Selon Winston Churchill, la démocratie est considérée comme le « pire des régimes à l'exception de tous les autres », soulignant ses défauts mais aussi ses avantages. En effet, la démocratie est, en occident, considérée comme le meilleur modèle de gouvernement.
Toutefois, la démocratie est-elle en phase avec les exigences du XXIème siècle et reste t'elle réellement une bonne option ?
En ce qui me concerne, il n'y a aucun doute et la question ne se pose même pas, pourtant plusieurs études dénoncent une insatisfaction alarmante des citoyens des sociétés occidentales et nord-américaines par rapport à la démocratie et un sondage portant sur 27 pays affirme que nombreux sont les citoyens qui sont insatisfaits du fonctionnement de la démocratie. Leur mécontentement porte sur des préoccupations liées à l'économie, aux droits individuels, à l'immigration qu'ils jugent trop importante, et aux élites qui seraient déconnectées de la réalité.
En Europe, les pays du Nord - Suède, Pays Bas, … - sont satisfaits du fonctionnement de la démocratie, il n'en est pas de même des pays du sud - Italie, Espagne, Grèce, ... - où une majorité de la population, confrontée à des difficultés économiques, est insatisfaite.
60 % des sondés estiment que quels que soient les vainqueurs des élections, cela ne change pas grand chose et 54 % affirment que la plupart des politiciens sont corrompus.
L'ensemble de ces récriminations contribuent au succès de nombreux leaders conservateurs et populistes.
L'origine du mot démocratie vient du Grec « demo » : le peuple et « kratia » : le pouvoir, c'est donc une forme de gouvernement où le peuple s'exprime quant à l'exercice du pouvoir par l’intermédiaire de représentants élus ?
La démocratie athénienne est considéré comme le berceau de ce système politique.
Repensée et remodelée par les penseurs des Lumières, à partir de la fin du 19èmesiècle, ce système politique s'est imposé aux nations européennes qui, sûr de leur supériorité, ont décidé d'essaimer et de l'imposer à l'ensemble du monde.
Cette domination a fonctionné jusqu'à la fin de la décennie 1970 où la finance et le dogme capitaliste ont pris le contrôle de certaines démocraties et où l’exercice du pouvoir est concentré entre les mains de quelques-uns - l'élite - qui protègent leurs intérêts en favorisant les investisseurs privés et les grandes entreprises au détriment de la volonté du peuple.
Ce capitalisme cannibale a mis en place une mondialisation des échanges conduisant à une désillusion généralisée et à la disparition de nombreuses démocraties. Depuis l'an 2000, 25 démocraties se sont effondrées du fait de dégradations progressives de l'Etat de droit et des excès de l'économie de marché ; selon l'ONG Freedom House , depuis 2006, les Etats qui déclinent en matière de liberté publique sont plus importants que ceux qui s'améliorent ; depuis l'attentat des Twin Towers de 2001, la sécurité et la guerre contre le terrorisme ont supplanté la liberté dans les démocraties elles-mêmes.
Et l’élection de Donald à la tête des USA n'est pas là pour arranger les choses !
Pour lui, l'Etat de droit n'est plus un bien commun mais un obstacle aux intérêts des USA ; ce qu'il décide est contraire à la Constitution ... il s'en moque, il a été élu, il a donc tous les droits.
Cette situation folle des USA doit sonner comme une alerte, car en Europe, aussi, on constate une montée dangereuse du populisme dans l'ensemble des pays et certains aspects des systèmes démocratiques semblent dépassés pour faire face à ces menaces.
En France, on entend des propos similaires. Bruno Retailleau n'a t'il pas affirmé : « que l'Etat de droit n'était ni intangible ni sacré » et la condamnation de Marine Lepen a déclenché, de l'extrême droite à l'extrême gauche et aux populistes étrangers, une attaque en règle contre la justice et l'Etat de droit.
La défiance des citoyens envers leurs représentants atteint un niveau dangereux laissant entrevoir une remise en cause du contrat social. Beaucoup de nos contemporains dénoncent un système qui profiterait toujours aux mêmes, sous entendu aux plus riches.
Les piliers de la démocratie sont le respect de l'Etat de droit et la stricte séparation des pouvoirs, exécutif, législatif et judiciaire, mais aussi la confiance dans les Institutions et le principe du compromis.
