Donald
Trump est définitivement élu. Le 19 décembre 2016, les 538 membres
du Congrès, élus dans les États, se sont réunis, et ont voté
pour désigner le Président des USA. Il fallait obtenir au moins 270
voix pour l'emporter. Donald Trump en a recueilli 304, contre 224 à
Hillary Clinton, soit 80 de plus.
La
candidate démocrate a eu beau devancer le candidat républicain de
plus de 2,8 millions de suffrages (du jamais vu !), le vote populaire
au premier degré, ne peut, selon la Constitution US, l'emporter sur
le vote au second degré, celui des délégués ou « Grands
électeurs »1.
Et aucune force politique suffisante ne se mobilise pour le
contester !
C'est,
pourtant, la première fois, dans l'histoire des États Unis, que
surgit un aussi vaste écart de voix entre les deux principaux
candidats. Cela donne à réfléchir et inviterait à réformer le
mode de scrutin. Rien n'y fait pourtant. La règle instituée, il y a
de très nombreuses années, reste intangible.
La
dernière fois où cas semblable s'était produit, en l'an 2000,
quand, pour le malheur du monde entier, George W. Bush, le
va-t-en-guerre, fut préféré à Al Gore, l'écart entre les
candidats n'avait été que de 300 000 suffrages environ.
Donald Trump sera donc le
cinquième candidat à la présidence à être élu tout en étant
minoritaire en voix. Il sera aussi, à 72 ans, le plus âgé de tous
les présidents entrés à la Maison Blanche.
Quels
principaux enseignements retirer de cet épisode politique majeur que
les médias de tous pays ont popularisé à une très grande échelle
et suivi durant des mois ?
•
D'abord, et avant tout, c'est que les règles de fonctionnement
électoral ne sont pas universelles et diffèrent profondément selon
les pays qui s'affirment pourtant démocratiques ?
•
Ensuite, c'est que la loi non écrite qui, pense-t-on trop souvent,
devrait faire consensus (« un électeur = une voix »)
peut être très légalement violée.
•
En troisième lieu, on constate que le peuple pèse moins lourd que
les élites qu'il désigne et cela ne vaut pas qu'outre Atlantique !
Le mode de scrutin majoritaire à deux tours, en France, est, à cet
égard, particulièrement critiquable et, du reste, rarement utilisé
dans le reste du monde (sauf, peut-être, là où notre empreinte
coloniale perdure).
•
Il est possible, aux USA, d'être un « président
minoritaire »2,
un président « relatif ».
•
De plus, les Constitutions, fussent-elles obsolètes, sont très
difficilement amendables et, ainsi, au nom de traditions respectables
sans doute, historiquement, mais nullement valides à jamais, les
conservateurs possèdent un avantage indiscutable, (les deux
derniers « mal élus », Bush et Trump, sont, l'un et
l'autre, des Républicains).
•
Les « primaires »3,
telles qu'elles sont pratiquées aux USA, (mais aussi en France),
n'ajoutent que de l'ambiguïté et de la nocivité à la qualité
démocratique de l'élection présidentielle et contribuent à
filtrer et éliminer les candidats qui mettent en cause le bipartisme
étatsunien : Républicains/Démocrates, (mais aussi en France,
de fait, Républicains et sociodémocrates).
•
La démocratie, une fois encore, s'exprime mal dans les urnes. Nous
ne sommes plus au XVIIIème siècle ( La Constitution des États Unis
date du 17 septembre 1787 et s'applique depuis le 4 mars 1789) !
Les conditions de la consultation des citoyens se sont depuis
modifiées en profondeur. L'élection n'est sans doute plus le
meilleur moyen de connaître la volonté populaire comme nombre
de chercheurs et politologues le découvrent et l'exposent.4
1 Voir
l'excellente, la très documentée, et pourtant fort contradictoire
analyse du mode d'élection présidentielle aux USA, écrite avant
le 8/11/2016, et signée par Claude
Joseph (sa conclusion a été contredite par les faits, car, y
écrivait-il : « comme le Washington Post
l’a bien souligné, Trump avait presque zéro chance de gagner »
!)
2
Voir, de Coutant Arnaud, « Les Présidents minoritaires
aux États-Unis », Revue française de droit
constitutionnel, 2/2012 (n° 90), p. 35-55.
3 Alexis
Corbière, Le piège des primaires,
Paris, Le Cerf, septembre 2016, 5€.
4
Lire David Van Reybrouck :
https://www.fichier-pdf.fr/2014/04/20/david-van-reybrouck-contre-les-elections-2013/
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