires que l'on se
détourne, en tout cas au premier tour, de ce scrutin confus (trop de
candidats) et privé de suspens (à cause du mode de scrutin, une
fois encore, et du fait du matraquage des médias). La famille
politique qui s'abstiendrait le moins, pourrait, alors, curieusement,
tirer son épingle du jeu. Devinez laquelle ...
Les
oppositions vont mal , « à droite et à gauche ». Celles
de droites vont ou bien se réduire encore (notamment celles qu'ont
représentés François Fillon et Marine Le Pen) ou tenter de trouver
leur salut en se présidentialisant. Celles de gauche ont besoin de
temps pour se reconstituer. On ne parle déjà plus des
ex-socialistes macroniens ; ils sont engloutis. Comme nous
l'avons déjà analysé, les socio-écologistes ont à se rapprocher
et à dépasser le concept de gauche devenu trop flou, trop usé par
les compromissions, trop vidé de sa signification originelle.
Les
néo-libéraux se sont trouvé un porte-parole qui leur convient et
qui peut donner un visage plus avenant au capitalisme. Face à ce
rassemblement des nantis, il n'est qu'une opposition efficace
possible, celle qui élimine aussi ses vieilleries et ses
contradictions et qui, à tout ce que la gauche historique a fourni
comme repères toujours utiles et visibles, il convient d'ajouter son
indissociable complément écologique qui « planétarise »
nos approches d'un monde que nous voulons délivrer de la dictature
de l'argent.
Cette
espérance me conduira encore vers un bureau de vote, sans illusion.
Comme Sanders, comme Corbyn soutenus, eux, par les plus jeunes
des citoyens et qui, en dépit des campagnes de dénigrement qu'ils
ont subies, n'ont pas renoncé à proposer un avenir qui n'oublie
personne et donc anticapitaliste, il faut résister et oser parler
haut.
À
deux jours d'un scrutin truqué mais dont le résultat va, qu'on le
veuille ou non, modifier notre quotidien, je trouve chez nos voisins
britanniques, comme ce fut le cas en Autriche ou aux Pays-Bas des
raisons nouvelles de penser que « ceux qui vivent ce sont ceux
qui luttent » comme l'écrivit le vieil Hugo. Avec ou sans
Mélenchon, me voici insoumis.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
N'hésitez pas à poster un commentaire.