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lundi 1 décembre 2008

Citoyen, réveille toi!


Aristote

Il y a près de 2500 ans, Aristote a forgé pour qualifier la tendance d’un individu à rechercher le profit grâce et au travers des relations marchandes en usant d’un ensemble de ruses et de stratégies en vue de l’acquisition de richesses et de leur jouissance, le mot chrématistique.
A sa suite, les anciens Grecs, employaient le mot ubris ou hubris pour qualifier toute outrance dans le comportement, tout sentiment violent né de l'orgueil, et qui allait jusqu'au dépassement des limites, la démesure en quelque sorte.

Les événements qui ont conduit à la crise de civilisation que nous traversons actuellement sont caractérisés par ces deux mots, chrématistique : l’amour de la monnaie, de l’argent, la jouissance de la richesse, et ubris : la démesure. Ce sont elles qui sont la cause de l’explosion de l’économie financière, du formidable décalage entre l’économie spéculative et l’économie réelle, la cause aussi du dérèglement écologique planétaire.

Chaque jour, les transactions financières représentent en moyenne 3200 milliards de dollars. Seulement 2.7 % de cette somme sont liés à l’économie réelle soit environ 100 milliards de dollars, le reste n’est que spéculation et économie virtuelle.

Quelques autres valeurs annuelles donnent le vertige :
La publicité mondiale : 700 milliards de dollars,
Le marché des stupéfiants : 800 milliards de dollars,
Le marché de l’armement : 1200 milliards de dollars.

En pendant à ces sommes énormes, on a calculé récemment qu’en mettant seulement 40 milliards de dollars de plus sur la table on pourrait régler les problèmes d’eau potable, de faim, de soins de base, et la question du logement dans le monde. Dans le même temps, les États européens, pour sortir de la crise de la démesure qu’ils ont, pour leur part, eux-mêmes engendrée, veulent injecter dans leur économie 1000 milliards de dollars.

Et ces milliards de dollars où peuvent-ils les prendre : simplement dans votre poche, la poche du contribuable. Sont-ce les contribuables qui doivent éponger les pertes de l’économie casino, cette formidable machine à produire des inégalités, cette démesure ? 225 ultra riches ont, actuellement, l’équivalent de la fortune et des revenus de 2.5 milliards d’êtres humains!

Chez nous, on est capable de mettre sur la table 15 milliards de cadeaux fiscaux aux riches et on a toutes les peines du monde à trouver 1.5 milliards pour le revenu de solidarité active (RSA) destinés aux plus pauvres.

Déjà en 1930, Keynes disait : « c’est n’est pas une crise économique, c’est une crise de l’économie, c’est une crise de la surproduction, et nous risquons à terme une dépression nerveuse collective ».

La guerre de 1939 – 1945 a retardé l’échéance et il a fallu attendre 80 ans pour que sa prédiction se réalise. La même année, Freud, dans son livre Malaise dans la civilisation fait un constat similaire sur le psychisme collectif et les pulsions mortifères des sociétés.

Henri Ford disait qu’une entreprise était en danger lorsque le salaire du PDG était dix fois supérieur au salaire le plus bas de l’entreprise, aujourd’hui nous dépassons le rapport démentiel de 1 pour 1000, si ce n’est plus.

Il faut arrêter le massacre, s’il n’est pas trop tard, et considérer une autre façon de faire fonctionner la société. Il faut sortir de l’ubris général qui nous conduit au désastre avec la concomitance entre la crise écologique, la crise sociale et la crise financière.

Aujourd’hui, il ne faut pas, comme nos gouvernants voudraient nous le laisser croire, traiter d’un côté la crise financière par la fuite en avant, en oubliant ou en feignant de traiter la crise écologique et la crise sociale.

La théorie de la grande maison TERRE est première par rapport à nos petites maisons. Si la grande maison est en danger, alors qu’en est-il de nos petites maisons ?

Il faut reconsidérer la richesse :
Qu’est ce qui comptes vraiment dans nos vies ?
Dans quelle société voulons nous vivre ?
Et surtout quelle société voulons nous laisser à nos enfants ?

La chrématistique et son corollaire, la démesure, sont les mécanismes du creusement des inégalités et du pillage des ressources de la planète.

On parle d’homo sapiens sapiens, mais comme le dit Edgar Morin, on ferait mieux de parler d’homo sapiens demens parce que notre génie et notre folie sont fortement imbriqués, à moins que cette crise de civilisation nous conduise à devenir vraiment sapiens sapiens.



Soyons optimistes...

Jean-Claude Vitran et Jean-Pierre Dacheux

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