Un
deuxième temps intermédiaire et décisif .
Le point
au 10 mars 2017.
par
Jean-Pierre Dacheux
Nous
voulons, au cours des mois qui vont continuer de s'écouler,
analyser l'évolution de la situation politique pendant la campagne
électorale qui s'est ouverte depuis la fin 2016. Chaque texte,
daté, numéroté et modifiable, s'ajoute aux précédents
présentés sous le même titre : « Avec ou sans primaires »,
puis, à présent, « un deuxième temps, intermédiaire et
décisif » (qui durera jusqu'au 17 mars, date de clôture des
candidatures). Il peut être contredit, sans doute, parfois, par les
événements. Fin mai 2017, nous regrouperons, en un seul et même
document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour effectuer
cette activité politique chronologique.
1
- Le troisième et dernier temps de la campagne présidentielle
approche.
Restent deux
jours ( les 14 et 17 mars), au Conseil Constitutionnel, pour publier
la liste des candidats « agréés » pour être,
officiellement, candidats à la présidence de la République.
Nous
saurons, ce vendredi 10 mars, quels sont ceux qui ont, d'ores et
déjà, dépassé le seuil des 500 parrainages requis pour se
présenter à l'élection présidentielle. Rappelons que les
nouvelles règles de parrainages imposent aussi,
désormais, aux candidats de récolter les signatures d'élus
d'au moins 30 départements ou collectivités d'Outre-mer différents,
sans que plus de 10% d'entre elles n'émanent d'un même département.
Certains, qui croient être parvenus à destination, seront
peut-être, à la fin, déçus...
Il
en est un qui navigue à vue et ne renonce à rien : c'est
François Hollande pour qui ont été récoltés déjà les 500
parrainages nécessaires « au cas où ». On ne nous dit
pas d'où est partie l'initiative et qui la coordonne car cela ne
s'improvise pas. L'Élysée se défend de toute manipulation de ce
genre et il n'y aura pas de plan R (de recours) avant le 17 mars
soutient-on. On veut bien le croire...
On
a trop peu observé que le PCF détient une partie des dossiers
nécessaires à Jean-Luc Mélenchon pour franchir, largement cette
barre des 500 parrainages ! Ce n'était donc pas encore fait, à
ce jour, avant publication, à 18 heures ! Faux suspense ou
hésitation politique de la part d'un parti qui ne sait encore où
est son intérêt pour avoir le maximum de candidatures aux
législatives (avec Mélenchon ou avec Hamon ? Paul Laurent n'a
encore parrainé personne ! L'épisode est peu glorieux...
2
– L'élection est une conséquence pas une cause de l'évolution
politique de la France.
Si
nous examinons, attentivement le déroulement de cette campagne
électorale hors normes, jamais vue, chargée de surprises, nous ne
sommes pas, cependant fascinés par son contenu.
Non
seulement le débat véritable entre les candidats aura été retardé
par « l'affaire Fillon » non encore résolue, mais tout
se passe comme si des questions politiques essentielles devaient
n'être pas posées à commencer par les suivantes qui intéressent
pourtant la majorité des électeurs :
•
La Cinquième République a-t-elle fait son temps et, si oui, comment
en sortir ? Il ne suffit plus de le souhaiter, il faut indiquer
les voies et moyens de rendre un tel projet possible.
•
L'élection du Président de la République au suffrage universel et,
surtout, l'étendue de ses pouvoirs formels, sont-ils toujours
adaptés à la réalité contemporaine de la vie démocratique en
France ? Le dernier quinquennat aura été l'illustration d'une
autorité illusoire doublée d'une impuissance complice.
•
Le Parlement et notamment l'Assemblée nationale (presque plus que le
Sénat !) ne peut-il qu'être « à la botte » du
Président si les députés sont élus au suffrage majoritaire à
deux tours ? Comment, rapidement, passer au mode de scrutin
proportionnel, pas seulement pour que davantage de sensibilités
politiques soient représentées, mais surtout pour que le Parlement
soit le reflet très approché de la diversité du corps électoral.
•
La participation des citoyens à la vie politique du pays doit-elle
être limitée au temps, trop bref, des élections nationales ?
Les essais qui s'effectuent dans d'autres États, quand ils sont des
réussites, devraient être pris en considération, étudiés,
exploités. Qui y songe ?
Il
est bien d'autres questions importantes et urgentes qui méritent
d'être débattues et tranchées mais les précédentes, ci-dessus,
qui sont constitutionnelles, constituent des préalables parce
quelles verrouillent la vie politique en la confiant à des
professionnels qui, pour le plus grand nombre, ne veulent rien
changer parce qu'ils n'y ont pas intérêt ou parce qu'ils ne savent
pas, ou plus, penser dans un autre cadre.
Il
est à craindre, par conséquent, que l'élection à venir jugule, au
lieu de l'activer, la volonté populaire. Les candidats qui ont
entrebâillé la porte de la révision constitutionnelle (tels
Mélenchon ou Hamon) risquent de se la faire claquer sur les doigts
car les partis traditionnels (le PS et les Républicains en tête)
appuyés sur des médias aux ordres de leurs grands patrons, ne
veulent pas entendre parler de changements aussi décisifs.
3-
Tout n'est heureusement pas maîtrisable et de l'incertain peut
surgir l'événement.
