Le
troisième et dernier temps d'une campagne à surprises
Le point
au 20 mars 2017. Note 28 à J-34
par Jean-Pierre Dacheux
Nous
voulons continuer d'analyser l'évolution de la situation politique
pendant la campagne électorale ouverte, en réalité, depuis la fin
2016. Chaque texte, daté, numéroté et modifiable, s'ajoute aux
précédents présentés et, depuis le 20 mars, sous le titre : «
Le troisième et dernier temps d'une campagne à surprises »
Chacun de ces textes peut être contredit, sans doute, parfois, par
les événements. Fin mai 2017, nous regrouperons, en un seul et
même document, toutes ces notes, que nous voudrions utiles pour
effectuer cette activité politique chronologique.
1 - Des candidats inégaux.
Nous voici entrés dans
le vif du sujet. Nous connaissons les noms des 11 candidats
qualifiés. Ils vont entrer dans une fausse compétition puisqu'ils
ne sont pas à égalité. La preuve en est, le premier débat
organisé, sur TF1, ce jour, ne concernera que 5 de ces candidats,
ceux que les sondages placent au-dessus de la barre des 10%. On veut
bien croire qu'il serait insipide, non informatif et donc sans
intérêt majeur, pour les téléspectateurs, que de juxtaposer les
pupitres de onze débatteurs et de faire entendre des propos
nécessairement trop brefs et donc sans confrontation réelle. Il
n'en reste pas moins que si la forme ne doit pas tuer le fond, elle
ne doit pas non plus enlever leurs maigres chances aux « petits
candidats » (notamment ceux qui n'ont pu s'exprimer encore).
C'est pourquoi Nicolas
Dupont-Aignan proteste et porte plainte. Il n'a pas tort ! Mais
que devrait dire, alors, chacun des derniers entrants dans la
compétition, (tels, parmi les tout récents arrivés, le député
Jean Lassalle ou le représentant du NPA, Philippe Poutou) ?
Théoriquement, l'équité voudrait qu'il n'y ait pas de candidats
principaux et de candidats secondaires, mais, en réalité, les
maîtres de l'information, eux-mêmes sous l'influence des grandes
fortunes, dirigent la compétition et en font un spectacle où plus
importe la prestation médiatique, que le contenu politique !
Donner l'apparence du changement sans rien changer demeure
l'orientation des « faiseurs de rois » (ou de
présidents).
2 – Des candidats
qui ont des intérêts communs, superposés à droite, mal assumés à
gauche.
Pour
tenter d'effectuer un classement de ces onze personnalités
politiques (2 femmes et 9 hommes) qui ont à faire connaître et à
valoriser leur candidature, je suis amené à les qualifier en
prenant le risque de prendre des critères politiques qui ne sont que
les miens. J'assume cette subjectivité. Voici, alphabétiquement
présentés, les 11 « postulants » :
1 –
Nathalie Arthaud ( Lutte Ouvrière »)
succède, elle, à Arlette Laguiller. C'est une candidate qui
assume, crânement son trotskisme et son ouvriérisme. 637
parrainages.
2 –
François Asselineau (« Union populaire républicaine »)
incarne, jusqu'à la caricature, souverainisme et libéralisme, mais
aussi l'une des droites qui ne veut ni de l'Europe ni l'euro... 587
parrainages.
3
– Jacques Cheminade (« Solidarité
et Progrès »)
semble devenu un spécialiste de la compétition présidentielle. (Il
est candidat pour la troisième fois). Il prône la sortie de
l’Union européenne, de l'OTAN, de la zone euro et le retour au
franc. 528
parrainages.
4 –
Nicolas Dupont-Aignan (« Debout
la France ») est
aussi un candidat souverainiste. C'est un tenant de la droite rigide,
antieuropéenne et nationaliste. Il a traversé les droites dont il
fut l'élu avant de voler de ses propres aile car il dispose d'une
forte implantation locale de député et de maire sur laquelle il
s'appuie. 707 parrainages.
5 –
François Fillon (« Les Républicains ») est,
depuis la primaire de la droite, le candidat de la droite dure et
décomplexée, celle des riches. L'élection lui semblait acquise.
Les affaires lui auront porté préjudice et l'ont fait reculer dans
les sondages. Tout, pour lui, semble à refaire... 3635
parrainages.
6 –
Benoît Hamon (« Parti socialiste ») est le
candidat-surprise qui l'a emporté dans une primaire qui n'avait pas
été prévue pour lui. Il n'a pas l'aval de nombre de responsables
et d'élus de son parti. C'est, après l'échec du quinquennat
Hollande, sa faiblesse mais aussi sa force ! Il a été rejoint
par Yannick Jadot, qui a retiré sa candidature afin de faire
progresser encore la thématique écologiste très présente dans le
programme de Benoît Hamon. Ce « Frondeur frondé » (par
des ministres « hollandais » sortants et des
parlementaires dont certains fuient déjà vers Macron) va-t-il se
libérer de l'image très négative que porte, actuellement, le parti
socialiste ? Tel est pour lui l'enjeu principal. 2039
parrainages.