La confiance dans les institutions est un enjeu central pour le fonctionnement de la société moderne. Selon le baromètre de la confiance du CEVIPOF , en février 2025, seuls 26 % des Français faisaient confiance aux Institutions de la République et désavouaient la classe politique, perçue comme corrompue et intéressée ; près des deux tiers de nos contemporains considèrent que la démocratie ne fonctionne pas correctement et demandent une forme de démocratie directe pour être associés aux grandes décisions.
Le compromis est une clé de voûte de la démocratie car il garantit la coexistence pacifique des différentes opinions ; il favorise la stabilité politique et concilie des positions initialement inconciliables en favorisant le dialogue, la reconnaissance mutuelle et la recherche d’un équilibre fragile mais nécessaire.
En démocratie, le compromis n’est possible que si tout le monde en accepte le principe, faute de quoi le compromis est impossible.
Le principe démocratique est de gérer la vie commune par les mots, le dialogue, et non par la violence.
Le compromis est essentiel au fonctionnement de la démocratie, c’est ce qui la rend si critiquée et critiquable, principalement par tous les autocrates et les populistes avides de pouvoir personnel qui le considèrent comme un signe de faiblesse.
Contrairement à nos voisins, la France a la réputation d’être très hostile aux compromis, c'est certainement une question de culture politique car rien dans la Constitution n’empêche le compromis. Effectivement, trop de leaders politiques, égocentriques, refusent d’en jouer le jeu.
La démocratie est en danger car le contexte international indique que l'Occident démocratique est de plus en plus attaqué et contesté par une partie du reste du monde, qui remet en cause ses principes, ses institutions et sa capacité à imposer ses valeurs ?
La contestation de l'universalité des Droits de l'Homme en est un exemple.
De toute façon, nous n'avons pas le choix, si la démocratie ne se réforme pas, elle disparaitra !
Nous l'avons connu dans le passé et nous le constatons encore, la démocratie n'est jamais totalement acquise et peut disparaître de façon tout à fait légale. Un des mécanismes - que nous constatons en France depuis de nombreuses années - qui peut favoriser le passage d'une démocratie à une autocratie est le manque de participation citoyenne lors des élections. Le vide qui se créé peut être exploité par des leaders charismatiques, mais autoritaires, lorsqu’une partie significative de la population se désengage.
Les crises économiques peuvent aussi précipiter vers l’autocratie des citoyens qui peuvent rechercher des solutions rapides et parfois radicales.
La stratification de la société et le manque de dialogue entre les différentes classes sociales contribuent également à cette vulnérabilité. Les disparités peuvent créer des tensions qui affaiblissent l’idée de communauté et renforcer des systèmes populistes qui séduisent ceux qui se sentent marginalisés.
Pour conclure, il me semble que l'avenir de notre démocratie dépend de notre capacité :
- à renforcer les institutions démocratiques,
- à respecter la séparation des pouvoirs et l'Etat de droit,
- à respecter la souveraineté du peuple,
- à respecter la diversité et la tolérance,
- à protéger les libertés fondamentales,
- à rétablir un dialogue social ouvert,
- à créer une société plus juste, plus équilibrée et plus harmonieuse.
Nous ne devons pas laisser brader notre démocratie et nos libertés, alors, à nous, d'avoir la volonté et la force de résister à tous les courants contraires.
Jean-Claude Vitran
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According to Winston Churchill, democracy is considered " the worst form of government except for all the others " highlighting its flaws as well as its advantages. Indeed, in the West, democracy is considered the best model of government.
However, is democracy in line with the demands of the 21st century and is it really still a good option ?
As far as I'm concerned, there is no doubt and the question doesn't even arise, yet several studies denounce an alarming dissatisfaction among citizens of Western and North American societies with democracy and a survey of 27 countries affirms that many citizens are dissatisfied with the functioning of democracy. Their discontent relates to concerns related to the economy, individual rights, immigration which they consider too high, and elites who are apparently disconnected from reality.
In Europe, the northern countries - Sweden, the Netherlands, etc. - are satisfied with the functioning of democracy, but this is not the case in the southern countries - Italy, Spain, Greece, etc. - where a majority of the population, faced with economic difficulties, is dissatisfied.
60 % of respondents believe that whoever wins the election does not make much difference, and 54 % say that most politicians are corrupt.
All of these complaints contribute to the success of many conservative and populist leaders.
The origin of the word democracy comes from the Greek " demo " : the people and " kratia " : power, so it is a form of government where the people express themselves regarding the exercise of power through elected representatives?
