Ce midi, lors d'une interview télévisée, avec beaucoup d'aplomb, un industriel français a encore annoncé comme une évidence que le coût de la main-d'oeuvre française était la plus chère de l'Union Européenne (UE).
Il
est particulièrement navrant d'entendre répéter cette
contrevérité, ce mensonge, cette manipulation qui fait son chemin
dans l'opinion publique et qui sert, grandement, les intérêts du
nouveau gouvernement lorsqu'il entend bouleverser le code du travail
et les relations salariés / patrons.
Voici
les statistiques comparatives fournies par le Conseil de l'Europe
arrêtées au premier trimestre 2017 :
Industrie
manufacturière
Le
classement est le suivant : Norvège, Danemark, Belgique, Suède,
Allemagne et France.
Industrie
et Service marchand
Le
classement est le suivant : Norvège, Danemark, Suède,
Belgique et France
Comme
on peut le constater, la France se situe en 6ème et 5ème
position, et si l'on calcule la moyenne des deux branches, elle est
alors en 6ème position derrière l'Allemagne, pays que
l'on montre souvent en exemple comme le bon élève de l'Europe.
Pour
aller plus loin, dans une Europe qui veut lutter contre le dumping
social, l'amplitude du coût horaire dans l'UE est de un - 3,98 € /
4,69 € - en Bulgarie à douze - 50,11 € / 53,48 € - en Norvège et
que 7 pays, tous issus de l'ex bloc de l'est, sont sous la barre des
10,00 € ou flirte avec elle pour la Croatie. Même s'il ne
faut pas oublier que le coût de la vie n'est pas le même dans les
deux pays, le fossé est énorme entre la Bulgarie et la Norvège.
Au
vu du traitement impitoyable qu'elle subit, le coût horaire de la
Grèce chute à 14,07 €, moins 19 % par rapport à 2008.
Ce
que l'on évoque beaucoup moins, c'est « le hold-up
tranquille »
de la valeur ajoutée : le coût des dividendes versés aux
actionnaires. De
2009 à 2014, ils ont
augmenté de 58% alors
que, dans la même période, et malgré l’envolée des très hauts
salaires (environ 13 000 salariés) le
salaire net médian stagne autour de 1730 €.
Selon
une étude de l'INSEE sur le partage de la valeur ajoutée, entre
1996 et 2006, les 0,1 % les mieux rémunérés ont vu leur salaire
mensuel brut progresser de 19 374 à 24 000 € soit un gain de 28
%, - plus 4626 € - alors que pour la plupart des 60 % des salariés les moins bien
payés, le gain n’a pas dépassé 130 €.
En
moyenne, le partage entre la rémunération du capital et le travail
est aujourd’hui en France de l’ordre de deux tiers pour les
salaires et un tiers pour le capital.
Une
mise en garde devrait, pourtant, alerter les pouvoirs publics :
« La part des profits
est inhabituellement élevée à présent et la part des salaires
inhabituellement basse. En fait, l’amplitude de cette évolution et
l’éventail des pays concernés n’a pas de précédent dans les
45 dernières années. » Cette
remarque provient d’un
article de la Bank for International Settlements - La Banque des
Règlements Internationaux. Ce sont les dirigeants de cette
institution qui dressent le constat suivant : « jamais
les bénéfices n’ont été aussi hauts, jamais les salaires n’ont
été aussi bas, un déséquilibre inédit depuis au moins un
demi-siècle, et vrai pour l’ensemble des pays industrialisés. »
Le
Fond Monétaire International rajoute que la part des salaires dans
le Produit Intérieur Brut a baissé de 5,8 % entre 1983 et 2006
et la Commission européenne confirme qu'au sein de l’Europe, cette
fois, la part des salaires a chuté en moyenne de 8,6 % et en
France de 9,3 %.
La
très grande disparité de la répartition des plus-value, les
importantes inégalités sociales et la stagnation des rémunérations
devraient commander au gouvernement d'avoir la sagesse de revoir les
politiques salariales dans l'esprit d'une redistribution plus juste.
Je
crains, malheureusement, de ne pas avoir compris que cela soit
l'objectif annoncé par le gouvernement Macron.
Jean-Claude VITRAN
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