Tout
était réglé : les primaires devaient servir de caution
démocratique au choix des partis mais rien ne s'est passé comme
prévu. À droite, Fillon l'a emporté (avec l'aide, précieuse, de
« Sens Commun » ?) et pas Sarkozy ou Juppé. À
« gauche », contre toute attente, c'est Hamon qui l'a
emporté et pas Valls (au grand dépit des caciques du PS et de
certains ministres - en sursis pour quelques semaines encore -
proches de François Hollande).
Pour
les candidats actuellement les plus en vue, tout se complexifie et
rien n'est évident :
François
Fillon, malmené par le Pénélope-Gate n'a plus, devant lui, le
boulevard qui lui était ouvert.
Marine
Le Pen, qui caracolait en-tête des sondages est rattrapée, à son
tour, par une question de financement d'assistants parlementaires
(européens dans son cas) qui n'est plus passée sous silence.
Emmanuel
Macron, n'est plus intouchable. Il est soutenu par trop de
personnalités de droite pour continuer à pouvoir se présenter
comme « et à droite et et à gauche ». Il est, lui
aussi, l'un des candidats acceptables par ceux qui tiennent les
cordons de la Bourse. Il dispose pourtant encore de deux atouts
majeurs : il a quitté le gouvernement Hollande-Valls honni et
est resté libre par rapport au PS, d'une part, mais surtout, il
serait à même de battre, aisément, la candidate du FN et il lui
suffit d'accéder au deuxième tour, d'autre part.
Benoît
Hamon a tous ses parrainages mais les « grosses pointures »
du PS l'abandonnent, soit en fuyant chez Macron, soit en le
dénigrant. Pour l'emporter, il va lui falloir jouer, lui aussi, le
peuple contre son parti ! Le peut-il ? Le désire-t-il ?
Ne joue-t-il pas l'après présidentielles et la prise du pouvoir au
sein du PS ? Des comptes seront, de toutes façons à régler,
dès mai 2017, rue de Solférino.
Jean-Luc
Mélenchon, en dépit d'un longue, dynamique et talentueuse campagne
n'est toujours qu'en cinquième position dans les sondages, bien que
toujours et parfois nettement au-dessus des 10% et proche de Benoît
Hamon. S'il ne perce pas dès l'ouverture de la campagne officielle,
- car il n'a guère été, jusqu'ici, relayé par les médias -, il
restera irréversiblement distancé. La manifestation de soutien
prévue le 18 mars, qui devrait être réussie, n'y pourra suffire.
Ce
qui ne s'est pas encore manifesté, c'est tout ce que les sondages ne
peuvent prévoir et, dans une opinion flottante, les marges d'erreur
sont importantes. L'abstention peut perturber les résultats mais ce
serait une première lors d'une l'élection présidentielle !
Les nouveaux candidats et les soutiens des candidats éliminés
peuvent aussi peser sur la suite de la campagne. Ce qui s'est passé
avec les primaires peut se reproduire voire s'accentuer. Les
questions mises sous le boisseau (L'Europe, le nucléaire militaire,
les menaces écologiques - pollutions, bouleversements climatiques,
perte dramatique de la biodiversité-) peuvent encore faire bouger de
larges secteurs de l'opinion. Le vote des nouveaux électeurs, les
plus jeunes, plusieurs centaines de milliers, n'est pas entièrement
prévisible. Ne se sont pas encore fait fortement entendre, les voix
de personnalités qui comptent (de Nicolas Hulot à Hubert Reeves, en
passant par Pierre Rhabi, Edgar Morin, Michel Serres, Alain Touraine,
ou d'autres encore qui, tous, nous invitent depuis longtemps, à
effectuer le passage de la mutation de civilisation).
Même
si l'on ne fait pas pousser les fleurs en tirant dessus, il n'est pas
insensé d'attendre un printemps pour la France ! Printemps en
2017 ? En 2018, ou plus tard encore ? La date aussi est
imprévisible et le printemps politique ne correspond pas souvent au
printemps saisonnier. Pourtant, quand le fruit sera mûr, il sera
cueilli et aucun n'y pourra goûter au sein de la bande des quatre :
FN, « Républicains » PS et consorts tel « En
marche ». Il est sûr que la fin d'un processus s'est enclenché
mais il est tout aussi sûr que le personnel politique impliqué y
résiste farouchement. On disait, il y a quelques semaines, que les
Français veulent changer de changement puisque le changement annoncé
n'a jamais eu lieu. C'est, à présent, dans les jours à venir que
l'on va apercevoir quel chemin jamais encore parcouru il reste
possible de prendre dès avant le 23 avril, au soir du 23 avril ou
après le 7 mai.
La
seule certitude (inconfortable) c'est qu'il faut refonder la
République alors que, ne sachant comment faire, on s'est résigné à
garder ce qui ne peut plus être conservé. D'où l'intérêt, au
cours de la période sensible de la préparation de l'élection
encore majeure dans notre « système » politique, de
prêter la plus vive attention à tout ce qui est en cours de
transformation.
Nouveau
souci donc pour l'auteur de ces notes d'auscultation de la campagne
et de ce qu'elle révèle : il faut non seulement quitter le
poste d'observateur et « prendre parti hors partis »,
il faut désormais, en plus, oser lire et interpréter ce qui se
dégage de l'apparente confusion, pourtant riche d'enseignements,
qui domine la société française depuis l'entrée en pré-campagne.
Nous
entrons dans une période difficile de préconisations risquées car
ranimer la démocratie ne se fera pas sans prise de risques
intellectuels et citoyens. Nous ne nous déroberons pas.
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