Athenian democracy is considered the cradle of this political system.
Rethought and remodeled by Enlightenment thinkers, from the end of the 19th century, this political system was imposed on European nations which, sure of their superiority, tried to spread and impose it on the whole world.
This domination continued until the end of the 1970s, when finance and capitalist dogma took control of some democracies and the exercise of power was concentrated in the hands of a few - the elite - who protected their interests by favoring private investors and large corporations to the detriment of the will of the people.
This cannibalistic capitalism has established a globalization of trade leading to awidespread disillusionment and the disappearance of many democracies. Since 2000, 25 democracies have collapsed due to a gradual deterioration of the rule of law and the excesses of the market economy; according to the NGO Freedom House Since 2006, more states have declined in terms of civil liberty than those that have improved; since the 2001 attack on the Twin Towers, security and the war on terror have supplanted liberty within democracies themselves.
And the election of Donald Trump as head of the USA is not going to help matters !
For him, the rule of law is no longer a common good but an obstacle to the interests of the USA ; thiswhat he decides is against the Constitution ... he doesn't care, he was elected, so he has every right.
This crazy situation in the USA should sound like a warning, because in Europe, too, we are seeing a dangerous rise in populism in all countries, and some aspects of democratic systems seem outdated to deal with these threats.
In France, we hear similar comments. Didn't Bruno Retailleau say:"that the rule of law was neither intangible nor sacred" and Marine Le Pen's conviction has triggered a full-scale attack on justice and the rule of law from the far right to the far left and foreign populists.
Citizens' distrust of their representatives has reached a dangerous level, suggesting a challenge to the social contract. Many of our contemporaries denounce a system that always benefits the same people, meaning the wealthiest.
The pillars of democracy are respect for the rule of law and the strict separation of powers, executive, legislative and judicial, but also confidence in the Institutions and the principle of compromise.
Trust in institutions is a central issue for the functioning of modern society. According to the CEVIPOF trust barometer , in February 2025, only 26% of French people trusted the Institutions of the Republic and disavowed the political class, perceived as corrupt and self-interested; almost two-thirds of our contemporaries consider that democracy does not function properly and demand a form of direct democracy to be involved in major decisions.
Compromise is a keystone of democracybecause it guarantees the peaceful coexistence of different opinions; it promotes political stability andreconciles initially irreconcilable positions by promoting dialogue, mutual recognition and the search for a fragile but necessary balance.
In a democracy, compromise is only possible if everyone accepts the principle, otherwise compromise is impossible.
The democratic principle is to manage common life through words and dialogue, not through violence.
Compromise is essential to the functioning of democracy, which is what makes it so criticized and open to criticism, mainly by all the autocrats and populists hungry for personal power who consider itas a sign of weakness.
Unlike our neighbors, France has a reputation for being very hostile to compromise. This is certainly a matter of political culture, as nothing in the Constitution prevents compromise. Indeed, too many self-centered political leaders refuse to play the game.
Democracy is in danger because the international context indicates that the democratic West is increasingly attacked and challenged by a part of the rest of the world, which questions its principles, its institutions and its capacity to impose its values ?
The challenge to the universality of human rights is an example.
In any case, we have no choice, if democracy does not reform, it will disappear!
We have seen it in the past and we see it again: democracy is never completely achieved and can disappear in a completely legal manner.One of the mechanisms - thatwe have observed in France for many years - which can promote the transition from a democracy to an autocracy is thelack of participationcitizenduring elections. The vacuum that is created can be exploited by charismatic but authoritarian leaders when a significant portion of the population disengages.
Economic crises can also push citizens towards autocracy, who may seek quick and sometimes radical solutions.
The stratification of society and the lack ofdialoguebetween different social classesalso contribute to this vulnerability. Disparities can create tensions that weaken the idea of community and reinforce populist systems that appeal to those whofeel marginalized.
In conclusion, it seems to me that the future of our democracy depends on our ability:
- to strengthen democratic institutions,
- to respect the separation of powers and the rule of law,
- to respect the sovereignty of the people,
- to respect diversity and tolerance,
- to protect fundamental freedoms,
- to re-establish an open social dialogue,
- to create a fairer, more balanced and more harmonious society.
We must not allow our democracy and our freedoms to be sold out, so it is up to us to have the will and the strength to resist to all opposing currents.
Jean-Claude Vitran