7 –
Jean Lassalle (« Résistons ! ») est un
centriste libre, inclassable, hors parti, dont le courage,
l'originalité et l'honnêteté sont reconnus. Une question se pose :
combien d'électeurs proches de François Bayrou pourraient se
rabattre sur lui ? 708
parrainages.
8 –
Marine le Pen (« Front National ») est la
candidate d'un néo-fascisme apparemment soft, de l'hypernationalisme
et des discriminations. Restera-t-elle en tête des sondages ?
Rien n'est joué. La montée de l'extrême droite en Europe n'a rien
d'inéluctable, comme on l'a vu en Autriche et tout récemment, aux
Pays-Bas. 627
parrainages.
9 –
Emanuel Macron (« En Marche ! »), occupe une
place, actuellement très avantageuse, qui n'est pas due à ses seuls
talents : il constitue, entre la droite modérée et la gauche
droitisée, un trait d'union politique. Mais cette ambiguïté le
servira-t-elle longtemps et durera-t-elle... ? 1829
parrainages.
10 –
Jean-Luc Mélenchon (« la France insoumise »),
hors parti, est le leader talentueux de forces politiques qui
cherchent la rénovation de la gauche par la voie socialo-écologiste
et la fin de la Ve République. Proche en idées de Benoît Hamon,
il en diffère sur la refondation de l'Europe et sur la prise de
distance, -selon lui un préalable indispensable-, avec les ministres
associés à l'échec de François Hollande (de Manuel Valls à
Myriam El Khomri). Ou bien il vise plus loin et plus haut que l'accès
à l'Élysée ou bien il fait alliance, fut-ce tardivement, avec
Hamon afin de l'emporter. La réponse tombera courant avril. 805
parrainages.
11 –
Philippe Poutou (« Nouveau Parti anticapitaliste »)
est le successeur d'Olivier Besancenot et, une nouvelle fois, il est
le porte-parole du NPA. 573
parrainages.
On observe, en
découvrant cette liste officielle, que nombreux sont les candidats
souverainistes et hostiles non seulement à l'Union européenne mais
à la perspective d'une Europe politique elle-même. Cela pourrait
effriter les scores des candidats Le Pen et Fillon.
On peut aussi remarquer
que ce qui fut la gauche, toutes nuances confondues, dispose de
quatre candidats qui, éventuellement rapprochés, lors du second
tour, pèseraient lourd dans un scrutin qui verra, vraisemblablement,
les écarts entre les candidats se réduire fortement au fur et à
mesure que les prises de parole des plus éloquents vont se succéder.
3 – Une campagne
politique, dès qu'elle parvient à ouvrir le débat, reste
inattendue.
Douze
ans après le référendum de 2005 qui avait donné un résultat sans
ambiguïté, mais refusé par les formations qui n'avaient pas cessé
de confisquer ou détourner les choix politiques des Français
(c'est-à-dire, à l'époque, l'UMP et le PS), nous sommes parvenus à
un tournant dans l'histoire du pays : il va falloir solder la
trahison de ceux qui voulaient une Europe commerciale plutôt qu'une
Europe des peuples - et qui nous ont conduit vers un désamour
profond à l'égard de l'Union européenne -. Si ce tournant n'est
pas pris, alors l'avenir va se boucher pour longtemps.
Comme
en 2005, il faut libérer la parole, examiner les propositions qui
sont faites, multiplier les débats publics, ne pas se fier aux
médias qui entendent donner les résultats bien avant l'l'heure,
garder l'esprit critique face aux sondages qui, souvent, formatent
l'opinion au lieu de l'éclairer. Bref, le moment est venu d'exercer
notre vigilance et notre discernement. Tout n'est pas dit et moins
encore écrit. Il faudra bien sortir d'une impasse où la démocratie
elle-même a été conduite et confinée ? Les élections
présidentielles et plus encore peut-être les élections
législatives, contre toute attente et en dépit des verrouillages
institutionnels, peuvent décadenasser la France. La campagne compte
autant que son résultat.
Ni la
candidate du FN que le second tour laminera, ni la droite
traditionnelle qui, en confiant son sort à Fillon, a perdu son
crédit, ni le PS, déconsidéré tout au long du quinquennat, et qui
achèvera de se suicider s'il laisse désavouer son propre candidat,
ni Macron qui peut difficilement mettre ensemble « en marche »
ceux qui ne vont pas dans la même direction, ne devraient, dans ces
conditions, à terme, l'emporter. Si, cependant, l'un d'eux triomphe,
il lui restera à trouver une majorité pour gouverner sans accroc,
en juin prochain. Ce qui est loin d'être acquis !
Nous
allons au devant d'un désordre obligé mais qu'il ne faut pas
craindre. À ce jour, il manque encore des éléments pour construire
une solution alternative. Penser hors des cadres connus et installés
est certes imprudent, voire insensé. Pourtant, à moins de se
résigner et de se laisser conduire, comme les moutons de Panurge,
vers un avenir préparé par et pour les maîtres de l'économie, il
faut oser tenter l'inédit. Nous voudrions entrer plus avant dans ce
débat citoyen, qui nous concerne tous, dès les prochains jours.
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