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mercredi 4 octobre 2017

3 octobre 2017 - L'Etat de droit est mort.


Depuis plusieurs années, je m'évertuais à ouvrir les yeux de mes camarades sur la grave maladie que traversait notre démocratie française.

Après le vote massif des députés de l'Assemblée Nationale du 3 octobre 2017, je suis consterné de vous annoncer sa disparition.

En effet, une large majorité godillot aidés par les socialistes, que je croyais membres de ma famille, ont adopté le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme permettant de faire entrer l'état d'urgence dans le droit commun mais de faire sortir la France de l'Etat de droit.

Pour rappel, l'Etat de droit est celui qui protège tous les citoyens de l'arbitraire et qui les maintient à l'abri du césarisme administratif ou policier.

Nous ne sommes plus dans cette configuration car le nouveau texte de loi est attentatoire aux droits fondamentaux et aux libertés collectives et individuelles.

Nous sommes sortis de l'Etat de droit pour entrer dans un Etat d'exception permanent.

Désormais le pouvoir est concentrè dans les mains de l'exécutif : les préfets, l'administration, les polices, sous prétexte de terrorisme pourront n'importe quand, n’importe où et contre n'importe qui, mettre entrave à la liberté de circulation, de culte, pénétrer dans les domiciles, etc ... sans avoir à se justifier devant une juridiction. Sur de simples présomptions, sous des prétextes fallacieux, l'administration et son relai policier pourront s'en prendre à un individu, l'immobiliser, le mettre à l'écart. Si quelqu'un dérange le pouvoir - syndicaliste, journaliste, blogueur, écologiste, fonctionnaire, opposant ... - il sera relativement simple d'invoquer le terrorisme pour le bâillonner.

On peut, bien entendu, prétendre que mes propos sont exagérés, que la situation n'est pas si grave.

Regardons simplement ce que disait l'avocat François Sureau dans un entretien à Mediapart « il y a eu 6 000 perquisitions administratives pour 41 mises en examen. Et sur les 41 mises en examen, 20 sont des mises en examen pour apologie du terrorisme, c’est-à-dire des crimes d’ordre intellectuel. Au cours de ces 6 000 perquisitions, vous avez parfois bousillé la vie des gens, vous êtes intervenu dans leurs libertés individuelles de manière brutale pour un résultat extrême faible », et il faut aussi se souvenir de l'utilisation alibi de l'état d'urgence contre des écologistes lors de la COP21 et des manifestants contre la loi El Khomri.

Dans ses conditions une nouvelle loi est-elle utile ?

Non, mais le nouveau gouvernement justifie sa loi d'exception en affirmant que le système antérieur est insuffisant et inadapté à la lutte contre le terrorisme. Pourtant, tous les défenseurs des droits et tous les juristes ont montré que cette nouvelle loi n’était pas nécessaire car la France a l’une des législations antiterroristes les plus efficaces d’Europe.

Il y a eu plus de vingt législations en trente ans !

De plus, qui, aujourd'hui, peut prétendre que notre pays ne sera jamais dirigé par un pouvoir encore plus autoritaire.

Est-il utile de lui préparer le terrain ?

La Présidente de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) Christine Lazerges résume parfaitement cette problématique : « Si ce projet de loi est adopté et que l’extrême droite arrive un jour au pouvoir, la France sera dans une situation extrêmement difficile en matière de libertés. Un tel pouvoir n’aurait absolument rien à ajouter à ce texte.»

Il y a deux hypothèses à ce choix politique : le nouveau pouvoir cache ses vraies intentions qui seraient ancrées « très à droite » ou bien il manque d'un minimum de courage politique.

Même si c'est particulièrement navrant et préoccupant, restons sur la seconde hypothèse. Pour sortir, ce qui était nécessaire, de l'état d'urgence sans faire preuve de laxisme aux yeux d'une partie des Français qui croit à son efficacité, de la droite et de l’extrême droite, l'exécutif au lieu de faire preuve de pédagogie s'engouffre dans une nouvelle loi dans la tradition des justices d'exception à la française qui remet en cause l'Etat de droit et la démocratie.

Jean-Claude VITRAN


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